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CHAPITRE II : IMPORTANCE DE L'ÉTUDE DE
LA LITURGIE
6 On
sent aisément que de tout cet ensemble de confession, de prière
et de louange, qui constitue la Liturgie, doit résulter la
matière d'une science véritable ; science des Offices divins, c'est-à-dire de
cette partie de la Liturgie qui consiste dans le sacrifice des lèvres
(1); science du sacrifice réel avec tous ses rites et ses mystères ; science
des sacrements, organes de la sanctification de l'homme; science des bénédictions
et des sacramentaux au moyen desquels toute créature est purifiée et
réhabilitée par la vertu de la croix ; science enfin des supplications
et autres rites solennels que l'Église emploie dans des occasions
extraordinaires. Mais
si déjà cette simple énumération des forces et des moyens de la Religion nous
place en regard d'un si vaste et si radieux ensemble, que sera-ce quand,
poursuivant, à travers la tradition, dans les écrits des Pères, dans les
ordonnances des conciles, dans les monuments de l'antiquité ecclésiastique, ces
diverses formes du culte divin, nous sommes conduits à interroger tous les
siècles et à enregistrer leurs réponses si belles d'unité et si fécondes en
tout genre d'inspiration ? Telle est cependant la science liturgique telle
qu'elle a été conçue, explorée, enseignée par tant de grands docteurs, dont les
noms glorieux et les services immenses seront racontés plus loin. Tous,
sans doute, ne sont pas appelés à suivre dans la science liturgique une
carrière d'égale étendue, mais on (1) Hebr., XIII, 15. 7 peut affirmer, sans
crainte d'être démenti, que, pour ne parler que des personnes ecclésiastiques,
elle doit faire pour elles l'objet d'une étude non moins spéciale que la
casuistique à laquelle, dans l'état présent, l'usage est en France de consacrer
à peu près la moitié du temps assigné à l'éducation cléricale. La récitation et
souvent même la célébration des divins Offices ne forment-elles pas
l'occupation journalière du Prêtre ? Quel plus grand intérêt pour lui que de
pouvoir suivre la chaîne de merveilles qui se déroule dans la succession des
fêtes et des temps de l'année chrétienne, de pouvoir briser les sceaux de ce
livre journalier que l'Église d'aujourd'hui a reçu de l'Église des premiers
siècles avec une tradition de mystères cachés et de chants admirables ? Le
Prêtre monte chaque jour à l'autel pour y sacrifier l'Agneau immolé depuis le
commencement du monde (1); où comprendra-t-il mieux la sainteté, la grandeur de
cette action, comme on l'appelait autrefois, où apprendra-t-il mieux la
pureté de cœur qu'elle exige, qu'en étudiant la manière dont elle s'est exercée
depuis la veille du jour où le Christ souffrit, jusqu'à ces temps plus
rapprochés de nous où l'Église, mue par l’Esprit-Saint, a
fixé d'une manière irrévocable les rites, de la religion desquels elle a voulu
environner le plus auguste des mystères ? Et les sacrements, sources divines du
salut, et les sacramentaux par lesquels l'Église épanche sur le peuple fidèle
la plénitude de sanctification qui est en elle ; si tant de doctes écrits ont
été composés par les plus pieux et les plus savants hommes de l'Église, à
l'effet d'en expliquer les rites, d'en éclaircir les formules, d'en développer
toute la majesté, comment le Prêtre, ministre de toute cette dispensation
à la fois miséricordieuse et sublime, ne se livrerait-il pas à la recherche de
cette perle d'un prix infini ? S'il lui a été dit d'imiter ce qu'il a entre (1) Apoc, XIII, 8. 8 les mains, imitamini quod
tractatis (1), ne lui a-t-il pas été dit par là
même de l'étudier et de le connaître ? Oh
! qui pourrait dire les grâces de salut qui se
répandraient sur le peuple chrétien, comme effet direct d'un enseignement basé
sur l'explication et la compréhension des mystères, des paroles et des rites de
la Liturgie, si nos peuples savaient et goûtaient ce que savaient et goûtaient
les simples catéchumènes des Églises de Milan, d'Hippone ou de Jérusalem,
initiés par un Ambroise, un Augustin, un Cyrille ! Et plus tard nos nouvelles
Églises d'Occident, quelles lumières ne tiraient-elles pas de l'enseignement
liturgique d'un Rhaban Maur, d'un Ives de Chartres,
d'un Honorius d'Autun, d'un Hildebert du Mans et de
Tours, d'un Durand de Mende, etc. ! Quelle influence sur les moeurs catholiques
! quel boulevard de la foi ! quelle
disposition à sentir les choses de la vie surnaturelle dans ces populations
instruites avec soin et détail des secrets que le Christ et son Église ont
cachés sous le vaste et profond emblème de la Liturgie ! On le sent tous les
jours dans ces contrées de l'Amérique du Nord, dans lesquelles la vraie Église
ne possède pour ainsi dire pour fidèles que ces âmes que, sous la conduite du
divin Esprit, elle va glanant et recueillant dans les sueurs et les fatigues.
