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EPISTOLA LXXXIII.
BOSSUETUS AD CLEMENTEM XI. DE VIRTUTIBUS VENERABILIS VINCENTII À PAULO.
BEATISSME PATER,
Oportet episcopos ad apostolicam Sedem sincerum atque
integrum deferre testimonium veritatis in quâcumque causa, quœ ad ejus judicium
devenue possit ac debeat. Cùm itaque de venerabilis presbyteri Vincentii à
Paulo, Congregationis Missiouis institutoris ac primi prœpositi generalis, vità
et sanctitate quaestio habeatur, testamur euindem virum ab ipsâ adolescentià
nobis fuisse notum, ejusque piis sermonibus atque consiliis veros et ingenuos
christianae pietatis et ecclesiastice disciplinée seusus nobis esse instillatos,
quorum recordatione in hàc quoque œtate mirificè délecta mur.
Processu temporis et jam in presbyterio constituti, in eam
sodalitatem cooptati sumus, quae pios presbyteros, ipso duce et auctore in mium
colligebat, de divinis rébus per singulas hebdomadas tractaturos. Pium cœtum
animabat ipse Vincentius, quem cùm disserentem avidi audiremus, tunc impleri
seutiebamus apostolicum illud : Si quis loquuur, tanquàm sermones Dei; si
quis ministrat, tanquàm ex virtute quam administrat Deus (1).
Aderant plerumquè magni nominis episcopi, viri famà et
pietate
1 I Petr., IV, 11.
276
perducti, ab eâque sodalitate mirum in modum, auctore
Vincentio, in apostolicis curis ac laboribus juvabantur. Prœsto erant operarii
inconfusibiles, qui per eorum ecclesias rectè tractabant verbum veritatis, nec
minus exemplis quàm verbis Evangelium praedicabant.
Fuit etiam illud nobis desideratissimum tempus, quo eorum
laboribus sociati, Metensem Ecclesiam, in quà tunc ecclesiasticis officiis
fungebamur, in vitae pascua deducere conabamur : cujus Missionis fructus
venerabilis Vincentii non modo piis instigationibus atque consiliis, verùm etiam
precibus tribuendos nemo non sensit.
Ille nos ad sacerdotium promovendos suâ suorumque operâ
juvit. Ille secessus pios clericorum, qui ordinandi veniebant, sedulò instituit
: nosque etiam non semel invitati, ut consuetos per illa tempora de rébus
ecclesiasticis sermones haberemus, pium laborem, optimi viri orationibus et
monitis freti, libenter suscepimus. Licuitque nobis affatim eo frui in Domino,
ejusque virtutes coràm intueri, praesertim genuinam illam et apostolicam
charitatem, gravitatem atque prudentiam cum admirabili simplicitate conjunctam,
ecclesiasticae rei studium, zelum animarum, et adversùs omnigenas corruptelas
invictissimum robur atque constantiam.
Quàm puram fidem coleret, quam Sedi apostolicae ejusque
decretis reverentiam exhiberet, quanta animi demissione et humilitate, in
amplissimis licet regiorum etiam consiliorum functionibus constitutus, Domino
deserviret ; recordantur omnes, et ego suavissimè recolo.
Crescit in dies pii viri memoria, qui in omni loco Christi
bonus odor factus, dignus ab omnibus habetur, qui à sancto Pontifice rite et
canonicè Sanctorum numéro inseratur, si Vestrae Beatitudini placuerit.
Nostris verò sensibus, Beatissime Pater, eò gratior ac
firmior venerandi Vincentii haeret recordatio, quod in suâ Congregatione, et in
nostrâ quoque diœcesi spirantem intuemur. Cum ejus discipulis compresbyteris
nostris vivimus; cum iis laboramus; eorumque doctrinâ et exemplis commissum
nobis gregem,
277
indefesso studio neque unquàm intermisso opère, pasci
gaudemus in Domino.
Neque licet conticessere de piarum fœminarum coetu, quae ab
ipso sanctissimis regulis informatae, pauperibus et aegrotis sublevandis tantâ
castitate, bumilitate, charitate serviunt ; ut sui institutoris, ab eoque insiti
spiritûs oblivisci non sinant.
Nos ergô pii viri memores, hoc nostrum testimonium,
Beatissime Pater, in Vestrae Sanctitatis paternum sinum effundimus, gnari
scilicet Sanctorum mentione delectari Sanctos. Sed plura proferre tanta
majestas, et pontificiis humeris ingruens negotiorum moles non sinunt : quanquàm
maximarum rerum gubemacula tenenti, et magnitudo mentis, et rerum providentia,
et de cœlo solatia atque consilia abundè suppetunt viresque integrant. Quo bono
ut Ecclesia Christi diutissimè potiatur, summa votorum est. Haec coràm Deo in
Christo loquor, in conscientiâ bonâ et fide non fictâ, ego,
Beatissime
Pater,
Sanctitatis
vestrae,
Devotissimus atque
obedientissimus servus ac filius,
+ J.
