VEILLE DE LA RETRAITE

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MEDITATION POUR LA VEILLE DE LA RETRAITE.

 

Ducam eam in solitudinem, et loquar ad cor ejus.

Je la conduirai dans  la solitude,  et là je lui parlerai au coeur. (Osée, chap. II, 14.)

 

PREMIER POINT. — C'est Dieu qui m'appelle à cette retraite, c'est lui qui m'en a inspiré le dessein ; et la résolution que j'ai prise de m'éloigner pour quelque temps de tout commerce, et de me tenir dans la solitude, n'a pu être qu'un effet de sa grâce. Je dois donc suivre le mouvement de cette grâce, et en faire tout l'usage que Dieu veut que j'en fasse pour ma conversion.

C'est une grâce de prédilection par rapport à moi : car Dieu ne la fait pas à tout le monde. Combien de mondains et de mondaines vivent dans le désordre du péché, et dans un profond oubli de Dieu, sans penser jamais à rentrer sérieusement en eux-mêmes? ce qui serait néanmoins le souverain remède de leurs maux, et peut-être l'unique ressource de leur salut. Dieu use envers moi d'une miséricorde toute spéciale. Avec quelle attention et quel soin dois-je ménager une grâce si précieuse ?

C'est peut-être la dernière retraite de ma vie, que je vais commencer. Si je le savais, quel zèle, quelle ferveur y apporterais-je ? Combien

 

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en ai-je fait d'inutiles, et qui n'ont produit en moi aucun changement? Mais il faut que celle-ci répare les défauts de toutes les autres, et qu'elle achève dans mon âme l'œuvre de Dieu. Enfin, c'est Dieu lui-même qui m'y conduit, et qui veut m'y servir de guide. Jésus-Christ, qui était le Saint des saints, fut conduit par l'Esprit de Dieu dans le désert : voilà le modèle que je dois me proposer dans ma retraite, si je veux que ce soit pour moi une retraite salutaire, une retraite dont le succès réponde au besoin que j'en ai, et à ce que Dieu attend de moi. La faire par coutume, la faire parce que c'est dans mon état un devoir commun dont je ne puis me dispenser, c'est ce qui m'est arrivé plus d'une fois, et de là vient que j'en ai si pou profité. Il faut que j'y entre par le même esprit et dans le même esprit que Jésus-Christ y entra.

SECOND POINT. — Dieu, qui veut me sanctifier, m'appelle à la solitude intérieure encore plus qu'à la solitude extérieure. Car l'extérieure sans l'intérieure n'est de nul effet. Ainsi je dois, pendant ces saints jours, me séparer absolument, d'esprit et de cœur, de tout ce qui pourrait me distraire et me détourner de Dieu. Je dois me comporter comme s’il n'y avait dans le monde que Dieu et moi; en sorte que je m'occupe uniquement de lui, et que je puisse m'écrier avec l'Epouse des Cantiques : Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui (1). Loin de moi toute autre pensée, quelque bonne qu'elle fût d'ailleurs, et quelque apparence de bien que je crusse y apercevoir. Ce bien, qui me partagerait, cesserait pour moi d'être bien.

Dieu veut être seul avec moi, parce qu'il veut me parler au cœur; et par conséquent il faut que mon cœur soit vide du monde ; non pas seulement de ce grand monde qui est hors de moi, et avec lequel je n'ai presque nul rapport, car à peine le connais-je depuis que je l'ai quitté, et à peine me connaît-il; mais de ce petit monde qui m'environne, et qui se trouve même dans la religion; de ce petit momie qui est en moi, et qui fait partie de Moi-même ; de ce petit monde, qui sont mes passions, mes inquiétudes, mes curiosités, mes attaches. Tant que mon cœur sera plein de ce petit monde, ni Dieu ne me parlera peint, ni je ne serai point dans la disposition de l'écouter.

Malheur à moi si je portais ce petit monde

 

1 Cantic., II, 16.

 

jusque dans le sanctuaire de la solitude; c'est-à-dire, si j'entrais dans la retraite avec un esprit dissipé ou un cœur immortifié! Or il ne faut pour cela qu'un vain désir, qu'un chagrin, qu'une aversion, qu'une jalousie secrète, qu'une amitié trop humaine. Malheur à moi, si par là je me rendais incapable des communications et des entretiens que je dois avoir avec mon divin Epoux ! car dès là, quelque édifiante que me parût ma retraite, je n'y trouverais pas Dieu, parce que Dieu ne m'y trouverait pas dans ce parfait recueillement où doit être une âme qui veut converser avec lui. Puisqu'il se dispose à me parler, et à me parler au cœur, je dois de ma part me mettre en état de lui pouvoir dire, ou comme David : J'écouterai, mais avec réflexion et avec respect, ce que le Seigneur me dira (1), ce qu'il m'inspirera, ce qu'il me reprochera; ou, comme Samuel, Parlez, Seigneur, parce que mon âme est attentive à vous écouter (2). Je dois, à l'exemple de Marie, sa sainte mère, recueillir et conserver dans mon cœur toutes les paroles par où il me fera entendre intérieurement ses volontés.

