ACTES XXVII

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HOMÉLIE XXVII. LORSQUE LE JOUR FUT VENU, L'AGITATION N'ÉTAIT PAS PETITE PARMI LES SOLDATS. QU'ÉTAIT DONC DEVENU PIERRE ? HÉRODE L'AVANT DEMANDÉ , ET NE LE TROUVANT PAS , FIT FAIRE UNE ENQUÊTE CONTRE LES GARDES, ET ORDONNA DE LE FAIRE MOURIR; ET S'ÉLOIGNANT DE LA JUDÉE, IL ALLA DEMEURER A CÉSARÉE. (CHAP. XII, VERS. 18 ET 19, JUSQU'AU VERS. 4 DU CHAP. XIII.)

 

ANALYSE.

 

1 et 2. Mort et châtiment d'Hérode, le persécuteur de saint Pierre.

2 et 3. Avantage du jeûne. — Rien n'est plus douteux qu'une femme qui n'est pas sobre. — Honteux effets de l'intempérance.

 

1. Bien des gens demandent comment Dieu autrefois put supporter qu'on immolât les enfants à cause de lui, et laisser mettre à mort les soldats à cause de Pierre, lorsque cependant il eût pu les sauver avec l'apôtre. Nais si l'ange eût emmené les soldats avec Pierre, on eût pris le fait pour une évasion ordinaire. Pourquoi n'a-t-il pas disposé les choses autrement, dit-on? En effet, quel malheur immérité ! Si nous considérions que ceux qui souffrent injustement n'éprouvent aucun dommage, nous ne demanderions pas cela. Pourquoi ne dites-vous pas aussi, à propos de Jacques, pourquoi ne le délivra-t-il pas? D'ailleurs, le temps de la Justice n'était.pas venu encore, pour que chacun reçût ce qu'il méritait. Mais Pierre ne les avait pas jetés entre les mains d'Hérode. Ce prince était surtout chagrin d'avoir été joué comme son aïeul l'avait été de se voir trompé par les Mages; c'était surtout un amer dépit d'être devenu un objet de risée. Il est bon d'entendre les paroles de l'écrivain. « Lorsque le jour fut venu », dit-il, «l'agitation fut grande parmi les soldats, pour savoir ce qu'était devenu Pierre. Hérode l'ayant réclamé, et ne le trouvant pas, fit une enquête contre les gardes et ordonna de les mettre à mort ». Il apprit d'eux (car il fit une enquête) qu'il avait laissé ses chaînes et qu'il avait pris ses sandale, et que jusqu'a cette nuit il avait été avec eux. Mais que cachèrent-ils? Pourquoi n'avaient ils pas pris-la, fuite eux-mêmes? Il dut être étonné, il dut être frappé de stupeur. Du reste leur mort fait éclater à la fois et le prodige divin et la malice d'Hérode. Mais voyez comment l'auteur ne cache rien , et comme il mentionne un fait historique afin de nous instruire. Il dit donc ensuite : « Descendant de la Judée , Hérode demeura à Césarée. Hérode était irrité contre les Tyriens et les Sidoniens. Ils vinrent ensemble vers lui, et ayant gagné Blastus, le chambellan du roi, ils lui demandèrent la paix parce que leur pays tirait sa subsistance des terres du roi. Au jour fixé, Hérode, revêtu de son manteau royal, et assis sur son tribunal , les harangua; le peuple criait : C'est la voix d'un dieu et non celle d'un homme. Mais l'ange du Seigneur le frappa tout à coup, parce qu'il ne rendait pas gloire (132) à Dieu, et il expira dévoré par les vers. Mais la parole de Dieu grandissait et se multipliait (20-24) ».