BENIGNUS, Episcopus Meldensis.
Datum in civitate nostrâ Meldensi, 2 augusti 1702.
LETTRE LXXXIV.
BOSSUET A M. LE CARDINAL DE NOAILLES. A Meaux, ce 6 septembre 1702.
J'ai lu, Monseigneur,
l'Ordonnance qu'il vous a plu de m'envoyer avec toute l'attention que Votre
Eminence me prescrivait et que la matière mérite : je l'ai admirée dans toutes
ses parties.
Il était de la dernière conséquence de bien établir le
droit des Ordinaires : ce que vous avez fait excellemment, en expliquant même la
qualité de prêtre, qui obligeait l'auteur à une plus grande obéissance. Ce qui
est dit si précisément des approbateurs n'était pas moins nécessaire, et ne
pouvait être placé plus à propos
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qu'avec le décret de la Faculté de théologie. Tous les
passages particuliers sont bien remarqués et bien repris en peu de mots, mais
tranchants, comme il convenait. Votre Eminence m'a fait grand plaisir de bien
marquer les bassesses, et cet endroit important est parfaitement bien traité. Il
ne me reste qu'à vous supplier de considérer trois choses, que je vous
représente avec soumission.
La première sur le mot haï, Luc, XIV, 26, et Rom.,
IX, 13. On voit bien dans ce dernier lieu que l'intention de l'auteur est
d'affaiblir l'explication de saint Augustin : on voit bien aussi que Votre
Eminence n'a pas voulu autoriser le sens de l'auteur, puisqu'elle dit seulement
: « Qu'on pourrait ne pas relever. » Cependant comme il est certain que réduire
haïr à moins aimer, ce n'est pas seulement altérer le texte, mais encore
restreindre et affaiblir celui de l'Apôtre, et que le sens est insuffisant et
mauvais en soi, ut jacet : il semble que c'est trop peu dire, que de dire
: On pourrait ne pas relever; et que c'est laisser croire que le sens au fond
serait bon, ou du moins supportable. Pour empêcher une conséquence si fâcheuse,
on pourrait insérer ces mots : « S'il s'était contenté de mettre dans ses notes
son explication avec les précautions nécessaires : » par ce moyen tout sera
sauvé ; et Votre Eminence n'est pas obligée de s'expliquer davantage.
La seconde chose regarde l'endroit où vous marquez beaucoup
d'articles de foi qui sont affaiblis par les notes. Il me semble qu'il ne
fallait pas oublier la divinité de Jésus-Christ : car encore que bien éloigné de
la nier, l'auteur l'ait expressément reconnue dans quelques-unes de ses notes,
il n'est pas moins vrai ni moins certain que d'autres notes en affaiblissent les
preuves, et y fournissent des solutions. Cependant vous le mettez à couvert de
ce côté-là par votre silence : car on dira qu'ayant fait un si long dénombrement
des dogmes affaiblis, vous n'en auriez pas omis un si essentiel. Pour moi je
démontrerai plus clair que le jour, que l'auteur affaiblit ce grand mystère dans
plusieurs passages, et je dois craindre qu'il ne prescrive contre moi par votre
censure ; ce qui serait trop contraire à vos intentions. S'il vous plaisait
d'ajouter après tous les dogmes et à la fin : « Et même en
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quelques endroits sur la divinité de Jésus-Christ, » vous
sauveriez tout. Ce qu'on pourrait conclure, serait qu'il ne parle pas
conséquemment, ce qui est constant ; et vous me laisseriez toute liberté de dire
la vérité sans réserve.
La troisième chose regarde les qualifications, et je ne
vois pas que vous puissiez éviter celle d'induisante à hérésie. Car encore que
vous ayez mis l'équivalent, vous savez ce qu'opèrent les qualifications précises
: celle-ci est inévitable après toutes les autres remarques. Vous paraîtriez,
Monseigneur, affaiblir votre censure, et ne la pas conformer assez à l'exposé
qui précède.
J'ose faire, Monseigneur, avec soumission ces humbles
représentations à Votre Eminence, et je la supplie seulement de me mander ce
qu'elle aura résolu sur mes doutes, afin que j'y aie l'attention que je dois.
J'espère, Monseigneur, être bientôt en état d'envoyer à Votre Eminence mon
projet, auquel je n'ai pu donner la dernière forme qu'après avoir vu votre
dessein : je vous rends grâces de me l'avoir communiqué. Vous savez,
Monseigneur, mon obéissance.
LETTRE LXXXV.
BOSSUET A M. LE CARDINAL DE NOAILLES. A Germigny, ce 4 octobre 1702.
Il est, Monseigneur, tombé entre mes mains copie d'une
lettre que je sais avoir été adressée à quelques évêques : j'ai cru qu'il était
bon que Votre Eminence en fût avertie ; peut-être l'est-elle déjà. Il me semble
qu'il est important que Rome sache cela, et soit prémunie contre ces lettres
mendiées. Je crois aussi, Monseigneur, qu'il sera bon que messieurs des Missions
soient avertis. Je me réjouis d'apprendre le grand effet de votre censure. Vous
savez, Monseigneur, mon obéissance.