Les lettres des missionnaires ne cessent de parler du grand succès qu'ils
obtiennent en développant à leurs auditeurs le merveilleux symbolisme de la
Liturgie catholique. Assez heureux pour la posséder en entier et pure de tout
alliage national, telle en un mot que le Siège Apostolique la promulgue, ces
nouveaux apôtres n'ont aucune peine à faire sentir l'harmonie et l'autorité
dans cet ensemble véritablement surhumain. S'il arrive qu'une nouvelle église
vienne à être dédiée par l'évêque, la simple explication des symboles qui, dans
cette auguste cérémonie, font tour (1) Pontificale
Rom., in ordinatione Presbyteri. 9 à tour passer sous les
yeux des fidèles les mystères de la Jérusalem céleste, ceux de l'Église
militante et ceux de la vie spirituelle, prépare une moisson abondante, et lorsqu'après avoir accompli tous les rites si profonds de
cette solennité, le Pontife demande au Dieu qui se bâtit un temple immortel
avec des pierres vivantes, que cette extension matérielle que vient d'obtenir
son Église, soit encore dépassée par ses accroissements spirituels (1), il ne
tarde pas à connaître qu'il a été exaucé. Et,
en effet, quel autre moyen de faire pénétrer la connaissance du dogme dans les
esprits, que celui-là même que l'auteur et le réparateur de notre nature a
choisi pour y faire descendre cette grâce invisible qui nous sanctifie ? Mes
paroles sont esprit et vie (2), dit le Sauveur : elles donnent à la fois la
lumière à l'intelligence, et au cœur la charité qui est la vie. Il en est de même
des paroles de l'Église qui possède la plénitude des mystères et la dispense
sur le peuple chrétien par des rites et des formules remplis à la fois de
vérité et d'amour. Aussi
a-t-on toujours considéré la Liturgie comme le haut enseignement du dogme, en
même temps qu'elle est sa forme la plus populaire. Nous verrons bientôt que
tous les saints docteurs étaient Liturgistes ; que les écrivains
ecclésiastiques qui les ont suivis cultivèrent avec ardeur la science des rites
sacrés ; que les théologiens scolastiques du moyen âge voulurent aussi faire
leur somme des mystères; qu'à l'époque de la Réforme, l'activité des
docteurs catholiques se porta vers cette étude et donna, la première, naissance
aux Collections liturgiques; qu'enfin, chose surprenante pour plusieurs,
de savants protestants, au (1) Deus, qui de vivis et electis lapidibus
æternum majestati tuae praeparas
habitaculum, auxiliare populo tuo supplicanti, ut quod Ecclesiæ tuae corporalibus proficit spatiis, spiritualibus
amplificetur augmentis. (Missal. Rom., in Dedicatione Ecclesiæ. Postcommunio.) (2) Joan., VI,
64. 10 risque d'exposer l'héritage de la Réforme aux invasions
de l'antiquité ecclésiastique, ont cru aussi, ont cru, comme tous les anciens
Pères et docteurs catholiques, qu'il n'y avait point d'étude complète du dogme
chrétien, si la matière des rites et des formules sacrées n'était soigneusement
explorée, s'ils n'interrogeaient siècle par siècle ces livres papistes
qu'ailleurs ils voudraient donner comme un instrument de corruption pour la
doctrine évangélique. On les a vus, on les voit publier des collections, des
bibliothèques liturgiques, et faire honte à plus d'un catholique par le zèle et
l'importance qu'ils mettent à de semblables travaux. Voici les propres paroles du célèbre Pfaff de
Tubingen, dans une dissertation de Liturgiis, missalibus, agendis et libris ecclesiasticis Ecclesiae orientalis et occidentalis,
