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HUITIÈME DISCOURS.  Sur le temps qui est à la pluie; — sur les évêques qui se trouvent réunis ; — sur le précepte donné à Adam; — la loi qu'il a reçue est un effet de la grande sollicitude de Dieu.

 

ANALYSE

 

l. Exorde tiré d'une circonstance de temps et de la personne de l'évêque Flavien. Résumé du dernier discours. Si la loi est la cause du péché. — 2. La loi est le plus grand bien que Dieu ait accordé à son peuple : Non fecit taliter omni nationi, et judicia sua non manifestavit eis. — 2. Confirmation de cette même vérité par plusieurs textes. Conclusion et exhortation.

 

1. Les nuages amoncelés ont attristé le jour, mais la présence de notre docteur (1) lui a rendu sa clarté. Le soleil, du haut de la voûte du ciel, nous envoie des rayons qui versent, sur nos corps, moins de lumière, que n'en répand sur nos âmes du haut de son trône rayonnant, le Père que nous aimons.

Il le sait bien lui-même; aussi n'est-il pas venu seul; il amène, avec lui, cette pléiade resplendissante, pour ajouter à l'éclat d'une si vive lumière. Aussi notre Eglise tressaille d'allégresse, le troupeau bondit, et notre confiance redouble en commençant notre discours. C'est qu'en effet, où les bergers se rassemblent, les brebis sont en sécurité; de même les matelots se réjouissent quand ils voient un grand nombre de pilotes; car, si la mer est tranquille, et le ciel serein, les pilotes, en manœuvrant le gouvernail, rendent plus léger le travail des rameurs; et quand les tempêtes soulèvent les vagues, les pilotes combinant leur industrie et tous leurs efforts, apaisent le combat des flots. Voilà pourquoi, nous aussi, nous commençons plein d'une bonne espérance

 

1. L’évêque Flavien.

 

ce discours destiné à vous instruire, et nous confions le tout à leurs prières. Maintenant, pour que vous puissiez, plus facilement et mieux, comprendre ce que nous avons à vous dire, nous vous résumerons rapidement ce qu'hier vous avez entendu. J'ai dit: que, même avant de manger du fruit de l'arbre, l'homme avait le discernement du bien et du mal; et que ce n'est pas seulement après avoir goûté du fruit de l'arbre, qu'il a reçu cette connaissance. J'ai dit pourquoi cet arbre a été appelé, l'arbre de la science du bien et du mal ; que c'est l'usage de l'Ecriture, de donner, aux lieux et aux temps, des noms pris des événements qui s'y sont accomplis. Aujourd'hui, ce qui convient, c'est de vous lire le commandement même qui interdisait de manger du fruit de cet arbre. Quel est donc ce commandement? Et le Seigneur Dieu fit à Adam ce commandement et lui dit: Mangez de tous les fruits des arbres du paradis. (Gen. II, 16.) C'est la loi de Dieu, soyons attentifs. Si les hommes qui font la lecture des rescrits de l'empereur commandent à l'assemblée de se lever tout entière, à plus forte raison faut-il, (474) quand nous allons faire la lecture, non pas des lois des hommes, mais de la loi de Dieu, nous 1enirdebout, par la pensée, et appliquer toute notre attention, aux paroles qui se font entendre.