C'est là un grand événement. La vengeance divine le frappe tout à coup, bien qu'elle ne l'ait pas atteint à cause de Pierre, mais à cause de son orgueilleux discours. Mais si le peuple l'acclame , dira-t-on , quel est en cela son crime ? C'est d'avoir reçu ces acclamations comme s'en trouvant digne. Grande leçon pour ceux qui font de téméraires flatteries. Remarquez que les uns et les autres sont dignes de châtiment; mais lui seul est frappé. Le temps du jugement n'est pas venu encore, mais Dieu frappe le plus coupable, et épargne les autres, afin qu'ils profitent de l'exemple. « Et la parole de Dieu, disent les Actes, croissait et se multipliait », c'est-à-dire, après cet événement. Voyez-vous la providence de Dieu ? « Barnabé et Paul retournèrent à Jérusalem, après avoir accompli leur ministère; ils prirent avec eux Jean, surnommé Marc (25). Il y avait dans l'Eglise qui était à Antioche, des prophètes et des docteurs, Barnabé, Siméon, surnommé Niger, Lucius de Cyrène, Manahen, frère de lait d'Hérode le Tétrarque, et Paul ». (Chap. XIII, 1.) L'auteur nomme encore Barnabé le premier : Paul, en effet, n'était pas encore célèbre, et n'avait fait aucun prodige. «Pendant qu'ils servaient le Seigneur a et qu'ils jeûnaient, l'Esprit-Saint dit : Mettez-moi à part Barnabé et Paul, pour l'oeuvre à laquelle je les ai appelés. Alors après avoir jeûné et prié, ils leur imposèrent les mains et les congédièrent (2 et 3) ». Que veut dire : « Servaient le Seigneur? » Cela veut dire « Prêchaient. Mettez-moi à part Barnabé et Paul ». Que veut dire. « Mettez-moi à part ? » Pour l'oeuvre, pour l'apostolat. Remarquez par qui se fait l'ordination : par Lucius de Cyrène et Manahem , ou plutôt par l'Esprit-Saint. La grâce de Dieu se montre d'autant plus clairement que les personnes sont moins grandes. Enfin Paul est ordonné pour l'apostolat, afin qu'il prêche avec autorité. Comment donc Paul dit-il : « Non par les hommes, ni par le moyen des hommes? » Il dit : Non par les hommes , pour montrer qu'aucun homme ne l'avait ni appelé ni amené; il dit : « Par le moyen des hommes », pour signifier que nul ne l'a envoyé, si ce n'est l'Esprit-Saint. C'est pour cela, que l'auteur ajoute : « Ceux-ci, ayant donc été envoyés par l'Esprit-Saint, descendirent à Séleucie, et de là naviguèrent vers Chypre (4) »:

Mais revenons au commencement de notre texte : « Le jour étant venu, l'agitation fut grande parmi les soldats, à cause de Pierre; Hérode fit une enquête contre les soldats, et ordonna de les faire périr». Il fut tellement dépourvu de bon sens, qu'il osa punir injustement. Voici que je défends leur cause. Les chaînes étaient là, les gardes étaient à l'intérieur, la prison était fermée, nulle part la muraille n'était percée; tous disaient : Cet homme a dû être enlevé; pourquoi les condamnez-vous? S'ils eussent voulu le délivrer, ou bien ils l'auraient délivré plus tôt, ou bien ils seraient partis avec lui. — Mais ils ont reçu de l'argent? — Comment celui qui n'en avait même pas à donner à un pauvre, leur en aurait-il donné ? En effet les chaînes n'étaient ni brisées ni déliées. Il fallait comprendre que le fait venait de Dieu et non des hommes. En. suite l'auteur rapportant un fait historique, il donne les noms pour montrer la vérité de ce qu'il rapporte. « Et ayant gagné Blastus, chambellan du roi », disent les Actes, « ils demandaient la paix ». Ils agissent ainsi à cause de la famine. « Au jour fixé, Hérode s'assit sur son tribunal et fit un discours, «Aussitôt l'ange du Seigneur le frappa, et, dévoré par les vers, il expira».

