PSAUME CXVII

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EXPLICATION DU PSAUME CXVII. « LOUEZ LE SEIGNEUR PARCE QU'IL EST BON, PARCE QUE SA MISÉRICORDE S'ÉTEND DANS TOUS LES SIÈCLES. »

 

ANALYSE.

 

1. La miséricorde du Seigneur est infinie : témoin la maison d'Israël, qui, au milieu de ses épreuves, a reçu des grâces si nombreuses; témoin la maison d'Aaron en faveur de laquelle se sont opérées tant de merveilles. Mais pour voir cette miséricorde il faut craindre Dieu dont la Providence n'est visible qu'à ceux qui sont exempts de passions et de préjugés.

2. Il suffit d'être malheureux pour avoir droit à la bonté divine. Avec son aide et sa protection on n'a rien à craindre, car, dit saint Paul, « si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » Mais pour s'en rendre digne, il faut mettre de coté toute confiance dans les secours humains et lui demeurer constamment attaché.

3. Le Seigneur attend pour nous secourir que tout soit désespéré, humainement parlant, afin que son secours soit peu évident. Par ce moyen, il nous empêche de nous attribuer un succès qui n'est dû qu'à lui et il excite davantage notre reconnaissance.

4. La bonté du Seigneur ne se borne pas à nous délivrer des maux, mais elle nous met en possession de la gloire et de l'illustration, en nous délivrant de la corruption du tombeau pour nous ressusciter à une vie meilleure.

5. Mais les portes de l'éternité bienheureuse ne s'ouvriront que pour ceux qui auront été châtiés et. éprouvés en ce monde C'est pourquoi le Palmiste remercie le Seigneur d'avoir eu à souffrir. — Ici est rappelé le principal bienfait, la merveille par laquelle Dieu nous a ouvert le Ciel, je veux dire le mystère de l'Incarnation du Verbe.

6. Béni soit donc Celui qui vient au nom du Seigneur, que notre vie soit employée à le bénir, à le remercier, à profiter de ses grâces et de ses exemples, et célébrons à jamais, invitons toute créature à s'unir à nous pour célébrer ses miséricordes infinies !...

 

1. Il y a une parole de ce psaume que le peuple a coutume de répéter en choeur après chaque vers, et c'est la suivante: « C'est ici le jour que le Seigneur a fait, réjouissons-nous y donc et soyons pleins d'allégresse. » A ces mots, presque tous se lèvent, et c'est surtout le chant que les fidèles ont l'habitude de faire entendre dans cette assemblée spirituelle, dans cette fête céleste. Pour nous, si vous le voulez bien, nous parcourrons ce psaume dès le début et nous commencerons notre explication dès les premiers mots et non pas au verset qui sert de refrain. Nos pères permirent aux simples fidèles de s'en tenir à ce verset parce qu'il était harmonieux et qu'il renfermait un dogme sublime. Du reste, ils n'auraient pu retenir le psaume en entier et ces paroles exprimaient la doctrine la plus parfaite. Quant ! nous, il faut que nous le voyions dans son ensemble, quoique la plus grande prophétie soit au milieu. Car c'est au verset 22 qu'on lit : « La pierre que ceux qui bâtissaient avaient rejetée, a été placée à la tête de l'angle. » C'est du reste ce que le Christ lui-même dit aux Juifs, un peu moins clairement sans doute : il ne voulait pas augmenter encore la colère dont ils étaient enflammés, « car il ne brisera point le roseau cassé et il n'éteindra point la mèche « qui fume encore. » (Isaïe, XLII, 3.) Néanmoins il le leur dit : attaquons donc ce psaume par (159) son début, connut, nous l'avons déjà dit. Et quel est ce début : « Louez le Seigneur parce qu'il est bon , parce que sa miséricorde s'étend dans tous les siècles. » Le Prophète avant présents à l'esprit les bienfaits dont le Seigneur a comblé toute la terre, sa bonté infinie et sa miséricorde qui éclatent en toutes choses, s'attache à faire ressortir la source de tant de biens « Que la maison d'Israël dise maintenant que le Seigneur est bon et que sa miséricorde s'étend dans tous les siècles (2). »

Qu'est-ce que j'entends? « La maison d'Israël» qui a souffert des captivités nombreuses, qui a servi en Egypte, qui a été emmenée aux extrémités de la terre, qui en Palestine a enduré des maux sans nombre! Sans doute, me répond le Palmiste. Il n'y a point de meilleurs témoins de ces bienfaits et personne n'en a reçu de plus nombreux et de plus signalés. Bien plus, leurs épreuves mêmes sont une marque de son infinie bonté, et un examen un peu attentif prouvera qu'ils lui doivent de grandes. actions de grâces pour la venue du Sauveur, car les maux dont elle a été pour eux la source doivent être attribués à leur malice et non à. Notre-Seigneur. En effet , c'est pour eux qu'il venait et il leur répétait souvent : « Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël (Matth. XV, 24), » et à ses disciples: « N'allez point dans les terres des Gentils, mais plutôt aux brebis perdues de la maison d'Israël (Ibid. X, 5, 6) ; » et à la Chananéenne « Il n'est pas juste de prendre le pain des en« Gants pour le donner aux chiens. » (Ibïd. xv, 26. ) Toutes ses démarches, toutes ses actions se rapportaient donc à leur salut. S'ils parurent dans la suite indignes de ces bienfaits, c'est à leurs crimes et à leur ingratitude extraordinaire qu'il faut l'imputer. « Que la maison d'Aaron dise maintenant que le Seigneur est bon et que sa miséricorde s'étend dans tous les siècles (3). »