placée à la suite de ses Institutions, d'histoire ecclésiastique : «
Comme les livres ecclésiastiques, les Liturgies, et ceux que l'on nomme
Agenda, sont revêtus d'une autorité publique et de l'approbation de l'Eglise
entière qui en fait usage ; comme ces
Liturgies très-anciennes, qui ont régné et règnent
encore dans l'Église orientale et
occidentale, ont emprunté beaucoup
de choses des temps apostoliques ; comme enfin le culte public lui-même ne peut dériver
d'une autre source que de ces mêmes Liturgies, il est aisé de voir que leur
étude ne saurait manquer de jeter un grand jour sur toute l'histoire
ecclésiastique,
principalement sur la partie
dogmatique et rituelle, et qu'elle est propre non-seulement
à repaître la curiosité des érudits,
mais à remplir leur esprit
d'excellentes observations (1). » (1) Cum libri ecclesiastici, Liturgiae, atque agenda quas vocant, ecclesiastica publica auctoritate, atque approbatione totius, ubi quidem eorum est usus, ecclesise gaudeant, cum etiam antiquissimae illae, quas in ecclesia orientali, atque occidentali olim viguere, atque etiam nunc vigent, liturgias ex apostolicis temporibus multa trahant ; cum denique non nisi ex liturgiis cuitus publici ratio derivari, atque erui possit, facile est perspicere magnam easdem lucem omni historiae ecclesiasticae, maxime vero dogmaticae, et rituali afferre, nec saltem curiositatem eruditorum pascere, sed et praeclaris egregiisque observationibus animum imbuere. (Disquisit. de liturg., missalibus, etc. Tubingse, 1721.) 11 Plus loin, il recommande
la lecture des livres du cardinal Bona, sur les
matières liturgiques, comme présentant le plus haut intérêt scientifique, et
finit en disant que la théologie polémique elle-même ne saurait se passer de ce
genre d'études accessoires (1). Qu'il
nous soit donc permis d'indiquer ici cette lacune fâcheuse que laisse, dans
l'enseignement ecclésiastique de notre pays, l'absence des études liturgiques
spéciales, et d'émettre le vœu devoir nos séminaires imiter le Séminaire romain
et la plupart des principaux séminaires d'Italie, dans lesquels la jeunesse
cléricale se livre, sous la direction d'un professeur, à l'étude d'Institutions
liturgiques plus ou moins complètes. L'intelligence du dogme catholique y
gagnera; la science du droit canonique, qui a tant de points de contact avec la
Liturgie, en tirera de grands avantages ; l'histoire ecclésiastique enfin sera
mieux comprise et plus attrayante, du moment que la tradition des rites sacrés
qui y occupe une si grande place, sera mieux connue et mieux appréciée. Ces
études d'antiquité et d'archéologie, qu'on semble vouloir introduire en plusieurs
lieux avec un zèle si louable, préparées par la science au moins générale de
l'histoire ecclésiastique, obtiendraient des résultats véri- (1) Porro quaenam veteris ecclesias de sacramentis singulis doctrina
exstiterit ex his maxime tanquam ex earum fontibus discere nos oportet, nec
inane hoc est, quod jam diximus, veteres liturgias
egregiis quoque observationibus asceticis, atque haud temnenda pietate animum
imbuere; quod qui inficiari audet, legat, quaesumus, liturgias grascas, legat eam quas
in Constitutionibus Apostolicis exstat, legat Chrysostomianam,
legat et Joannis Bonas libros quibus res liturgicas veteresis
explicavit, egregiisque animadversionibus adspersit.