2. Josèphe dit qu'Hérode fut atteint d'une longue maladie. Beaucoup ignoraient donc le fait raconté par saint Luc. Au reste, l'ignorance où ils étaient avait encore son utilité, car ils attribuaient le malheur d'Hérode à la mort de Jacques et au meurtre des soldats. Remarquez que lorsqu'il fit périr l'apôtre, il ne fit rien de semblable; mais lorsqu'il eut fait . périr les soldats, il devint taciturne , il est dans la perplexité, la honte le poursuit, il descend de la Judée et va à Césarée. Il me semble que, voulant aussi mettre à mort les apôtres, il vint à Césarée pour en faire son apologie. Il était furieux contre eux lorsqu'il courtisait les Césaréens, Voyez comme cet homme était avide de vaine gloire. Devant leur accorder une faveur, il le harangua. Josèphe dit qu'il portait une splendide robe d'argent. Remarquez aussi combien ce peuple est flatteur, et quel est le bon sens des apôtres. Celui que la foule entière acclamait, ils le méprisaient. Ils purent respirer de nouveau, et des biens sans nombre furent le résultat de la punition d'Hérode. Si cet homme, (133) pour avoir entendu cette parole : « La voix d'un dieu et non celle d'un homme », fut ainsi frappé quoiqu'il n'eût rien dit, combien plus eût dû souffrir le Christ, s'il n'avait été Dieu, le Christ, qui disait sans cesse : « Mes paroles ne sont pas les miennes » ; et « mes serviteurs combattraient », et tant de choses semblables. Hérode termina sa vie d'une façon honteuse et misérable, et il n'est rien resté de lui d'éclatant. Remarquez aussi comme il est persuadé par Blastus; avec quelle facilité ce malheureux homme est emporté par la colère et aussitôt s'apaise ; à quel point il est l'esclave du peuple et ne jouit d'aucune liberté. Considérez aussi l'autorité de l'Esprit-Saint. «Pendant qu'ils servaient le Seigneur et qu'ils jeûnaient », dit l'auteur, « le Saint-Esprit leur dit : Mettez-moi à part Barnabé et Paul ». Eût-il osé, s'il n'eût joui de la même puissance que le Père et le Fils, dire ces paroles ? Ceci a lieu pour que ces apôtres ne demeurent plus tous ensemble. L'Esprit-Saint voit qu'ils sont plus forts et qu'ils peuvent suffire à un plus grand nombre. Comment leur parla-t-il? Peut-être par les prophètes. C'est pour cela qu'il est dit auparavant qu'il y avait des prophètes; ils jeûnaient et servaient Dieu, pour nous apprendre qu'ils eurent besoin d'une grande sobriété. Il est ordonné à Antioche où il prêche. Pourquoi l'Esprit-Saint ne dit-il pas Mettez à part pour le Seigneur, mais « pour « moi ? » Pour, montrer l'unité de puissance et d'autorité.

Remarquez-vous l'importance du jeûne? Il montre que l'Esprit-Saint fait toutes choses. C'est un grand bien que le jeûne. Il n'est circonscrit par aucune limite. Lorsqu'il faut ordonner, ils jeûnent; et alors l'Esprit leur parle. Le jeûne n'est pas cela seulement, mais s'abstenir des délices est une sorte de jeûne aussi. 1e ne commande que celui-ci : Ne jeûnez pas, mais abstenez-vous des délices. Recherchons la nourriture, mais non la corruption; cherchons la nourriture, mais non pas ce qui est la source des maladies de l'âme et du corps; recherchons la nourriture qui procure quelque plaisir, non les délices, qui sont une source d'incommodité ; c'est cela qui est délice, ceci est une véritable peste ; cela est joie, ceci chagrin; l'un est dans la nature, et l’autre lui est opposé. Si quelqu'un vous donnait à boire de la ciguë, ne serait-ce pas contre nature? Si l'on vous servait du bois et des pierres, ne les repousseriez-vous pas? Et avec raison, car c'est contre nature. Ainsi sont les délices De même que dans une ville, pendant un siégé, il y a tumulte et agitation quand les ennemis s'y introduisent; ainsi en est-il pour l'âme quand le vin et la bonne chère s'en emparent. « Pour qui les malédictions? pour qui les ennuis et les vaines paroles ? pour qui « le jugement, si ce n'est pour ceux qui passent « leur temps à boire? Pour qui les yeux livides? » (Prov. XXIII, 29, 30.) Mais quoi que nous disions, nous n'éloignerons pas de la bonne chère ceux qui y sont adonnés, si nous n'attaquons pas une autre maladie.