Le Prophète fait ici un appel spécial aux prêtres, afin qu'ils viennent chanter les louanges du Seigneur, montrant ainsi l'excellence du sacerdoce. Car, par cela même qu'ils étaient supérieurs aux autres ils reçurent de Dieu plus de gloire, non-seulement par l'honneur du sacerdoce , mais dans bien des circonstance,. Ainsi quand le feu sortit du Tabernacle (Lévit. X, 2), ce fut à cause d'eux; et la terre qui s'entr'ouvre (Nomb. XVI, 32), et la verge qui fleurit (Ibid. XVII, 8), et tant d'autres prodiges ont lieu à cause d'eux et pour eux. « Que tous ceux qui craignent le Seigneur disent maintenant qu'il est bon, que sa miséricorde s'étend dans tous les siècles (4). » Car ce sont ceux-là principalement qui peuvent voir sa bonté et en toutes circonstances trouver les preuves de sa miséricorde. Que signifient ces paroles : « Sa miséricorde s'étend dans tous les siècles?» C'est-à-dire due continuellement et sans interruption elle se montre avec éclat dans tous les événements. Il est vrai que ceux dont les yeux de l'âme sont trop faibles ou que quelques passions rendent malades, n'aperçoivent pas cette bonté et cette miséricorde, pas plus que ceux dont les yeux sont malsains ne peuvent contempler le soleil. Et ceux mêmes qui les ont bien disposés sont forcés de les détourner de sa splendeur. Ainsi en est-il de la Providence générale de Dieu dont la prudence et la sagesse sont si élevées qu'elles Font infiniment au-dessus de toute raison humaine. Ajoutez à cela mille cupidités qui, en nous rendant insensés, nous ôtent la vue et nous empêchent de l'apercevoir. La première est l'amour de la volupté qui fait passer par-dessus les choses les plus manifestes sans qu'on les découvre. La seconde est l'ignorance et le dérèglement de l'esprit. Si nous voyons un père châtier son enfant, nous l'approuvons, nous le louons même, et c'est à ce signe surtout que nous reconnaissons qu'il est père. Que Dieu veuille au contraire nous punir de nos mauvaises actions, nous ne le supportons pas, nous sommes indignés. Quelle absurdité ! quelle perversité comparable à celle-là, puisqu'elle nous fait révolter contre des choses tout à fait opposées et nous fait gémir ici de la présence du châtiment, là de son absence. Que l'on aperçoive des hommes qui volent, qui envahissent le bien d'autrui, on veut bien qu'ils soient punis. Quand il s'agit de ses propres fautes on raisonne tout autrement. Ce qui est l'indice d'un coeur dépravé et corrompu. La troisième, c'est le défaut de discernement de ce qui est bien d'avec ce qui est mal , ce qui fait porter des jugements faux; ce défaut vient de ce qu'on est entièrement adonné au vice et qu'on se complaît dans le mal. La quatrième, le peu de connaissance qu'on a de la grandeur de ses fautes. Une cinquième cause de notre aveuglement, c'est la distance infinie qui se rencontre entre Dieu et les hommes. Il faut ajouter que Dieu ne veut pas tous les jours tout découvrir parce (160) qu'il juge qu'il doit nous suffire de connaître peu il peu les événements.

2. Il ne faut donc pas trop chercher à pénétrer en foules choses la Providence divine, ce serait prétendre à dés choses infinies et infiniment au-dessus de toute nature créée. Quant à ceux qui veulent la comprendre sur certains points il faut qu'ils soient exempts de ces passions dont nous venons de parler, et alors ils la verront plus clairement que le soleil, quoique partiellement, et le peu qu'ils en verront leur apprendra à rendre grâces pour le tout. « J'ai invoqué le Seigneur du milieu de l'affliction, et le Seigneur m'a exaucé, et m'a mis au large (5). » Quelle miséricorde ! quelle ponté de la part du Seigneur : Le Psalmiste ne dit pas : j'étais digne, il ne dit pas : j'ai montré mes bonnes oeuvres, mais simplement : « J'ai invoqué, » et ma prière a suffi pour éloigner de moi le malheur. C'est ainsi que parle Dieu à propos des Egyptiens : « J'ai vu l'affliction de mon peuple et je suis descendu pour le délivrer. » (Exod. III, 7-8.) Il ne dit pas : J'ai vu la vertu de mon peuple ou son retour a de meilleurs sentiments, mais son affliction, et j'ai entendu ses cris de détresse. Qui ne reconnaîtrait, à ces traits, le père bienfaisant et miséricordieux qui s'empresse dé secourir par le seul motif qu'on est malheureux ? Les hommes ne regardent pas comme digne d'être sauvé quiconque est :affligé, et s'il leur arrive de voir torturer et battre de verges des esclaves, ils ne volent pas à leur, secours, mais ils sont arrêtés par la considération de leurs fautes. Dieu. a pardonné par cela seulement qu'on était affligé , et non content d'avoir délivré de l'affliction., il a procuré une grande sécurité. « Il m'a exaucé, » dit le Psalmiste, et il m'a mis au large. Il y a plus : l'affliction n'a été permise qu'afin de rendre meilleurs et plus sages ceux qu'elle a frappés. « Le Seigneur est mon soutien et je ne craindrai point ce que l'homme pourra me faire (6). ».