280
LETTRE LXXXVI.
LE PÈRE DE LA CHAISE A UN ÉVÊQUE (a). A Paris, septembre 1702.
Il me revient de Rome par plusieurs endroits, que quelques
personnes qui se mettent moins en peine d'édifier l'Eglise que de décrier notre
Compagnie, ont osé y écrire à Sa Sainteté même, que toute l'Eglise gallicane se
soûle voit contre le Saint-Siège sur sa lenteur à condamner les opinions des
missionnaires de la Chine; et que si elle ne cassait promptement le décret par
lequel le pape Alexandre VIII, pour faciliter les progrès de la vraie foi, avait
réglé les cérémonies qu'on pouvait ou qu'on devait y conserver, cela causerait
toujours le plus grand obstacle qu'on trouve aujourd'hui à la conversion des
hérétiques de France.
Je ne crois pas que vous soyez de ce sentiment, ni que vous
ayez autorisé ceux qui se sont voulu faire caution de tous les évêques du
royaume auprès de Sa Sainteté, sur un point si faussement et si malignement
inventé. Vous savez le contraire, Monseigneur, puisqu'il est certain et
manifeste qu'on ne pourrait faire de plus grand plaisir aux protestants, ni rien
de plus propre à les entretenir dans le schisme, que de leur faire voir dans les
décrets et les décisions des papes, cette contradiction que les novateurs y
cherchent avec tant de soin, et de laisser croire à tout le monde que l'Eglise a
souffert durant plus de cent ans des idolâtries à la Chine, quoiqu'elle en fût
bien informée.
Vous voyez, Monseigneur, combien ces exagérations sont de
mauvaises voies de solliciter le saint Siège, pour lui ôter, s'il se pouvait, la
liberté de rendre encore un jugement avantageux à la religion, auquel les
Jésuites seront assurément toujours les plus soumis, puisque de cette soumission
dépend tout le fruit du zèle avec lequel notre Compagnie sacrifie un si grand
nombre de ses meilleurs sujets au ministère de l'Evangile dans les pays
infidèles.
(a) C'est la lettre dont il est parlé dans la précédente,
et peut-être écrite à Bossuet lui-même.
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Le sentiment d'un prélat de votre mérite et de votre
capacité serait d'un grand poids dans cette occasion; et je vous supplie
très-humblement de vouloir bien me le marquer dans la réponse dont vous
daignerez m'honorer. Vous le devez an bien de l'Eglise, et j'ose attendre cette
marque de votre zèle et de votre bonté. Je suis très-respectueusement, etc.
F. de la
Chaise.
LETTRE LXXXVII.
BOSSUET A MILORD PERTH. A Versailles, ce 6 janvier 1703.
Je prends la liberté de vous envoyer le livre que j'ai été
obligé de composer contre le Nouveau Testament de Trévoux. Je ne vous en dirai
point les raisons, que le livre vous fera connaître. Mais, Milord, j'ai une
grâce à vous demander; c'est de vouloir bien me faire l'honneur de présenter en
mon nom à Leurs Majestés ce présent indigne d'eux, mais que j'ose leur offrir
avec un dévouement parfait. J'espérais en vérité pouvoir leur aller faire ma
cour, et je différais dans cette espérance ; mais on ne croit pas que ma santé
le permette : vous suppléerez à tout par vos bontés. Je vous supplie de me faire
encore la grâce de faire agréer un de ces livres à M. le duc de Berwic, l'autre
à M. de Midleton, dont la conversion et les bons exemples édifient et
réjouissent toute l'Eglise. Vous seul pouvez faire valoir un si petit présent.
Conservez-moi cette précieuse amitié ; et croyez qu'on ne peut être avec plus de
respect et d'attachement, etc.
LETTRE LXXXVIII.
BOSSUET A MILORD PERTH. A Versailles, ce 28 mars
Je ne puis vous exprimer ma très-humble reconnaissance
envers la Reine, non-seulement pour le témoignage du précieux
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souvenir de Sa Majesté, mais encore pour l'excellence du
présent dont elle m'honore. Le livre que vous me faites l'honneur de m'envoyer
de sa part (1) est plein de vrais miracles ; et je n'en vois point de plus grand
que la foi, les sentiments et les pratiques d'un roi humble, d'un roi pénitent,
d'un roi qui sent et fait sentir la plus signalée de toutes les grâces, dans la
suite des malheureux succès qui l'ont dépouillé de trois royaumes et l'ont tenu
relégué durant tant d'années dans un pays étranger. L'Eglise n'a rien de plus
précieux que ces grands exemples, qui font voir que Dieu fait des saints quand
il lui plaît, et sait inspirer les pratiques des plus hautes maximes que la
doctrine et la vie de Jésus-Christ ont fait paraître dans le monde.