Et d'abord parlons des femmes. Rien de plus honteux qu'une femme adonnée aux plaisirs de la table, rien de plus hideux que celle qui s'enivre. La fleur de son visage se fane, la sérénité et la douceur de ses yeux se trouble; c'est comme un nuage qui passe sous le soleil et en intercepte les rayons. Elle devient une chose ignoble, servile et couverte de toutes les ignominies. Combien est désagréable la respiration d'une femme exhalant l'odeur puante du vin, vomissant des viandes corrompues, alourdie et ne pouvant se soulever, rouge plus qu'il ne convient, et prise de vertiges et de bâillements répétés. Mais telle n'est -pas la femme qui s'abstient de ces plaisirs : elle imprime le respect, elle est sage et belle. Une âme bien réglée communique au corps une grande beauté; ne croyez pas, en effet, que la beauté ne vienne que des formes corporelles. Prenez une jeune fille bien faite, mais turbulente, bavarde, médisante, adonnée au vin, coquette, ne devient-elle pas plus laide que la plus difforme? Au contraire, qu'elle soit modeste et discrète, qu'elle sache rougir, ne parler, qu'avec mesure, et jeûner; dès lors sa beauté est doublée, sa grâce devient plus grande, son visage plus agréable par la chasteté et la décence dont il est orné. Voulez-vous que nous parlions maintenant des hommes? Quoi de plus hideux que l'ivrogne? Il est la risée de ses serviteurs, la risée de ses ennemis, la pitié de ses amis, le digne objet de mille blâmes, une bête plutôt qu'un homme ; car se repaître. à l'excès appartient au léopard, au lion, à l'ours. C'est convenable pour eux; ils n'ont pas une âme raisonnable. Et même, chez ces animaux, lorsqu'ils se repaissent outre mesure et plus que ne le veut la nature, le corps entier se corrompt. Combien plus en (133) est-il ainsi pour nous? C'est pour cela- que, Dieu nous a donné un petit estomac; c'est, pour cela qu'il nous a fixé une petite mesure de nourriture, afin de nous enseigner à soigner notre âme.