Quelle grandeur d'âme ! quel esprit élevé ! Comme il sait monter au-dessus de la,faiblesse humaine pour mépriser toute, la nature ! Ne nous contentons pas de constater le fait , ruais apportons des preuves à l'appui. Le Psalmiste rie dit pas : Je ne souffrirai plus, mais : « Je ne craindrai point ce que l'homme pourra me faire. » C'est-à-dire, quoique je souffre, je ne craindrai rien , exprimant la même pensée que saint Paul quand il s'écrie : « Si Dieu est, pour nous qui sera contre nous ? (Rom. VIII, 31).  Pourtant les ennemis des Juifs étaient innombrables , mais rien ne les accablait. Ne faudrait-il pas en effet, une âme bien pusillanime et bien basse pour craindre ses semblables quand elle a la protection et l'amitié du Seigneur? Ici au contraire elle est supérieure à toutes les craintes qui l'assaillent de toutes parts. Agissons nous-mêmes de la sorte de peur que nous rie nous privions du secours de Dieu en redoutant trop les obstacles humains, car cette crainte serait une insulte envers l'assistance divine. Telle fat ta cause des malheurs qui fondirent sur la maison d'Ezéchias. En effet, le soleil avait rétrogradé et était revenu sur ses pas, et ce miracle aurait suffi pour remplir d'effroi ceux qui étaient venus pour le constater; mais le roi craignant d'être un jour assailli par ses visiteurs voulut les effrayer et exciter leur admiration. non par les prodiges dont il avait été l'objet, mais par des choses humaines : c'est pourquoi il leur montra ses trésors dans lesquels il plaçait toute sa confiance. (IV Rois. XX, 14, et suiv.) Aussi, Dieu irrité lui dit par son prophète : « Tout cela te sera ravi (Ibid.), » c'est-à-dire, ces objets dans lesquels tu te confies et tu mets tes espérances. Israël, à son tour, est accusé de se confier dans ses trésors et dans ses chevaux. Que fait le prophète ? Il les avertit de se hâter d'apaiser le Seigneur par une conduite tout opposée et de dire : « Nous ne monterons pas sur nos chevaux. » (Osée, XIV, 4.) Dieu vous honore et vous le méprisez. Dieu vous honore en vous offrant son secours et vous vous abandonnez aux, espérances Humaines, prétendant trouver le salut dans l'argent qui, n'est qu'une vile matière. Non-seulement il veut nous sauver, mais il veut nous honorer en mémé temps. Il nous aime ardemment, voilà pourquoi il veut nous séparer de tout pour nous attacher à lui seul : il nous retranche tout pour nous amener à lui et chacun de ses actes semble nous dire : « Espérez en moi » et demeurez-moi, constamment attachés. « Le Seigneur est mon soutien et je mépriserai mes ennemis (7). »

Il ne se venge pas, il ne punit pas ses ennemis, mais il remet ce soin à Dieu. « Il est bon de se confier au Seigneur plutôt que de se confier dans l'homme (8). Il est bon d'espérer au Seigneur plutôt que d'espérer dans les princes (9). Il ne s'agit pas ici d'une (161) comparaison, mais l'Ecriture a coutume de s'exprimer ainsi, même dans les choses qui n'admettent pas de comparaison, pour condescendre à la faiblesse de ceux auxquels elle s'adresse. Le Psalmiste n'a donc pas voulu établir une comparaison, mais simplement s'abaisser jusqu'à notre intelligence. C'est dans le même sens qu'un autre prophète a dit : « Maudit soit l'homme qui met sa confiance en l'homme ! » (Jér. XVII, 5.) Rien n'est plus faible, en effet, que cette espérance. Une toile d'araignée offrirait plus de ressource. Cette espérance n'est pas seulement faible, elle est encore dangereuse. J'en prends à témoin ceux qui se sont souvent confiés dans les hommes avec lesquels ils ont été accablés. La confiance en Dieu n'est pas seulement solide, mais elle est sûre et à l'abri de tout changement. Aussi saint Paul proclamait que l'espérance en Dieu ne trompe jamais ; et dans un autre endroit la sagesse s'exprime ainsi: « Considérez tout ce qu'il y a d'hommes parmi les nations et voyez s'il y en a un seul qui ait espéré dans le Seigneur et qui ait été confondu. » (Eccli. XI, 11.) Mais moi, direz-vous, j'ai espéré en vain. Voilà une bonne parole, mes frères, mais elle ne contredit en rien la sainte Ecriture. En effet, si vous . avez été confondus, c'est que vous n'avez pas espéré comme il fallait, que vous avez cessé d'espérer, que vous n'avez pas attendu la fin, que vous avez été faibles. Agissez autrement désormais, et quand vous serez sous le poids des malheurs ou des difficultés, ne perdez pas courage, car l'espérance consiste surtout à demeurer fermes au milieu des maux et des périls les plus grands.