TROISIEME POINT. — La fin de ma retraite ne doit pas être de goûter le repos de la solitude. Ce repos est saint; mais ce n'est pas assez, et il y a un avantage plus solide qu'il y faut chercher. Il m'est permis de dire, dans le même sentiment que le Prophète royal : Qui me donnera des ailes comme celles de la colombe, a [in que je prenne mon vol et que je me repose dans le seul de Dieu (3)? Mais il ne m'est pas permis de borner là mes vues et mes désirs. Je dois envisager dans ce repos quelque chose de meilleur et de plus nécessaire que ce repos même. La fin de ma retraite ne doit pas non plus être d'y employer plus de temps à l'oraison, d'y faire plus de communions, plus de lectures, plus d'austérités. Tout cela, ce sont d'excellents moyens, dont je puis et dont je dois me servir; mais ce n'est pas la fin que je me dois proposer. Mon erreur a souvent été de confondre en ceci les moyens avec la fin, et de m'imaginer que j'avais fait une bonne retraite, parce que je m'étais régulièrement acquitté de ces exercices.

Mais la fin de ma retraite doit être de réformer ma vie, de me bien connaître moi-même, et les desseins de Dieu sur moi; de découvrir une bonne fois le fond de mes dispositions, de mes imperfections, de mes mauvaises habitudes ; de régler toute ma conduite, toutes mes

 

1 Psal., LXXXIV, 9. — 2 1 Reg., III, 9. — 3 Psal., LIV, 7.

 

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actions, tous mes devoirs ; de me renouveler dans l'esprit de ma vocation ; en un mot, de me changer, et de devenir, comme dit saint Paul, une nouvelle créature en Jésus-Christ (1). Car si la retraite que j'entreprends n'aboutit là, et si j'en sors sans avoir rien corrigé de mes défauts ordinaires, en vain y aurais-je eu tous les sentiments de la dévotion la plus affectueuse, ce ne serait qu'une illusion pure. Il s'agit de me convertir, et non de raisonner ni de contempler. Cependant cette fin, conçue de la sorte, est encore trop générale et trop vague. Il faut, afin qu'elle soit plus efficace, qu'elle soit déterminée à quelque chose de plus marqué; et c'est à moi d'examiner, devant Dieu, quelle doit être pour moi la fin particulière de cette retraite : par exemple, de me réformer dans l'observation de mes règles ; de me réformer en ce qui regarde la charité, l'humilité, la mortification ; ainsi du reste.

 

CONCLUSION. — Eclairez-moi, mon Dieu, dans le choix que je dois faire de cette fin, et donnez-moi tous les secours nécessaires pour y parvenir. Puisque c'est vous qui m'attirez dans la solitude, faites-moi connaître la perfection où vous m'appelez, et les voies que

 

1 2 Cor., V, 17.

 

j'ai à prendre pour y arriver. Ne permettez pas que cette retraite, qui a été pour tant de pécheurs un moyen de conversion, devienne pour moi, si je n'en retirais aucun fruit, un sujet de condamnation.

Que voulez-vous que je fasse, ô mon Dieu? car c'est à vous de me prescrire à quoi je dois spécialement travailler durant ces jours de retraite, qui sont des jours de salut ; et c'est à moi, quoi qu'il m'en coûte, de retrancher tous les obstacles qui pourraient m'empêcher d'accomplir vos ordres et de seconder vos adorables desseins, quand je les aurai connus. Il me semble, Seigneur, que mon cœur y est disposé, et qu'en commençant cette retraite, je pourrai avec une humble confiance me rendre devant vous le même témoignage que votre prophète : Mon cœur est prêt, mon Dieu, mon cœur est prêt (2). Mais peut-être que je me flatte, et qu'il y a encore dans mon cœur de secrets replis d'amour-propre et d'attachement à moi-même. Aidez-moi, Seigneur, à les développer. Achevez de préparer ce cœur qui veut vous être soumis, et qui ne se sépare aujourd'hui du commerce des créatures que pour mieux recevoir les impressions de votre grâce et de votre esprit.

 

1 Psal., LVI, 8.

 

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