3. Etudions la constitution même, de notre corps, et nous verrons qu'une petite partie de noire être est consacrée à cette opération, La bouche et la langue sont destinées aux hymnes, notre gorge à la, parole. La nécessité de la nature nous a ainsi liés, afin que nous ne puissions, même malgré nous, tomber dans un grand, embarras d'affaires. Si les délices de la table n'étaient la source de tant de peines, de maladies et d'indispositions , elles seraient supportables. Mais les bornes imposées à, la nature sont faites de telle sorte que, même en le voulant, nous, ne puissions les dépasser. Recherchez-vous le plaisir, mon cher auditeur? Vous le trouverez dans la frugalité. La santé ?C'est encore là qu'il vous faut la chercher. La quiétude? Vous ne, la rencontrerez que là. La liberté, la vigueur du, corps, sa bonne constitution, la sagesse de l'âme, la vigilance? Tous les biens naissent de la frugalité. Dans la bonne chère se trouvent les choses contraires : l'aigreur, la langueur, la, maladie, la bassesse et la prodigalité. D'où vient donc, direz-vous, que tous nous courons à.la bonne chère? Cela. vient de ce que nous sommes malades. En effet, dites-moi pourquoi la malade recherche-t-il, ce qui est nuisible? N'est-ce pas là encore un signe de maladie? Pourquoi, le boiteux ne marche-t-il pas droit? N'est-ce pas à cause de sa nonchalance, et parce qu'il ne veut pas aller au médecin? Parmi les choses. de ce inonde, les unes procurent. une joie passagère, et sont la cause d'un châtiment éternel ; les autres, au contraire, causent des souffrances passagères, et, procurent une joie, sans fin. Celui donc qui est assez lâche et, nonchalant pour ne pas mépriser les joies présentes, afin de gagner les biens futurs, est promptement séduit. Dites-moi, comment fut séduit, Esaü? D'où vient qu'il préféra une joie passagère à l’honneur à.venir? cela vint de la mollesse et de la faiblesse de son esprit. Mais cela même d'où vient- il? direz-vous. Cela provient de nous-mêmes, et évidemment de là. Lorsque tous le voulons, nous nous excitons, nous-mêmes, et nous devenons tempérants. Toutes les fois, qu'une nécessité survient, ce n'est, qu'en faisant des efforts que nous      parvenons à.voir et à embrasser ce qui est bien. Lors donc que vous devrez vous livrer à la bonne chère, songez combien est court le plaisir qu'on y trouve, songez au dommage qui en résulte (car c'est un véritable dommage de dépenser tant de richesses pour son, propre malheur), songez, aux maladies, aux,infirmités, et méprisez la bonne chère. Combien voulez-vous que j'énumère d'hommes devenus victimes de la gourmandise ? Noé s'enivra et resta nu; et que de maux à cause de cela ! Esaü, par gloutonnerie, livra son droit d'aînesse, et il fut sur le point de commettre un fratricide. « Le peuple d'Israël s'assit pour boire et pour manger, et ils se levèrent pour jouer ». (Exod. XXXII, 6.): C'est pour cela qu'il est dit:  « En buvant et en mangeant, souvenez-vous du Seigneur votre Dieu ». (Deut. VI, 2) Ceux qui se plongèrent dans la bonne chère, tombèrent dans l'abîme. « La veuve, qui vit. dans le luxe », dit l’Ecriture, « est morte, quoique vivante » ( I Tim, V, 6) et ailleurs : «Le bien-aimé s'engraissa, il s'appesantit, et se révolta ». (Deut. XXXII, 16.) Et l'apôtre dit encore : « Ne cherchez pas à contenter les désirs de la chair ». Je ne fais pas une loi du jeûne (personne: ne me comprendrait) , mais je repousse les délices; excessives , je blâme la bonne chère pour, votre utilité. De même qu'un torrent, les délices renversent, tout; rien ne saurait leur résister : elles renversent les trônes. Que dirai-je de plus? Voulez-vous faire bonne chère ? Donnez aux pauvres ; appelez le Christ, afin d'être encore dans les délices lorsque la table sera enlevée. Vous n'avez pas maintenant, cet avantage ; je le.crois, bien ; les choses d'ici-bas s'ont, si peu stables. Mais plus tard vous l’aurez. Vous voulez faire bonne chère? Nourrissez votre âme , donnez-lui la nourriture dont elle a besoin. Ne la tuez pas par la faim. C'est le temps de la,guerre, c'est le temps du combat; et vous vous asseyez pour faire bonne chère ! Ne voyez-vous pas ceux qui tiennent. le sceptre, vivre frugalement à l'armée ? « Nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang » (Eph. VI, 1), et vous vous engraissez lorsqu'il faut combattre? L'ennemi,grinçant des dents est là, et vous êtes plongé dans la mollesse et attaché à la table. Je sais que je parle en. vain, mais pas pour tous. « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ». Le Christ est desséché par la faim, et. vous, crevez des suites de votre (135) gourmandise. Ce sont deux excès. Quel mal ne causent pas les délices de la table? Elles portent en elles leurs contraires : Je ne vois pas d'où elles ont pris ce nom. Mais de même que la gloire et la richesse sont ainsi nommées quoiqu'elles ne soient que misère et pauvreté, de même le plaisir de la table porte ce nom quoiqu'il ne soit qu'amertume. Devons-nous être immolés, que nous nous engraissons nous-mêmes? Pourquoi préparez-vous aux vers un festin si copieux? Pourquoi préparez-vous une masse plus abondante de corruption ? Pourquoi déposez-vous en vous des sources d'humeurs et d'odeurs fétides? Pourquoi vous rendez-vous vous-même inutile en tout? Voulez-vous que l'oeil soit bon ? Rendez le corps robuste. Parmi les cordes d'instrument, celle qui est grasse et souillée est inutile pour la mélodie ; celle, au contraire, qui est partout bien tendue, est tout à fait harmonieuse. Pourquoi enterrez-vous l'âme? Pourquoi rendez-vous sa muraille plus épaisse ? Pourquoi épaissir le nuage de fumée qui vous aveugle,. car de la bonne chère s'élèvent de toutes parts comme des vapeurs et des brouillards. A défaut d'autres , les athlètes vous enseigneront qu'un corps plus grêle est plus robuste. Ainsi l'âme adonnée à la philosophie est plus forte. Je la compare à un écuyer sur son coursier. Or, il est d'expérience que les chevaux trop gras donnent beaucoup de peine aux écuyers, et qu'ils sont difficiles à manier. Ce qu'on souhaite, c'est que l'écuyer monté sur un cheval vigoureux et docile remporte le prix de la course. Mais donnez à un écuyer un cheval qu'il soit obligé de traîner, qui tombe mille fois sous lui, et qu'il ne puisse exciter même en se servant de l'éperon, si habile que soit cet écuyer il n'obtiendra pas la panne. Ne négligeons pas notre âme, ne la laissons pas opprimer par le corps; mais au contraire rendons-la plus clairvoyante; rendons son aile légère, ses, liens plus larges. Nourrissons-la de saintes paroles et de frugalité : ainsi notre corps sera robuste, et notre âme sera dans la joie, sera exempte de peine : et après avoir ainsi réglé convenablement notre existence, nous pourrons atteindre au sommet de la vertu, et jouir des biens éternels par la grâce et la bienveillance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui soit, pour le Père et l'Esprit-Saint, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours, dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

 

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