3. Quel malheur comparable à celui de ces barbares Ninivites ! Ils étaient déjà enlacés dans les filets de leurs ennemis, la ruine de leur ville était imminente : néanmoins, ils ne perdirent pas courage, mais ils donnèrent les plus grands signes de pénitence et ils obtinrent que Dieu révoquât sa sentence. Voilà qui nous montre bien la vertu de l'espérance. Et croyez-vous que dans le ventre de la baleine le Prophète ne songeait pas encore et au temple, et à son retour dans la ville de Jérusalem? (Jon. II, 5.) Vous aussi, fussiez-vous aux portes de la mort et exposés de toutes parts aux plus grands périls, ne désespérez pas, car Dieu sait des les circonstances même les plus difficiles trouver une heureuse issue. C'est ce qui a fait dire à la sagesse : « Du matin au soir il y a de  nombreux changements et tout cela est faible aux yeux de Dieu. » (Eccli. XVIII, 26.) Rappelez-vous l'histoire de ce tribun mourant de faim au milieu de l'abondance la plus grande. (IV Rois, VII, 2.) Et celle de la veuve qui était dans l'abondance malgré sa pauvreté. (III Rois, XVII, 2 et suiv.) Plus la misère dans laquelle vous vous trouvez est extrême, plus vous devez espérer. Car le moment que Dieu choisit de préférence pour montrer sa puissance, ce n'est pas aussitôt que commencent nos épreuves, mais c'est lorsque tout semble désespéré. C'est alors le vrai temps du secours de Dieu. Aussi voyons-nous qu'il ne délivra pas d'abord les trois jeunes hommes de Babylone, mais seulement après qu'ils eurent été jetés dans la fournaise. (Dan. III, 93.) Ni Daniel avant qu'il eût été mis dans la fosse aux lions, mais seulement sept jours après. (Dan. XIV, 39, 40.) Il ne faut pas faire attention à la nature des choses qui ne peut que jeter dans le désespoir, mais à la puissance de Dieu qui amène à bonne fin ce qui paraissait sans ressource. C'est ce que veut nous montrer le Psalmiste en même temps que nous faire comprendre les ressources de la puissance divine qui peut délivrer ceux qui sont tombés dans les plus grands maux dont ils sont accablés et comme écrasés, quand il ajoute : « Toutes les nations m'ont assiégé (10). »

Comprenez-vous l'imminence du danger? Il ne s'agissait pas de livrer une bataille, de résister aux ennemis d'un seul pays, mais le Roi-Prophète était cerné et comme enveloppé d'un filet ou comme pris dans un piége; et cela, non par un, par deux ou par trois ennemis, mais par toutes les nations réunies. Et cependant tous ces biens, malgré leur nombre et leur force, sont brisés par la confiance en Dieu. « Mais je les ai repoussées au nom du Seigneur. Elles m'ont assiégé et environné et je les ai repoussées au nom du Seigneur (11). « Elles m'ont toutes environné, comme des abeilles le rayon de miel, et elles se sont embrasées comme un feu qui a pris à des épines, mais je les ai repoussées au nom du Seigneur (12). »

Comme le Psalmiste nous dépeint bien la grandeur de son infortune ! Il ne s'est pas contenté de dire : « Elles m'ont environné, » mais il les compare à des abeilles et au feu dans les épines. Les abeilles indiquent une grande vivacité dans l'action et les épines une (162) colère irrésistible et. une soif de vengeance inextinguible. Est-il possible en effet de résister au feu (lui est tombé sur des épines ? Cependant, dit le Prophète; alors que rues ennemis excités contre moi m'assaillaient avec la violence et la rapidité de l'incendie, non-seulement j'ai pu m'échapper, mais je les ai repoussés. Le même prodige s'opère sur la matière, le feu brûlait un buisson, et le buisson n'était pas consumé, et le feu ne s'éteignait pas, mais ces deux substances demeuraient ensemble sans se détruire. (Ex. III, 2.) Cependant., qu'y a-t-il de plus faible que le bois d'un buisson, de plus ardent que le feu? Mais la puissance admirable de Dieu, qui opère des miracles qui nous surpassent, permit qu'il en fût ainsi. Il se produisit un miracle semblable pour le Roi-Prophète. Ses ennemis accouraient avec la rapidité de la flamme, et comme des abeilles, ils l'entouraient avec une grande vivacité, ils le cernaient de tous côtés, mais leurs efforts furent vains. Les armes invincibles et le secours inexpugnable du nom de Dieu les dispersa tous. « J'ai été poussé, on a fait effort pour me renverser, et le Seigneur m'a soutenu (13). »

Le Psalmiste nous a fait connaître la grandeur de ces maux par la multitude et les dispositions menaçantes, par l'ardeur et l'acharnement de ceux qui l'entouraient: maintenant il arrive à ce qu'il a souffert. J'ai été en butte à tant d'infortunes, nous dit-il, que j'ai failli être renversé et abattu. J'ai été tellement pressé et presque renversé que j'étais sur le point de tomber, mais au moment de m'abattre sur mes genoux, comme j'étais déjà penché et sans espoir dans les secours humains, le Seigneur a fait paraître son secours. Or Dieu en use de la sorte afin que personne ne lui ravisse et ne s'attribue la gloire qui revient à lui seul. C'est ainsi qu'il fit pour Gédéon dans l'histoire des Juges. (Juges, VII.) Et voilà pourquoi encore, sous le règne d'Ezéchias, il choisit la nuit pour remporter une brillante victoire. (IV Rois, XIX, 35.) En effet, si ce prince qui n'avait pris part ni au combat, ni à la victoire, devint néanmoins si téméraire, il l'eût été bien davantage s'il eût assisté à la défaite de ses ennemis et s'il les eût vus tomber. C'est donc bien à l'instant où tout semble désespéré que Dieu donne son secours. Témoin Goliath (I Rois, XVII), témoins les apôtres. Ecoutez saint Paul : « Nous avons entendu prononcer en nous-mêmes l'arrêt de notre mort, afin que nous ne mettions point notre confiance en nous, mais en Dieu qui ressuscite les morts. » (II Cor. I, 9.) « Le Seigneur est ma force et le sujet de mes louanges. C'est bien en lui que j'ai trouvé mon salut (14). »

En d'autres termes, il a été ma puissance et mon secours. Mais que signifient ces mots « Le sujet de mes louanges? » C'est que non-seulement il délivre des périls, mais il rend célèbre et illustre et partout on peut constater qu'il sauve et qu'il glorifie tout à la fois. Ces paroles ont encore un autre sens caché que voici: qu'à jamais, dit-il, je chante l'hymne de ma reconnaissance, que ma voix lui soit consacrée entièrement, et que je ne sois occupé désormais qu'à le louer.