Je ne finirais jamais, Milord, si je voulais transmettre au
papier ce que ce livre me met dans le cœur. Il sera le vrai don royal de la
Maison d'Angleterre. La France, qui a été témoin des plus grandes merveilles du
saint roi, le comptera parmi ses trésors. On ne verra point ni de plus solide
instruction pour la piété, ni même de plus belle controverse pour ramener les
errants à l'Eglise catholique. Tout y est, et tout y est réduit en pratique. Je
prie Dieu qu'il soit la consolation de la reine, l'instruction domestique du
jeune roi, et une ressource bienheureuse comme un témoignage immortel à
l'Angleterre. Aimez toujours celui qui est avec un respect et un attachement
inviolable, autant que tendre et sincère, etc.
1 Nous ignorons quel est ce livre; nous ne connaissons du
roi Jacques II qu'un Journal très-curieux de toute sa vie, qu'il a laissé et que
l'on conserve au collège ou séminaire des Ecossais à Paris. On trouve aussi à la
fin de la Vie de ce prince, donnée à Bruxelles en 1740, quelques écrits qu'il
avait composés, et qui y sont imprimés sous ce titre : sentiments de Jacques
II sur divers sujets de piété (Les édit.).
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LETTRE LXXXIX.
BOSSUET A M. DE LA BROUE, ÉVÊQUE DE MIREPOIX (a). A Paris, ce 29 mars 1703.
Votre lettre, Monseigneur, achève de me déterminer à la
matière importante que vous souhaitez (1), par l'attention qu'elle me fait faire
au défi du sieur Basnage. Voici donc quel sera, s'il plaît à Dieu, l’ordre des
ouvrages que je prépare. La seconde Instruction sur les passages
particuliers est nette, avec une Dissertation préliminaire sur Grotius,
qui est de la dernière conséquence à cause de ses commentaires et autres
ouvrages qui répandent l'erreur partout. Cela est fait; il n'y a qu'à mettre au
net pour la dernière fois. Là je promettrai dans la préface l'ouvrage que vous
prescrivez, et j'y travaillerai pendant l'impression. La chose sera facile dans
l'état où se trouve la composition ; et la matière étant non-seulement toute
digérée dans mon esprit, mais encore presque toute déjà mise, en l'état que vous
savez, sur le papier.
J'aurai une joie extrême de vous embrasser et de conférer
avec vous. M. du Maine ne me donna point d'autre raison, sinon en général qu'il
ne fallait point s'engager ; mais au reste il parut très-disposé.
Ne soyez pas en peine de ma santé : vous la croyez plus
languissante qu'elle n'est, Dieu merci. Il est vrai que le grand âge apporte
certaines sortes d'incommodités qui obligent à des précautions aisées et
innocentes, qui ne laissent pas de faire discourir le monde. Tout est dans la
main de Dieu, de qui en tout temps et principalement à l'âge où je suis, il faut
recevoir la vie et la santé comme heure à heure et de moment en moment, sans se
1 La matière importante dont il s'agit ici, est celle de la
grâce et du libre arbitre, sur laquelle Bossuet s'engagea, dans la préface de sa
seconde Instruction contre la version du Nouveau Testament imprimée à Trévoux,
de montrer le consentement des anciens Pères avec saint Augustin et ses
disciples. Il a rempli cet engagement dans l'ouvrage qui a pour titre :
Défense de la Tradition et des saints Pères.
(a) Collationnée. Manuscrit à Meaux.
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rien promettre, pour la faire servir à la gloire de Dieu
jusqu'au dernier soupir. Cette pensée me fait passer la vie doucement, en
attendant qu'il faille en partir; ce qui après tout, par la grande bonté de
Dieu, est le moment le plus désirable.
Ces légères indispositions m'ont tenu ici plus longtemps
que je ne voulais, pour y régler avec les médecins qui me connaissent le régime
et les précautions autant qu'il se pourra par l'expérience.
Où en êtes-vous de vos ouvrages? Pour moi j'espère que Dieu
me donnera le temps de rendre à l'Eglise le service que vous souhaitez. Je suis
avec tout le respect et l'attachement que vous savez, etc.
LETTRE XC.
BOSSUET A M. LE CARDINAL DE NOAILLES. A Versailles, ce 1er mai 1703.
Comme je n'ai rien de caché pour Votre Eminence, je lui
envoie le Mémoire que je viens de présenter, et qui a été bien reçu. Je ne
demande rien à Votre Eminence : je sais qu'elle est disposée à me faire tout le
plaisir possible ; mais il faut attendre f occasion naturelle, et surtout ne
témoigner aucun empressement de ma part. En effet je n'en ai aucun ; car je ne
compte pas pour empressement de vous instruire, Monseigneur, à toutes fins.
L'occasion décidera; et quant à présent je crois qu'il n'y a rien à faire, pas
même le moindre semblant : la chose viendra naturellement, quand Dieu le voudra.
Ce n'est pas non plus par empressement que j'envoie copie du Mémoire à madame de
Maintenon : il faut instruire ses amis à toutes fins, et les laisser faire selon
l'occasion que Dieu fera naître, et les mouvements qu'il leur mettra dans le
cœur.