Denique ad theologiam polemicam solidius tractandam
hoc studium vel maxime pertinet. Ita qui de cultu, et invocatione
sanctorum accurati quid dare tentaverit, sine veterum, recentiorumque
liturgiarum inspectione nihil egregii efficiet. Idem de cultu imaginum et
reliquiarum Beatae Virginis Deiparas
dictum esto. (Ibidem, In Epimetro, pag. 72.) 12 tables, du moment qu'elles seraient éclairées par la
connaissance un peu minutieuse peut-être, mais indispensable, des formules et
des symboles du culte divin, depuis l'origine du christianisme jusqu'au temps
présent. Enfin l'esprit de foi, si précieux dans la dispensation des dons
célestes, dans la garde du sanctuaire, dans la célébration des pompes sacrées,
prendrait de nouveaux accroissements et produirait des fruits d'autant plus
durables, que l'étude et la science de la Liturgie est, de toutes, celle qui,
présentant pour objet direct et immédiat les choses de Dieu, permet le moins à
l'homme de perdre de vue les choses surnaturelles, dont l'attrait seul peut
faire entreprendre ce genre de labeur : mais nous aurons ailleurs occasion de
développer ces considérations. L'étude
de la Liturgie n'est pas seulement nécessaire aux clercs ; sans elle, il est
impossible aux savants qui s'occupent d'explorer et de raconter les mœurs des
diverses sociétés européennes, depuis la prédication de l'Évangile, il leur est
impossible de faire un pas sans tomber dans des méprises de plus d'un genre, de
ne pas perdre une multitude d'observations précieuses qui jetteraient une
grande vérité et un plus grand intérêt sur leurs récits, ou sur leurs tableaux.
Malheureusement, cet inconvénient est peu senti, et si la fureur du moyen âge
qui possède tous les esprits n'est pas parvenue encore à faire apprendre, d'une
étude même désintéressée, le catéchisme des peuples dont on raconte les
croyances, il faut convenir aussi qu'il n'était guère à espérer que l'on eût la
patience de pénétrer le mystère de leurs rites et de leurs formules sacrées.
C'est un zèle qu'on peut avoir, quoiqu'avec des
résultats beaucoup moins faciles et beaucoup moins certains, quand il s'agit
des mystères et des croyances de l'Inde, de la Perse, ou de l'Egypte. Pour
l'Occident, il est vrai, on cite fastueusement l'ouvrage de D. Martène, De Antiquis Ecclesiœ ritibus ; mais les
applications qu'on fait des richesses que 13 renferme ce trésor sont loin de répondre à la bonne volonté
qu'on déploie. Toute science, en général, est rebelle à qui ne l'a pas étudiée,
et celle des rites catholiques demande par-dessus tout
une application profonde et non partagée, puisque tout y est à la fois ou
mystique, ou positif. Entrevoir une certaine couleur générale de haute et
gracieuse poésie, construire sur ces éléments un récit plus ou moins agréable,
c'est chose facile, puisque c'est chose superficielle ; mais la science n'est
pas là. Les populations dont vous dépeignez les mœurs n'auraient peut-être pas
comme vous analysé toute cette poésie ; mais elles savaient pourquoi elles
agissaient, quelles croyances elles exprimaient dans tel ou tel symbole ; et
vous, vous ne le savez pas, faute de connaître l'économie si vaste et si populaire
du catholicisme. Si
l'étude de la Liturgie est nécessaire à l'historien de mœurs et à l'antiquaire,
elle ne l'est pas moins à l'artiste. Mais qui sait aujourd'hui que tous les
arts, architecture, peinture, sculpture, musique, sont tributaires de la
Liturgie, et par elle du catholicisme ? Quel artiste le sait, hors Cornélius et
Overbeck en Allemagne, et quelques jeunes talents méconnus en France ?
Cependant la Liturgie seule a le secret de la construction des temples ; elle
seule sait combien de mystères devront exprimer les portes, les fenêtres, les
colonnes, les chapelles, les tours ou flèches, les distributions de l'édifice.