4. Combien donc sont coupables et quelle perte éprouvent ceux qui se souillent par des chants diaboliques, et qui se plaisent à faire entendre continuellement les cantiques du démon, bien différents de ce juste qui loue sans cesse son Sauveur. « Les cris d'allégresse et du salut se font entendre dans les tentes des justes (15). » Après un succès complet remporté par Dieu, ceux qui jouissent de la victoire sont dans la joie et l'allégresse, par la double raison qu'ils sont sauvés et qu'ils le sont par Dieu. La cause de leur joie est le Seigneur lui-même qui a triomphé. Mais il faut que nous sachions ce qui a engagé Dieu à donner son assistance, et le Psalmiste ajoute : « Dans les tentes des justes. » Il ne s'agit pas de maison, mais de « tentes, » pour indiquer que c'est une demeure où l'on ne doit s'arrêter qu'en passant. Telle était la tente d'Abraham, quand après avoir vaincu les rois il revenait couvert de la gloire que ses exploits lui avaient méritée. Telle la lente de Paul quand il rentrait après avoir triomphé des démons, fait disparaître l'erreur, et s'être rendu célèbre par ses succès. — « La droite du Seigneur a fait éclater sa puissance, la droite du Seigneur m'a élevé (16). »

Tel est le sujet de l'allégresse du Psalmiste. Il ne fait que répéter ici ce qu'il disait tout à l'heure en montrant que tous ses succès sont l'oeuvre de Dieu : Il est donc bien vrai que sa bonté ne se borne pas à nous délivrer des maux, mais qu'elle nous met encore en possession de la gloire et de l'illustration. En effet, après avoir dit : « La droite du Seigneur a fait (163) éclater sa puissance, » il a ajouté : « La droite du Seigneur m'a élevé, » pour faire ressortir la gloire qui avait rejailli sur lui. Car, « m'a élevé » signifie, m'a comblé de gloire, et c'est ainsi que Dieu donne non-seulement la force, mais encore la grandeur. — « Je ne mourrai point, mais je vivrai, et je raconterai les oeuvres du Seigneur (17). »

Les périls me menaçaient de la mort, mais j'ai dit: « Je ne mourrai point, mais je vivrai.» C'est-à-dire, la puissance du Seigneur est si grande que même avant la Nouvelle Loi, il a délivré de la mort au milieu de périls qui ne laissaient plus d'espoir, préconisant ainsi d'avance la résurrection future dont il nous a du reste donné une image dès l'origine en enlevant Hénoch au ciel. (Gen. V, 21.) Si vous né croyez pas possible la résurrection des morts, que ce fait vous serve de preuve. Comment, en effet, ce corps a-t-il pu subsister aussi longtemps? Car il y a bien de la différence entre relever une maison qui tombe eu ruines et conserver autant de temps celle qui s'écroule de vétusté. Ne songez-vous donc point que le Seigneur a créé l'homme qui n'existait pas? A plus forte raison pourra-t-il le rendre à la vie. Nous avons encore une autre figure de la résurrection dans l'enlèvement d'Elie qui n'est pas encore mort. (IV Rois, II, 11.) Pour Dieu, tout se fait vite et facilement. « Il n'y a rien d'impossible à Dieu, » dit l'Evangéliste (Luc, I, 37); et le Prophète : « Tout ce qu'il a voulu, il l'a fait. » (Ps. CXIII, 11.) Le travail d'un artisan quelconque ne vous serait-il pas impossible? Néanmoins vous vous inclinez devant sa science. Et ainsi, tandis que vous consentez à vous soumettre , devant l'habileté de votre semblable, vous voulez contrôler les couvres de la sagesse du Seigneur, et pour ne pas les admettre, vous refusez un acte de foi. Quelle folie! « Je ne mourrai pas, mais je vivrai. » On peut, sans crainte de se tromper, entendre ces paroles dans le sens anagogique, car bien qu'elles aient été dites de la résurrection, « Je ne mourrai pas » signifiant que la mort n'est pas une mort véritable, elles veulent dire aussi dans une acception différente, « Je ne mourrai pas » d'une seconde mort. C'est dans ce dernier sens que le Christ disait : « Je suis la résurrection et la vie ; celui qui croit en moi, quand il serait mort, vivra, et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. » (Jean, XI, 25, 26.)