L'abbé est en visites pour quelques jours; j'offre à Votre
Eminence mon obéissance et la sienne.
285
PLACET AU ROI.
Bossuet le supplie de lui accorder sou neveu pour coadjuteur (1).
Ce n'est ni par mérite, ni par service aucun, mais par la
grande bonté de Votre Majesté toute seule, dont j'ai reçu et reçois tous les
jours des marques si éclatantes, que j'ose prendre la confiance d'exposer à
Votre Majesté l'état où je suis, et le secours que je puis recevoir de cette
extrême bonté dont je suis si pénétré.
Après avoir écouté les conjectures et les raisonnements des
hommes les plus consommés en science et en expérience, j'ai cru devoir venir
depuis quinze jours aux épreuves les plus assurées entre les mains de Mareschal
(2), et il a été trouvé que j'avais une pierre. Il est constant par la même
épreuve, qu'elle n'a pas plus de grosseur qu'il n'en faut pour donner prise et
que, Dieu merci, elle est encore de la figure et de la qualité qui la peuvent
rendre la moins incommode. J'en ai même une preuve expérimentale, puisqu'on a
jugé par les accidents qu'elle dure depuis deux ans dans le même état, sans que
j'en aie reçu aucune notable incommodité, non plus que depuis que je sais le
mal. Il y a cent expériences connues de personnes qui ont porté le même mal des
dix et quinze années avec quelques incommodités plus ou moins grandes, et toutes
plus supportables que celles de la taille, à quoi on ne vient qu'à l'extrémité
et après avoir tenté toutes sortes d'adoucissements. C'est la résolution où Dieu
me met, selon les règles de la prudence chrétienne, offrant à sa divine Majesté
ou
1 Le père Mercier, chanoine régulier de Sainte-Geneviève et
anciennement bibliothécaire de cette abbaye, fit imprimer ce placet en 1765,
dans le Journal des sciences et beaux arts, qu'il rédigeait alors. Il y
ajouta la note suivante : « Les lecteurs verront certainement avec plaisir ce
morceau, qui est tombé entre nos mains depuis quelque temps, et que nous croyons
n'avoir jamais été publié. Les moindres productions des grands hommes sont en
possession d'intéresser ceux qui veulent connaître à fond leur âme : celle-ci
attache singulièrement par les détails qu'elle renferme. Au reste on sait que M.
Bossuet n'obtint pas du Roi la coadjutorerie de Meaux pour son neveu, comme il
le demandait par ce placet ». Journ. des scienc. et beaux arts, fév.
1765, p. 534 et suiv. —
2 George Mareschal, premier chirurgien du Roi et chevalier
de Saint-Michel mort le 13 décembre 1736, à l'âge de soixante-dix-huit ans.
286
ce qu'elle voudra me faire souffrir, en esprit de
soumission et de pénitence.
Il n'y a que mes fonctions qui m'inquiètent ; et j'aurai
l'honneur de le dire à Votre Majesté sous les yeux de Dieu, en toute humilité et
vérité, que j'y suis soulagé, plus que je ne puis exprimer, par l'abbé Bossuet
mon neveu. Oserai-je dire à mon Maître, et à un Maître si bon ; Sire,
permettez-le-moi, qu'une de mes aversions, c'est de prôner ceux qui
m'appartiennent. Mais puisqu'il faut dire la vérité à son Roi, je puis assurer
Votre Majesté, sans craindre d'en avoir jamais de reproche, ni devant Dieu, ni
devant les hommes, que l'abbé Bossuet fait depuis douze ans qu'il est
archidiacre, et depuis quatre ans qu'il est de retour de Rome et mon
grand-vicaire, toutes mes visites avec un soin dont je suis content, et avec une
parfaite édification des curés, des chapitres, des couvents et communautés
religieuses et de tout le peuple : en sorte que je ne crains point de me
flatter, en répondant à Votre Majesté de sa bonne conduite.
Je ne présume pourtant pas de supplier Votre Majesté de
s'en rapporter à mon témoignage, quoique rendu en conscience sous les yeux de
Dieu ; au contraire je la conjure par toute sa bonté d'en venir au plus
rigoureux examen. Votre Majesté saura bien choisir des personnes désintéressées.
Je le mets à toute épreuve, assuré qu'il se trouvera que c'est un esprit solide
et sérieux, occupé du ministère ecclésiastique, plus éloigné du monde qu'on ne
saurait croire, prêtre disant souvent la sainte messe avec édification. Aussi
est-il dans un âge mur, âgé de trente-neuf ans. Il n'est prêtre que depuis
quatre années, au retour de Rome; et il a cru qu'il prendrait ici le sacerdoce
avec plus de réflexion et de recueillement, après toutes les épreuves de mon
séminaire où il a été.
