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EXTRAITS
DE QUELQUES LETTRES DE M.  BURNET.

 

De la lettre écrite à La Haye le 3 septembre 1687.

De la lettre écrite à La Haye le 27 avril 1688.

  

En attendant le livre de M. Papin (*), que ses infirmités continues retardent depuis si longtemps, le lecteur sera bien aise de voir les extraits des lettres de M. Burnet, que j'ai promis (1), et en

 

1 Ci-dessus, n. 112.

(*) La Tolérance des protestants et l'autorité de l'Eglise, imprimée en 1692. M. Papin mourut en 1709, dans La temps qu'il préparent une seconde édition de cet ouvrage, que le P. Pajon, prêtre de l'Oratoire, son cousin, et fils du célèbre ministre Pajou, publia depuis avec quelques autres de ses ouvrages. (Note de Leroi).

 

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même temps de savoir à quelle occasion elles ont été écrites. Ce jeune ministre, célèbre dans son parti, pour son esprit et pour son savoir, comme il paraît par le témoignage que lui rend M. Jurieu, et protestant de très-bonne foi, s'il en fut jamais, a toujours cru, comme il est vrai, que le principe fondamental de la religion protestante était de ne reconnaître sur la terre aucune autorité que celle de l'Ecriture en général, sans se croire astreint à aucune tradition, interprétation, détermination de l'Eglise, soit ancienne, soit moderne : voilà son principe, ou plutôt celui de la religion où il avait été élevé. Zélé qu'il était pour son parti, il se retira comme les autres, depuis la révocation de l'édit de Nantes : et après avoir été fait prêtre de l'église anglicane protestante, avec toutes sortes de bons témoignages, il exerça son ministère avec beaucoup de réputation dans quelques villes des plus célèbres du Nord. Le caractère de son esprit est d'être suivi, et de pousser un principe dans toutes ses conséquences. Celui de ne reconnaître aucune autorité sur la terre, lui tenait autant au cœur que la religion qu'il professait; parce que c'en est le fondement, et à vrai dire, ce qui la distingue de la foi romaine. Plus il suivait ce principe, plus il sentait que, ni les décisions des synodes, ni les Confessions de foi, ni enfin ce qu'on appelait dans le parti la Traditive des églises protestantes, n'étaient un principe suffisant pour le déterminer : au contraire, l'autorité qu'il voyait qu'on voulait donner à toutes ces choses, contre les vrais principes de la Réforme, lui paraissait, comme elle était selon ses principes, un joug tout à fait humain, qu'on imposait aux consciences, et un vrai retour au papisme. En cet état, on voit bien qu'il de voit devenir fort tolérant : il s'enfonçait insensiblement dans la tolérance où les principes de sa religion le conduisaient ; et il est vrai qu'ils le mettaient beaucoup au large : car il ne connaissait pas ce joug salutaire que l'autorité de l'Eglise impose à notre raison chancelante par elle-même, et la Réforme lui avait appris à le regarder comme une tyrannie. Il est toujours demeuré fort persuadé de la divinité de Jésus-Christ, et par là très-éloigné des sociniens.

Mais comme il ne s'en éloignait que par des raisonnements qu'il faisait en son esprit sur l'Ecriture, et qu'il voyait que les autres

 