« Et je raconterai les oeuvres du Seigneur. » Voilà principalement en quoi consiste la vie Lover Dieu et annoncer à tous ses merveilles. De quelles oeuvres s'agit-il ici, je vous prie? De celles qui vont être rapportées : « Le Seigneur m'a châtié pour me corriger, mais il ne m'a point livré à la mort (l8). » Comme on voit apparaître les oeuvres admirables du Seigneur et l'utilité que nous en retirons ! David ne rend pas seulement grâces à Dieu de ce qu'il a été délivré, mais il regarde même sa chute comme un très-signalé bienfait et la tentation comme un avantage en disant : « Le Seigneur m'a châtié pour me corriger. » Car l'utilité de la tentation consiste en ce qu'elle nous rend meilleurs. Admirons la puissance de Dieu et le soin qu'il prend de nous. Il a permis que David fût accablé de maux, puis il l'a délivré, car, dit ce saint roi, « il ne m'a pas « livré à la mort. » Ou, selon la belle interprétation d'une autre version : « Il ne m'a pas « donné à la mort. » Paroles qui nous font bien voir que tout dépend de sa puissance. Et ainsi David a été sauvé deux fois, d'abord des maux du corps, et ensuite du péché. C'est pourquoi saint Paul disait aux Hébreux dans son épître: « Si vous n'êtes point châtiés, tous les autres l'ayant été, vous êtes donc des bâtards et non des enfants légitimes.» (Héb. XII, 8.) — « Ouvrez-moi les portes de la justice afin que j'y entre et que je rende grâces au Seigneur (l9). » Les portes s'ouvrent à ceux qui sont châtiés, qui déposent le fardeau de leurs péchés.

5. Celui qui a été châtié peut dire avec assurance, « ouvrez-moi les portes de la justice. » Il faut prendre ces paroles dans le sens anagogique et les entendre des portes du ciel qui demeurent fermées aux méchants et qui ne s'ouvrent qu'à la vertu , à l'aumône et à la justice. — « C'est là la porte du Seigneur, et les justes entreront par elle (20). » Il y a les portes de la mort, les portes de la perdition , et les portes de la vie, les portes étroites et difficiles. Comme il y a plusieurs portes, le Prophète fait connaître ce qui distingue la porte du Seigneur en ajoutant «C'est là la porte du Seigneur. » Les premières ne sont pas du Seigneur. Mais quelle est la marque de celle du Seigneur? — C'est qu'elle s'ouvre pour ceux qui sont châtiés et affligés, car elle est étroite et basse. Or, si elle est basse, ceux qui sont affligés et opprimés entrent par (164) elle, de même que celle qui mène à la mort est large et spacieuse. — « Je vous rendrai grâces de ce que vous m'avez exaucé et de ce que vous êtes devenu mon salut (21). » Le Psalmiste ne dit pas seulement à Dieu: « Vous m'avez exaucé ; » mais comme il avait été châtié et par là rendu meilleur, il lui rend grâces non-seulement d'avoir été exaucé, mais encore d'avoir été châtié : c'est en cela du reste qu'il a été exaucé et il ne pouvait assez en remercier le Seigneur. Car, comme je vous l'ai dit et comme je ne cesserai de vous le répéter, il n'y a pas d'oblation ni de sacrifice comparables à l'oblation et au sacrifice de l'action de grâces. — « La pierre qu'ont rejetée ceux qui ont bâti a été placée à la tête de l'angle (22).» Qu'il s'agisse ici du Christ, c'est évident pour tous. Car lui-même dans les Evangiles cite cette prophétie en se l'appliquant, quand il dit « N'avez-vous jamais lu que la pierre qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient a été placée à la tête de l'angle ? » (Matth. XXI, 42 ; Luc, XX,17.)

Si ces paroles paraissent sans liaison avec ce qui précède et si cette prophétie ne fait qu'interrompre le cours de notre histoire, ce n'est pas une nouveauté qui doive nous surprendre, parce que la plupart des prophéties de l'Ancien Testament sont énoncées de la sorte. — Car si elles n'eussent pas été ainsi voilées, les Livres saints auraient été détruits. Ainsi, quand il est question de la naissance de notre Sauveur, quoique la prophétie paraisse se rattacher à l'histoire dont il s'agissait alors, elle n'a rien néanmoins de commun avec elle, comme par exemple celle-ci: « Une vierge concevra et elle enfantera un fils à qui on donnera le nom d'Emmanuel, c'est-à-dire, Dieu avec nous. (Is. VII, 14; Math. I, 27.) La pierre qu'ont rejetée ceux qui bâtissaient. » — Par ceux qui bâtissaient on entend ici les Juifs, les docteurs de la loi, les scribes, les pharisiens, qui ont rejeté le Sauveur en disant: « Vous êtes un Samaritain, vous êtes possédé du démon. » (Jean, VIII, 48.) Et encore: « Cet homme n'est pas de Dieu, mais il séduit le peuple. » (Jean, VIII, 12.) Malgré cette réprobation il a pourtant été jugé digne de devenir la principale pierre de l'angle. C'est que toute pierre n'est pas propre à être placée dans les angles: mais il faut pour cela des pierres de choix, capables de relier ensemble les deux côtés. Les paroles du Prophète peuvent donc s'interpréter ainsi : Celui que les Juifs ont rejeté avec mépris a paru tellement admirable que non-seulement il a pu tenir sa place dans l'édifice, mais que même il a servi à relier les deux murs. Et quels sont ces deux murs? — Les Juifs et ceux qui croyaient d'entre les Gentils, selon ce mot de saint Paul : « Car c'est lui qui est notre paix, qui des deux peuples (du Juif et du Gentil) n'en a fait qu'un, qui a rompu en sa chair la muraille de séparation, cette inimitié qui les divisait, et qui par sa doctrine a aboli la loi de préceptes, afin de former en soi-même un seul homme nouveau de ces deux peuples. » (Eph. II, 14, 15.) Et encore : « Vous êtes édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes en Jésus-Christ, qui est la principale pierre de l'angle. » (Ibid. 20.)