Puisque je viens de dire un mot de son voyage de Rome,
Votre Majesté aura peut-être la bonté de se souvenir des quatre années qu'il y a
passées à combattre le quiétisme ; des contradictions de toutes les sortes, et
même des calomnies qu'il a eu à essuyer, dont la fausseté a été reconnue. Je
l'ai loué de sacrifier tout autre intérêt à la vérité. Votre Majesté, Sire, la
protégeait; et l'abbé
287
Bossuet est trop heureux qu'elle ait daigné approuver sa
conduite.
Je continuerais à gouverner mon diocèse tranquillement,
tant qu'il plairait à Dieu : mais je ne puis m'exposer aux ordinations et aux
cérémonies pontificales sans quelque péril, et surtout à la Confirmation qui
fait la consolation des peuples et la principale bénédiction des visites. C'est,
Sire, ce qui nie donne la pensée, et me met dans la nécessité, prosterné aux
pieds de Votre Majesté avec une humilité profonde, de la supplier de vouloir par
sa grande et très-grande grâce me donner mon neveu pour successeur. Par ce
moyen, Sire, Votre Majesté me fera achever ma vie en repos : je serai un exemple
éclatant de sa grande et excessive bonté. Mon neveu instruit de mes sentiments
et soutenu de mes conseils, continuera le peu de bien que j'ai tâché pendant
vingt-deux ans d'établir et d'entretenir dans mon diocèse. La voie de
coadjutorerie marquerait une bonté plus déclarée de Votre Majesté, joint que
conservant mon autorité, elle me rendrait peut-être plus utile au diocèse. Mais
en quelque sorte que Votre Majesté daigne en ordonner, je m'abandonne à elle. Je
suis prêt de donner ma démission pure et simple : Votre Majesté saura faire ce
qui sera le plus utile. Au surplus je n'attends rien que de la seule
très-bienfaisante bonne volonté du plus grand comme du meilleur de tous les
maîtres : et soutenu de ses bienfaits, dans le repos et dans le bon air de Meaux
et de Germigny, qui est devenu comme mon air natal, si Votre Majesté l'a
agréable, je pourrai achever mes jours en paix ; et même, si Dieu le permet, car
qui connaît ses bontés et qui peut y donner des bornes? je pourrais en ménageant
mes forces, qui à cela près sont entières, continuer à servir l'Eglise, en tout
cas prolonger ma vie dans le service de Dieu jusqu'à une fin naturelle, telle
qu'il lui plaira la marquer, et en remplir tous les moments de vœux pour la
personne sacrée de Votre Majesté, si nécessaire à vos peuples et à toute
l'Eglise.
288
LETTRE XCI.
BOSSUET A DOM MABlLLON, RELIGIEUX BÉNÉDICTIN. A Paris, ce 22 mars 1703.
Je me suis fait lire, mon révérend Père, la vie que vous
venez de m'envoyer avec les prières y jointes. Il faudrait un peu adoucir
l'endroit de la Becnaude (1) à la page 9, et en supprimer le nom, qui n'est pas
assez sérieux pour être imprimé. La raison voudrait qu'on ne parlât point de la
pierre (2) : mais comme il y a là une instruction pour la modestie, il faut
seulement adoucir l'endroit avec des on dit, on croit communément sur le
témoignage de quelques auteurs assez anciens, et ainsi du reste. Il faut
aussi adoucir par de semblables expressions, ce qui est rapporté dans la même
page sur l'ambassade des Ecossais et la royauté de saint Fiacre. Il faut aussi
retrancher une grande quantité de vers fort impertinents. Au lieu des miracles
qu'on y énonce trop grossièrement, on pourrait se contenter de traduire la prose
qu'on lit dans l'Eglise : ce qu'on dit de la chasteté de saint Fiacre et de
cette fille, est compris parmi ces vers. Après ces corrections, que je vous prie
de m'envoyer au plus tôt, et dont aussi je me repose sur votre prudence, je
ferai ce qu'il conviendra. Je suis à vous, mon révérend Père, comme vous savez,
de tout mon cœur, etc.
1 C'est le nom donné à une femme que l'on prétend avoir
traduit saint Fiacre, à cause des miracles qu'il opérait, comme un magicien,
devant saint Faron, évêque de Meaux (Les édit.). — 2 Il s'agit de la
pierre sur laquelle on dit que saint Fiacre s'assit, et que sa vertu contraignit
de fléchir sous lui pour lui fournir un siège plus commode. Voyez sur la vie de
ce Saint dom Mabillon, Acta Sanctor. Ordin. S. Bened. saecul. secund.
pag. 598 et seq. (Les edit. )
289
LETTRE XCII.
BOSSUET A M. LE COMTE DE PONTCHARTRAIN, MINISTRE ET SECRÉTAIRE D'ÉTAT. Ce 6 juin
1703.