Elle seule sait et peut dire au peintre sous quels emblèmes fixés par les
décrets ecclésiastiques les mystères doivent être représentés, avec quels
attributs les saints et les saintes seront reconnus tout aussitôt et invoqués
par la foi des fidèles. Elle seule peut lui faire éviter ces hideux
anachronismes de costume sacerdotal, que l'on voit pompeusement étalés sur les
grandes toiles qui encombrent les églises de la capitale, ou les salles de
l'exposition annuelle ; anachronismes quelquefois d'autant plus risibles,
qu'ils sont les résultats d'une étude 14 mal digérée. Elle seule peut lui apprendre la
tradition si riche et si importante des couleurs, l'expression que donne le
contact des mystères divins (1). Elle seule peut révéler au sculpteur ces
détails de pose, ces agencements de draperies, le secret de ces groupes
mystérieux qui se forment dans la célébration des rites sacrés, ces convenances
de lieu et d'objet dont l'appréciation préviendrait ces malentendus dont on ne
s'aperçoit quelquefois que lorsqu'un objet de sculpture, après avoir coûté
beaucoup de dépense et de travail, est trouvé incapable de remplir la fin à laquelle
on l'avait destiné. Elle seule peut
révéler au musicien ces ineffables mélodies grégoriennes qui sont à la fois
l'unique reste de cette musique antique, dont on raconte tant de merveilles, et
le produit de la plus noble et de la plus sublime inspiration catholique ;
motifs admirables dont on ne s'est écarté que pour tomber dans le barbare, en
croyant pouvoir substituer des mélodies tout aussi aisément qu'on substituait
des formules nouvelles aux formules de l'antiquité, ou pour se jeter dans un
genre tout profane qui forme le contraste le plus révoltant avec la sainteté du
lieu, la majesté des paroles et la religion des mystères ; si ce n'est que
d'autres fois on aime mieux composer patiemment et exécuter de même des
morceaux insignifiants et dépourvus d'un sens quelconque, à la condition que
l'accord sera parfait et que la mesure ne manquera pas. Une
étude attentive de la Liturgie eût prévenu et préviendrait tous les jours, dans tous les genres, bien des (1) On peut lire sur ce sujet les excellentes remarques
de M. le comte de Montalembert sur la perte absolue de l'art catholique en
France, dans son admirable introduction aux Monuments de sainte Elisabeth.
Seulement, nous le prierons d'ajouter à l'énumération des tableaux étranges
qu'il signale dans les églises de Paris, certaine toile à la Sorbonne sur
laquelle est représenté, près de Robert Sorbon, un moine habillé de vert, la
seule de toutes les couleurs que jamais aucun ordre religieux n'ait adoptée.
Les traditions sont déjà si loin de nous que nous ne nous flattons pas que tous
les lecteurs comprennent toute l'étendue de cette
bévue. 15 erreurs ; et quelle que soit l'exiguïté de notre talent et
de nos connaissances en cette matière, nous n'estimerons pas avoir perdu notre
temps en composant cet ouvrage, si nous parvenons à troubler quelque peu une
indifférence trop longtemps prolongée, à réveiller quelques hommes et à leur
faire apercevoir une science riche et féconde là où jusqu'ici ils n'avaient pas
soupçonné matière à une application sérieuse. Il nous reste à poser,
à discuter, à établir beaucoup de principes, quelques-uns peut-être assez
sévères ; nous procéderons dans ce travail avec franchisent, s'il plaît à Dieu,
sans perdre de vue un instant les principes de l'Église sur une matière
aussi, importante. Mais, comme
nous avons déjà été à même d'éprouver que, faute d'éclaircissements sur
les questions de fait, la vérité sur les matières liturgiques pouvait être
quelquefois objet de contestation, nous avons cru devoir placer en tête de la
discussion une histoire générale de la Liturgie ; nous n'aurons plus alors qu'à
procéder par voie de corollaires ou d'applications. Nous nous
flattons qu'on rendra justice aux efforts que nous avons faits pour nous mettre
en état de traiter d'une manière neuve des sujets qui, pour être aujourd'hui
assez généralement ignorés, n'en ont pas moins, dans tous les siècles
précédents, comme on le verra, occupé une grande place dans la science
ecclésiastique. Il est bien entendu que, dans ce coup d'oeil historique qui va
suivre, nous nous arrêterons seulement aux faits généraux, et à ceux des faits
particuliers qui sont nécessaires pour mettre le lecteur à portée de saisir un
ensemble. Les questions de détail seront traitées à leur place dans les volumes suivants, d'après
l'ordre que les matières présenteront successivement d'elles-mêmes. |