Dans ce qui précède, ce sont les Juifs surtout qui sont en cause, eux qui, voulant construire, n'ont pas su discerner la pierre convenable, mais qui ont rejeté, au contraire, comme défectueuse, celle qui pouvait faire la solidité de l'édifice. Maintenant, si nous voulons savoir de Notre-Seigneur lui-même quels sont ces deux murs, écoutons-le nous dire: « J'ai encore d'autres brebis quine sont pas de cette bergerie et il faut que je les amène. Elles entendront ma voix et il n'y aura qu'un troupeau et qu'un pasteur. » (Jean, X, 16.) Ce fait avait été figuré bien des siècles auparavant dans la personne d'Abraham qui fut le père de ces deux peuples, à savoir, les circoncis et les incirconcis. Mais encore une fois, ce n'était que la figure, nous avons la réalité dans Notre-Seigneur qui « est devenu la principale pierre de l'angle, » en réunissant ces deux nations. — « C'est le Seigneur qui a fait cette pierre (23).» Qu'est-ce à dire : « C'est le Seigneur qui a fait cette pierre? » C'est que ce qui a été exécuté était au-dessus des hommes, et il n'était au pouvoir d'aucun d'eux, pas plus qu'au pouvoir' des anges et des archanges de former un pareil angle. Nul ne peut opérer ce prodige, fût-il juste, prophète, ange ou archange ; à Dieu seul était réservée cette oeuvre admirable, elle est de son domaine exclusif. Une autre version porte: « C'est le Seigneur qui a fait cela. » C'est-à-dire cette oeuvre admirable qui surpasse tout ce qu'on peut imaginer, l'œuvre de L'angle. « Et c'est ce qui paraît à nos yeux digne d'admiration. » Qu'est-ce qui paraît admirable? — l'angle, la réunion de ces deux peuples en une mètre religion. Parmi les Juifs (165) il y eut plusieurs myriades de croyants: les apôtres avaient été pris parmi eux. Le Psalmiste a eu bien raison de dire : « A nos yeux.» Car ce prodige ne brille pas à tous les regards. Qui ne serait étonné, ravi, en songeant que le Christ fut adoré là même où il avait été crucifié et que ceux qui le crucifièrent sont dans l'ignominie, tandis que ses adorateurs sont couverts de gloire ? Sa parole se répandit dans tout l'univers, ralliant tous les hommes à la vérité. C'est donc quelque chose d'admirable pour tous, à quelque point de vue qu'on se place, mais surtout et avec beaucoup plus d'évidence pour ceux qui croient, comme le marquent ces mots: « A nos yeux. C'est ici le jour que le Seigneur a fait: réjouissons-nous, et soyons pleins d'allégresse (24). » Le mot jour doit s'entendre ici non du cours périodique du soleil, mais des choses merveilleuses qui ont été accomplies. Car, de même qu'on dit d'un jour qu'il est mauvais, en faisant allusion, non à la marche du soleil, mais aux malheurs arrivés dans ce temps, ainsi on appelle bon le jour où il s'est passé de belles choses. Les paroles du Psalmiste peuvent donc se traduire ainsi: C'est Dieu qui a fait les choses admirables accomplies en ce jour, car sa main seule était capable de les réaliser.