Pour vous rendre compte du personnage dont vous me faites
l'honneur de m'écrire, j'aurai l'honneur de vous dire en général que tout ce qui
a rapport à moi, dans la relation que vous m'envoyez, est véritable. Dans le
détail, il est vrai que cet étranger vint chez moi à Versailles en l'an 1692 ou
environ, recommandé par un missionnaire ou bénédictin anglais. Lorsqu'il arriva,
feu M. de Court se trouva chez moi, qui par la connaissance qu'il avait des pays
et des affaires d'Orient, découvrit beaucoup de choses de ses voyages, dont il
rendait de fort bonnes raisons. Il s'appelait le chevalier Tartare, et nous ne
l'avons connu que sous ce nom. La première chose que nous apprîmes, c'est
qu'envoyé loin de son pays, c'est-à-dire de la Tartarie, dans la crainte d'une
irruption et vers l'âge de douze ans, avec un gouverneur qui se fit chrétien à
Ispahan, il lui persuada d'en faire autant ; et ainsi il fut baptisé avec son
gouverneur, fort jeune encore et fort peu instruit du christianisme, que ce
gouverneur, quoique zélé et habile, ne lui apprit que superficiellement. Nous ne
lui trouvâmes en effet qu'une teinture fort imparfaite de la religion ; en sorte
qu'il ne savait presque s'il en avait une.
Comme il avait très-bon esprit, nous prîmes soin de lui
avec affection, et nous lui vîmes venir une grande ardeur d'apprendre solidement
le christianisme. Je le reçus dans ma maison, et tout le monde prenait plaisir
de l'entretenir, et de lui entendre raconter ses aventures avec une vivacité
admirable, et un air de vérité qui ne le quittait pas. Il entendait un peu le
latin ; et par le rapport des langues qu'il avait apprises dans ses voyages, il
se fortifia dans ce qu'il savait de celle-ci : ainsi il entendit presque le
Nouveau Testament latin que je lui mis à la main ; et s'aidant dans cette
lecture de la pénétration naturelle de son esprit, il prit
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toute la substance de ce divin livre. Nous achevions le
reste par nos instructions, et tout le monde admirait l'application avec
laquelle il s'y attachait. Nous remarquâmes qu'il prenait un goût particulier
aux prophéties qu'il trouvait dans le Nouveau et dans l'Ancien Testament : il
les lui fallait expliquer souvent dans les livres mêmes, et il en était fort
touché. Quand nous le crûmes persuadé, et qu'il eut reçu les instructions
nécessaires, il approcha des saints sacrements avec une piété exemplaire. Il a
été plusieurs années dans ma maison, et il m'appela toujours son Père. Nous le
mîmes depuis dans les Missions-Etrangères, à cause qu'il ne respirait que
l'Orient et la Tartarie, et qu'il connaissait la Chine, où ces messieurs ont
leurs habitudes. Pour l'occuper on lui fit apprendre les mathématiques, où il
réussissait ; et il passa dans ces exercices environ quatre années en France, et
j'en pris toujours grand soin.
Nous ne savions, Monsieur, que juger de sa qualité : il
avait un air noble, simple et sans aucune affectation ; il ressentait un homme
de grande naissance. Au milieu de sa modestie, qui n'avait rien que de naturel,
il sortait des traits de grandeur : il partait des pierreries avec lesquelles sa
mère l'avait fait sortir de son pays, et on en avait vu quelque reste. Il
soupirait profondément, comme un homme qui déplorait, sans dire mot, l'état d'où
il était déchu. Tous les gens d'esprit étaient ravis de l'entendre : ce qui fut
cause que nous osâmes le recommander à Monseigneur le duc du Maine, et M. de
Malezieux lui procura une pension de ce prince. On lui offrit divers emplois
assez avantageux; mais il semblait toujours aspirer plus haut. Nous lui rendîmes
cet honneur de ne le mettre jamais à des ministères serviles. On ne pouvait
s'empêcher de le distinguer des autres étrangers de sa façon. M. le Pelletier le
ministre l'honorait de ses bonnes grâces, et le gratifiait dans l'occasion de
ses libéralités. Ainsi sa condition eût pu devenir supportable en France, mais
il ne songeait qu'à la Tartarie : ce qui lui fit prendre le dessein d'aller en
Italie et à Rome, comme à l'abord de tout l'univers, et où il espérait trouver
quelque facilité pour regagner son pays.
Mon neveu, qui était alors à Rome, le reçut avec joie, et
lui
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donna tous les secours qui dépendirent de lui, sans le
connaître encore que sous le nom du chevalier Tartare, ou de la Grotte, qu'il
avait en France. Comme mon neveu était persuadé que le dessein qu'il avait de
retourner en son pays ne pouvait être que périlleux pour sa vie, et le mettrait
dans une trop violente tentation de renoncer à la religion chrétienne, dans un
pays idolâtre où le nom de Jésus-Christ n'est pas connu, il fit ses efforts pour
le faire rester à Rome et dans un pays catholique, il lui promit les mêmes
secours qu'il avait en France. Le chevalier Tartare suivit son conseil : trois
années se passèrent ainsi, pendant lesquelles on le fit connaître à beaucoup
d'honnêtes gens ; et Madame la princesse des Ursins lui accorda sa protection.