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en faisaient de tout contraires, sans qu'aucune autorité qui fût sur la terre, put déterminer les esprits d'un côté plutôt, que de l'autre, il ne voyait point par quel endroit il pouvait les condamner ni les exclure du salut, non plus que les autres sectes du christianisme. Alors donc il composa le petit livre De la Foi réduite à ses justes bornes, où il est vrai qu'il donne à pleines voiles dans la tolérance universelle. Le reste de son histoire n'est pas de ce lieu, non plus que le fameux démêlé qu'il eut avec M. Jurieu, sur la matière de la grâce. M. Papin suivoit la doctrine de son oncle, M. Pajon : et bon protestant qu'il était, il n'avait pas cru que l'autorité du synode d'Anjou fût suffisante pour l'en détourner. En un mot, il donnait tout au raisonnement, et il n'avait rien alors qui put l'empêcher d'ouvrir une vaste carrière à ses sentiments, ni de jouir du charme décevant qui accompagne naturellement cette liberté. Ce qu'il y avait pour lui de plus dangereux , c'est qu'il trouvait les plus beaux esprits de la Réforme, et entre autres M. Burnet, dans la même opinion, comme on le va voir par les extraits de ses lettres. Il allait donc devant lui dans le chemin de la tolérance, sans que rien le put retenir, jusqu'à ce qu'ayant aperçu que le principe de la Réforme, qui le forçait à tolérer les sociniens, ennemis de la divinité de Jésus-Christ, le poussait encore plus loin, et qu'il fallait nécessairement étendre la tolérance au delà des bornes du christianisme, c'est-à-dire, mettre le salut hors de Jésus-Christ, et tolérer toute religion, ce qui était, à dire le vrai, n'en avoir aucune ; à la vue de cet abîme, saisi de frayeur, il fit un pas en arrière. Il se mit à envisager la sainte et inévitable autorité de l'Eglise catholique, il crut, il se convertit: et maintenant il produit les lettres de M. Burnet, en témoignage aux protestants que s'il est tombé dans l'erreur de l'indifférence, jusqu'à l'excès qu'on a vu, il y a été conduit par leur principe, et confirmé par l'approbation de leurs plus célèbres docteurs. Il produirait aisément beaucoup d'autres lettres de ses amis, que j'ai vues en original; mais il ne veut point leur faire de peine, ni les exposer à la redoutable colère de M. Jurieu : assuré, comme j'ai dit, que M. Burnet ne le craint pas, et d'ailleurs, ce docteur s'étant déclaré pour la tolérance, aussi hautement

 

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qu'on l'a pu voir (1), ce n'est pas trahir un secret, que d'exposer ses sentiments aux yeux du public. Voici donc ce qu'il a écrit sur le livre De la Foi réduite à ses justes bornes.

 

De la lettre écrite à La Haye le 3 septembre 1687.

 

Enfin je vous souhaite toute sorte de bonheur, mon cher ami. Pour votre antagoniste ( M. Jurieu), je ne doute pas qu'il fera tout ce qu'il pourra pour vous nuire ; mais j'espère que ce sera sans effet. J'ai vu le livret dont vous parlez ( La Foi réduite à ses justes bornes), et je demeure d'accord pour le gros, quoiqu'il y a quelque chose que peut-être j'aurais rayé, si on m'avait consulté avant l'impression; car il faut éviter de donner des prises à ceux qui les cherchent. Encore une fois, je vous souhaite un bon voyage et toutes sortes de prospérités, et m'assure que vous vous souviendrez quelquefois de celui qui est, sans cérémonie et avec beaucoup de sincérité,

 

Tout à vous, G. Burnet.

 

M. Papin lui ayant envoyé le discours de Strimésius, si déclaré pour l'indifférence, comme on l'a pu voir ci-dessus, M. Burnat lui fit cette réponse.

 

De la lettre écrite à La Haye le 27 avril 1688.

 

J'ai vu avec beaucoup de plaisir que M. Strimésius a porté les principes de la tolérance chrétienne fort loin, ce qui lui attirera peut-être la censure de tous les rigides : mais nous verrons comme il sera appuyé; car c'est un pas très-digne d'un bon chrétien et d'un grand théologien, qu'il vient de faire, et vous avez raison de dire qu'il a porté la tolérance plus loin que n'a fait votre livre, etc.

 

Tout à vous, Burnet.

 

Je ne crois pas que personne en demande davantage sur ce sujet. Au reste quand M. Jurieu me reproche, dans le libelle qu'il a écrit contre M. Papin, que je n'ai pas fait abjurer à ce ministre son socinianisme, ni son pélagianisme, il ne songe pas que le Symbole de Nicée est à la tête de la Profession de foi des catholiques, et qu'on y reçoit expressément la doctrine de la session VI du concile de Trente, où le socinianisme et le semi-pélagianisme sont de nouveau frappés d'anathème.

 

1 Ci-dessus, n. 112.

 

 

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