6. Y a-t-il rien qui soit comparable à ce jour? C'est à pareil jour, en effet, qu'a eu lieu la réconciliation de Dieu avec les hommes; alors l'antique guerre a été terminée, et la terre a envahi le ciel, et les hommes indignes de la terre ont paru dignes du royaume céleste, et les prémices de notre nature ont été élevées au-dessus des cieux, et le paradis a été ouvert, et nous avons recouvré notre ancienne patrie, et la malédiction a été abolie, et le péché a été détruit, et ceux qui avaient été punis par la loi ont été sauvés sans la loi, et la terre entière et la mer ont reconnu leur souverain, sans parler d'autres prodiges innombrables que notre discours ne suffirait pas à énumérer. Aussi le Prophète, après avoir repassé dans son esprit ces merveilles, les attribue toutes à Dieu, montrant que ce qui a été fait, a été fait par Dieu. « Réjouissons-nous en ce jour et soyons pleins d'allégresse.» Il s'agit ici d'une joie spirituelle, joie de l’esprit, joie de l'âme. « Réjouissons-nous en ce jour et soyons pleins d'allégresse » d'avoir été mis en possession de si grands biens. C'est la marque d'une grande vertu de se réjouir du bien, d'en tressaillir, d'en être rempli d'allégresse, de recevoir avec plaisir les bienfaits de Dieu. « O Seigneur, conservez, je vous en « prie; ô Seigneur, faites prospérer le règne « de votre Christ, je vous en prie. » En voyant la prospérité de la terre, les changements et les transformations heureuses qui s'accomplissaient, le Psalmiste félicite ceux qui en sont l'objet et il s'écrie : « O Seigneur, conservez, je vous en prie, ô Seigneur, faites prospérer le règne de votre Christ, je vous en prie. » C'est-à-dire, conservez ceux qui jouissent, et pour que leurs désirs soient accomplis et qu'ils produisent des fruits dignes de votre grâce, rendez-leur la voie facile, afin qu'après être arrivés au terme de leurs désirs, ils ne se séparent plus de tels biens. « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur (26) ! » C'est que nos biens ne consistent pas seulement dans ce qui a été fait, mais ils nous conduisent à d'autres biens, infiniment supérieurs : la résurrection, la vie éternelle , l'héritage avec le Christ; toutes choses que le Psalmiste veut faire entendre par ces paroles : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » Notre Sauveur a dit la même chose aux Juifs : « En vérité, en vérité je vous le dis, vous ne me verrez plus jusqu'à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ? » (Matt. XXIII, 39.) En effet, comme ils lui jetaient à la face, à tout propos, qu'il n'était pas de Dieu, qu'il était l'ennemi de Dieu, il leur dit : Vous me rendrez vous-mêmes témoignage que je ne suis pas l'ennemi de Dieu, quand vous m'aurez vu venir, sur les nues et que vous vous serez écriés : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Paroles admirables et pleines de louanges qui rendront les Juifs inexcusables; car les événements qui s'accompliront alors apporteront une telle lumière qu'ils arracheront ce cri qui sera tout à la fois, et la glorification de Dieu et l'accusation la plus terrible contre ceux qui le proféreront. « Nous vous  bénissons de la maison du Seigneur. Le Seigneur est le vrai Dieu et il a fait paraître sa lumière sur nous (27). » Il est question ici de tout le peuple fidèle qui a trouvé la bénédiction dans la maison du Seigneur. Partout on entend les prophètes appeler bienheureux ceux qui croiront. Pourquoi les bénédictions dont il s'agit ici et d'où vient ce bonheur? C'est que « le Sauveur nous est apparu. La grâce de Dieu notre Sauveur a paru, (166) tel et elle nous a appris que renonçant à l'impiété et aux passions mondaines, nous devons vivre avec tempérance, avec justice et avec piété, étant toujours dans l'attente de la béatitude que nous espérons et de l'avènement du grand Dieu et notre Sauveur, Jésus-Christ. » (Tit. II,11, 12, 13.) Le Psalmiste admire ici les bienfaits de l'Incarnation, dans laquelle Notre-Seigneur a paru parmi nous, bien qu'il fût Dieu, et de la substance divine. Il a voulu dire qu'il était apparu, qu'il s'était revêtu de notre chair, qu'il avait passé par le sein d'une vierge, qu'il s'était fait homme et qu'il avait habité parmi nous. C'est pourquoi il s'est écrié : « Nous vous bénissons » de nous avoir octroyé nu tel bienfait. C'est ce que voulait faire entendre le Christ, quand il disait : « Beaucoup de prophètes et de justes ont souhaité de voir ce que vous voyez et ne l'ont point vu, et d'entendre ce que vous entendez et ne l'ont pas entendu.» (Matt. XIII,17.) «Rendez ce jour solennel en couvrant de branches tous ces lieux, jusqu'à la corne de l'autel. » Une autre version porte : « Rassemblez des branches nombreuses pour orner le lieu de vos réunions. » Et une troisième : « Sacrifiez en ce jour de fête des victimes choisies.» Nous passons ainsi de la prophétie à l'histoire. C'est comme si le Psalmiste disait : « Mettez-vous en fête , rassemblez-vous en grand nombre. » Mais qu'est-ce à dire : « Rendez ce jour solennel en couvrant de branches tous les lieux? » Ou bien, selon un autre interprète : « Sacrifiez des victimes choisies ? » Ou bien encore : « Ornez le temple de bran« ches et de couronnes? » On pourrait lire dans l'hébreu : « Esrou ag baad oth thim. » « Amenez l'agneau au milieu des branches touffues, jusqu'aux cornes de l’autel. » Mais quel que soit le sens qu'on adopte, il est question d'une fête, d'un jour de joie, d'une assemblée nombreuse. Et c'est ainsi qu'après avoir parlé de choses spirituelles, le Psalmiste revient aux objets matériels et rappelle leur retour. « Vous êtes mon Dieu et je vous rendrai mes actions de grâces ; vous êtes mon Dieu et je vous exalterai. Je vous rendrai grâce de ce que vous m'avez exaucé et de ce que vous êtes devenu mon salut (28). » David montre ici qu'il faut remercier Dieu, alors même qu'on n'en a reçu aucun bienfait, et qu'on doit le combler d'honneur et de gloire à cause de sa majesté, à cause de sa nature, à cause de sa gloire ineffable. C'est le sens de ces dernières paroles placées après l'énumération des bienfaits qu'il a répandus avec profusion sur ses enfants, et il semble nous crier à tous: Même sans ces bienfaits, je serais reconnaissant et je rendrais grâces d'avoir au Seigneur si grand, si élevé, qu'il ne peut être ni vu ni compris. Car ici, «exalter» signifie glorifier. «Louez le Seigneur parce qu'il est bon, parce que sa miséricorde s'étend dans tous les siècles (29).» Ce n'est point assez pour le Psalmiste d'offrir lui-même ce sacrifice de louanges, mais il appelle tous les hommes afin qu'ils s'unissent à lui pour prendre part à sa reconnaissance et à ses actions de grâces. Et il chante la bonté de Dieu, célébrant sa perpétuité et sa grandeur. Maintenant que nous sommes instruits de ces choses, soyons fidèles, nous aussi, à rendre continuellement nos actions de grâces à ce Dieu bon, à lui offrir ce sacrifice de louanges, afin de mériter les biens futurs, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui soit la gloire, avec le Père et le Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il !

 

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