Je n'ignore pas que certaines personnes accusent le législateur, en disant que la loi a été une occasion de chute; c'est tout d'abord cette accusation que nous devons combattre , et nous montrerons, en nous appuyant sur la réalité même des faits, que ce n'est pas par haine pour l'homme, que ce n'est pas pour faire outrage à notre nature, mais par amour, par sollicitude pour nous, que Dieu nous a donné la loi. Voici qui va vous apprendre que cette loi nous a été donnée pour nous servir d'auxiliaire : écoutez Isaïe : Il nous a donné la loi pour nous servir de secours. (Is. VIII, 20.) Celui qui déteste ne porte pas de secours. Autre passage du prophète s'écriant : Votre parole est une lanterne pour mes pieds, une lumière qui éclaire mes sentiers. (Ps. CXVIII, 105.) Celui qui déteste ne porte pas la lanterne qui dissipe les ténèbres; il ne conduit pas, avec une lumière, le voyageur errant. Ecoulez maintenant Salomon : Le précepte de la loi c'est une lanterne, c'est la lumière et la vie, et le redressement, et l'enseignement. (Prov. VI, 23.) Voyez-vous que ce n'est plus seulement un secours ni une lanterne, mais de plus, et la lumière, et la vie ? Or, je ne vois pas là les preuves de la haine, la volonté de vous perdre, mais une main qui vous est tendue pour vous relever. Aussi, lorsque Paul s'emporte contre les Juifs, en leur montrant l'utilité de la loi, il leur dit, pour leur prouver que la loi ne nous est pas imposée comme un fardeau, qu'au contraire elle nous ranime : Mais vous, qui portez le nom de Juifs, qui vous glorifiez des faveurs de la loi. (Rom. II, 17.) Voyez-vous que ce n'est pas pour nous imposer un fardeau , mais pour nous ranimer que Dieu a donné la loi?. Voulez-vous comprendre maintenant que Dieu l'a donnée aussi, afin de nous faire honneur ? Nos preuves, jusqu'à présent, suffisaient pour montrer l'honneur qui nous a été fait, le soin que Dieu a pris de nous. Mais cela même, je veux le démontrer encore, par d'autres témoignages : Jérusalem, loue le Seigneur; Sion, loue ton Dieu, car il a fortifié les serrures de tes portes, et il a béni tes enfants, au milieu de toi; il a établi la paix ,sur tes frontières, et il te rassasie du meilleur froment. (Ps. CXLVII, 12, 14.) Ensuite, après avoir rappelé les bienfaits qu'il nous a procurés par d'autres créatures, il y joint ce principal bienfait, plus considérable que tous les autres, il dit : Il annonce sa parole à Jacob, ses jugements et ses ordonnances à Israël, il n'a point traité de la sorte toutes les autres nations et il ne leur a point manifesté ses préceptes. (Ibid. XIX, 20.) Voyez quelle énumération de bienfaits ! La sécurité de la ville: Car il a fortifié, dit-il, les serrures de tes portes : les guerres écartées: Il a établi, dit-il, la paix sur tes frontières : l'abondance des vivres : Et il te rassasie du meilleur froment. Cependant il déclare que le présent qu'il fait de la loi, est le plus précieux de tous. Car, la sécurité, la paix, le bonheur de voir écarter la guerre, l'abondance heureuse des enfants, la fécondité des fruits de la terre, sont des biens beaucoup moins précieux, que d'avoir reçu la loi en présent; que d'avoir appris les jugements du Seigneur; et pour cette raison, le Prophète réserve ce don comme le dernier, après tant d'autres, et il ajoute : Il n'a point traité de la sorte toutes les autres nations. De la sorte, qu'est-ce que cela veut dire? Certes, la fécondité, l'abondance de la terre, les autres biens énumérés, ont été souvent le partage d'un grand nombre d'hommes, mais, dit le Prophète, je ne parle pas de ces biens-là, je parle de la loi, et Dieu, à cet égard, n'a pas agi de même avec toutes les autres nations; voilà pourquoi il ajoute : Et il ne leur a point manifesté ses préceptes. Vous voyez que de tous les biens énumérés, le plus précieux, c'est la loi.