Vers l'année 1699, plusieurs évêques et archevêques
orientaux, plusieurs riches marchands, que l'année sainte attirait à Rome, et
qui l'avaient vu à Ispahan paraître à cette Cour avec beaucoup de magnificence,
se ressouvinrent de sa personne et de son baptême, le reconnurent pour le fils
aîné du roi de la Grande Tartarie, et le nommèrent le prince des Kaïmaquites. Il
fut dressé des attestations authentiques de cette reconnaissance par-devant le
cardinal Cibo, protecteur des Orientaux, qui est nommé dans la relation. On m'en
envoya à Versailles des exemplaires, sur la foi desquels j'obtins le passeport
du Roi, qui le qualifia fils du roi de la Grande Tartarie. Il fut expédié par M.
le marquis de Torcy, dans les termes les plus avantageux; et ce ministre y
joignit la description de sa personne, si exacte et si bien circonstanciée,
qu'on ne pouvait le méconnaître. Madame la princesse des Ursins ne lui refusa
aucun office à la Cour de France, non plus qu'à la Cour de Rome. Il me pria
d'obtenir de Monseigneur le duc du Maine une dernière année de la pension, que
la générosité de ce prince lui avait toujours continuée à Rome : il partit en
cet état, avec mes exhortations à persévérer dans la religion. C'est là que je
l'ai perdu de vue : car encore qu'il m'ait écrit de divers endroits, comme de
Vienne et d'Ispahan, je n'apprenais que très-peu de choses de ses aventures,
content d'y voir son zèle toujours ardent pour établir le christianisme dans ses
pays. Depuis qu'il est à Ligourne, il m'a écrit ses malheurs. Je souhaite qu'il
soit assez
292
heureux pour mériter la protection de Sa Majesté : et si
vous me permettez, Monsieur, de vous dire mon sentiment, je suis persuadé que
cette longue suite de malheurs lui aura fait perdre l'espérance de pouvoir
réussir dans ses projets à l'égard de son rétablissement dans son pays; et que
si Sa Majesté toujours généreuse et bienfaisante principalement pour les
malheureux, jugeait à propos de l'arrêter dans un pays catholique en lui faisant
part de ses libéralités, je ne doute point qu'il ne se trouvât très-heureux de
devoir tout au plus puissant et au plus religieux Roi de l'univers. Je suis avec
un respect sincère, etc.
LETTRE XCIII.
BOSSUET A MILORD PERTH. A Versailles, ce 16 août 1703.
Je prends la liberté de vous envoyer la seconde partie de
l'ouvrage dont j'ai eu l'honneur de vous présenter le commencement : je vous
supplie de faire agréer ce présent à Leurs Majestés. C'est un faible hommage
dont le dévouement de mon cœur relève le prix. Le reste des copies seront pour
vous, Mylord, et pour Madame la duchesse, que je salue avec respect, et suis
avec le même sentiment, etc.
LETTRE XCIV.
BOSSUET A DOM MABILLON, BÉNÉDICTIN. A Versailles, 22 août 1703.
C'est à moi à vous remercier, mon révérend Père, du présent
précieux de vos Annales, où je trouve dans l'histoire de votre saint
ordre ce qu'il y a de plus beau dans celle de l'Eglise ; et, ce qui me fait un
grand plaisir, ce que celle de mon diocèse a de plus remarquable. Il fallait un
aussi profond savoir et une main aussi adroite que la vôtre, pour faire un si
beau tissu. Je prie Dieu qu'il nous fasse la grâce de vous le faire achever.
J'ai bien
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de l'obligation à vos vœux et à ceux de dom Thierri, et
suis de tout mon cœur, etc.
LETTRE XCV.
A L'ABBÉ BOSSUET, SON NEVEU ET SON GRAND-VICAIRE. A Versailles, ce 4 septembre
1703.
La peine que je ressens de ne pas voir cette année mes
chers confrères Messieurs les doyens, pour apprendre d'eux selon la coutume
l'état du diocèse, et de ne pouvoir non plus tenir le saint synode, ne peut être
réparée, mon cher neveu, que par le soin que vous prendrez de me donner de leurs
nouvelles, et de leur apprendre des miennes. De ma part, vous leur pouvez dire
que Dieu me comble de grâces même selon le corps, non-seulement en m'exemptant
de toutes douleurs, mais encore en semblant vouloir tous les jours réparer mes
forces par la bénédiction qu'il donne aux remèdes. De leur part, ma consolation
sera d'apprendre qu'ils marchent dans la voie de la vérité, et qu'ils
accomplissent leur ministère. J'ai bien besoin du secours de leurs prières pour
me faire accomplir la volonté de Dieu, à laquelle je suis livré à la vie et à la
mort, jetant en lui toute ma sollicitude, parce que je sais qu'il a soin de
nous. Ainsi dicté de mot à mot.
Et plus bas, de la main de
Bossuet :
La paix de
Jésus-Christ soit avec vous tous, mes Frères,
+ J. BÉNIGNE,
Ev. de Meaux.
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