2. Ce que Jérémie, à son tour, a manifesté quand il pleurait sur les tribus captives; il disait : Pourquoi es-tu sur la terre des ennemis? Tu as délaissé la source de la sagesse. (Baruch, III, 10, 12.) C'est la loi, qu'il appelle ainsi, Comme une source envoie de tous côtés, un grand nombre de ruisseaux, ainsi la loi verse de tous côtés, un grand nombre de préceptes, qui arrosent notre âme. Jérémie, montrant ensuite le principal honneur à nous conféré par la loi, disait : Cette sagesse n'a pas été entendue dans Chanaan ; elle n'a pas été vue dans Tehoeman, et les fils d'Agar, ces marchands et ces faiseurs de recherches, n'ont pas trouvé sa voie, et ils ne se sont pas souvenus de ses sentiers. (Ib. 22, 23.) Et, pour démontrer que cette loi est spirituelle et divine: Qui est monté, dit-il, (475) dans le ciel et l'en a tirée. (Ib. 29.) Aussitôt il ajoute : C'est notre Dieu; aucun autre ne ara estimé auprès de lui; il a trouvé toutes les vies de la science, et il les a montrées à Jacob e enfant, et à Israël son bien-aimé. (Ib. 36,37.) C'est pour cela que David à. son tour disait: Il n'a point traité de la sorte toutes les autres nations, et il ne leur a point manifesté ses préceptes. Et Paul insinuait cette pensée, quand il disait: Quel est donc l'avantage des Juifs; et quelle est l'utilité de la circoncision? (Rom. III, 1.) Voyez-vous comme ici les preuves abondent de mille manières ? D'abord c'est qu'ils n'ont pas cru aux paroles de Dieu. Voyez-vous de quelle manière Paul aussi a proclamé cette vérité : Il n'a point traité de ta sorte toutes les autres nations, et il ne leur a point manifesté ses préceptes? En effet, si c'est l'avantage des Juifs qu'eux seuls; parmi tant d'autres hommes, ont été honorés du don de la loi écrite, ce n'est pas pour nous imposer un fardeau, mais pour nous faire honneur, que Dieu nous a donné la loi; et l'honneur que Dieu nous a fait, ne consiste pas seulement en ce qu'il nous a donné la loi, mais encore en ce qu'il nous l'a donnée lui-même. Voilà, en effet, le plus grand honneur; il n'a pas seulement répandu des biens, mais c'est par lui-même qu'il les a répandus. Voilà, certes, un grand don, écoutez Paul. Comme il voyait que les Juifs étaient enflés d'orgueil , parce que les prophètes étaient venus pour eux, Paul, voulant réprimer leur arrogance, et montrer que nous avons reçu un plus grand honneur, nous, à. qui la doctrine n'a pas été donnée par un serviteur de Dieu, mais parle Seigneur même, voici ce qu'il écrit aux Hébreux : Dieu ayant parlé, autrefois, à nos pères, en divers temps, et en diverses manières, par les prophètes, nous, a enfin parlé, en ces derniers jours, par son Fils unique. (Hébr. I, 1, 2.) Et ailleurs encore : Et non-seulement nous avons été réconciliés, mais nous nous glorifions même en, Dieu, par Jésus-Christ Notre-Seigneur, par qui nous avons obtenu maintenant cette réconciliation. (Rom. V, 11.) Voyez-vous comme il ne se glorifie pas seulement de la réconciliation, mais encore de la réconciliation obtenue par Jésus-Christ? Et, dans un autre passage, quand il célèbre la résurrection, il dit : Le Seigneur lui-même descendra du ciel. (I Thess. IV, 16.) Comprenez qu'ici encore, tout se fait, s'accomplit par le Seigneur; et ce n'est pas par l'entremise d'un serviteur quelconque, par un ange, par un archange, c'est lui-même de sa propre personne qui a donné le précepte à Adam, faisant à l'homme un double honneur : l'honneur de lui donner la loi, l'honneur de la donner lui-même. Comment donc l'homme est-il tombé? A cause de sa négligence; et c'est ce que fait voir le grand nombre de justes qui ont reçu la loi, et qui ne sont pas tombés, mais qui ont fait plus qu'il ne leur avait été commandé. Je vois que le temps nous presse; nous renverrons ces réflexions à un autre entretien; quant à vous, retenez les paroles que vous avez entendues, conservez-les dans votre mémoire, instruisez ceux qui ne les ont pas entendues dans l'église, sur la placé publique, à la maison, qu'elles soient le sujet des méditations de chacun de vous; car il n'est rien de plus doux que d'entendre la divine parole. Ecoutez ce que dit le prophète : Que tes paroles sont douces à ma gorge! elles le sont plus que le rayon de miel pour ma bouche. (Ps. CXVIII, 103.) Ce rayon de miel, servez-le, le soir, sur votre table, pour la remplir tout entière du plaisir qui vient de l'Esprit. Ne voyez-vous pas que les hommes opulents font venir à la fin du repas, des joueurs de lyre et des joueurs de flûte? Ils font, de leur maison un théâtre; vous au contraire, faites de votre maison le ciel. Ce qui vous sera facile, sans changer les murailles, sans déranger les fondations; appelez à votre table Celui qui commande au plus haut dès cieux. Dieu ne rougit pas d'assister à de tels festins; car c'est là que règnent la doctrine spirituelle, et la tempérance, et la gravité et la douceur. Là où le mari, la femme et les enfants vivent dans la,concorde, enchaînés tous ensemble par les liens de l'affection et de là vertu, là réside aussi le Christ; il ne recherche pas les lambris dorés, les colonnes resplendissantes, les beaux marbres, mais la beauté de l'âme, la grâce des pensées, une table couverte des fruits abondants de la justice et de l'aumône. A l'aspect d'un pareil service, il lui tarde de prendre sa part du festin ; il s'assied à la table, c'est lui-même qui l'a dit : J'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger. (Math.  XXV, 35.) Aussi, quand vous avez écouté le pauvre, dont le cri est monté jusqu'à vous, quand vous avez donné à l'indigent, une part quelconque des mets de votre table, c'est le Seigneur que vous avez invité, en invitant son serviteur, et votre table, vous l'avez aussitôt (476) comblée de toutes les bénédictions; en offrant vos prémices, vous avez saisi l'occasion la plus favorable d'attirer sur vous la plénitude de tous les biens. Que le Dieu de paix et d'amour; qui donne le pain à celui qui le mange, et la semence au semeur, multiplie votre semence., fasse croître en vous tous, les fruits de la justice, vous communique sa grâce, et daigne vous appeler à son royaume des cieux. Puissions-nous obtenir, tous tant que-nous sommes, un tel partage, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ à qui appartient, en même temps qu'au Père, la gloire, l'honneur, la puissance, ainsi qu'au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

 

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