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religieux de Moutier-Grandval intéressés
pat l'histoire de leur toute nouvelle possession. Or, une autre hypothèse se présente au
sujet de la naissance de cette Vita quand, du contexte litigieux qui s'établit
visiblement entre Bâle et Lausanne dès le début du XIe siècle au sujet de Saint-Imier,
on rapproche le soin que met notre texte à souligner que l'établissement du saint dans
le val de la Suze résultait d'une concession accordée par «l'Eglise de Lausanne et ses
recteurs», allant même jusqu'à préciser le montant des redevances porté par l'acte.
Ce rapprochement troublant accrédite, on en conviendra, l'hypothèse que la Vita Himerii
est une pièce fabriquée par les Lausannois contre les prétentions bâloises, entre la
fin du Xe siècle et le début du XIIe siècle, terminus adquem imposé par le plus ancien
manuscrit conservé de ce texte. Quant à la date du IXe siècle précédemment
attribuée, il n'y a pas à voir autre chose qu'un terminus post quem, les quelques mots
ou formules caractéristiques de cette époque, sur lesquels, seuls, reposait cette
datation, pouvant s'être naturellement perpétués dans l'usage un siècle ou deux.
Ainsi située, cette pièce, qui s'apparente finalement beaucoup à la Vita perdue de
saint Ursanne, par sa date et les motivations défensives de ses auteurs face aux
prétentions bâloises, n'est donc qu'un exemple de plus du recours aux procédés
classiques de l'hagiographie pour expliquer la présence de reliques en un lieu donné --
ici Saint-Imier -- à une époque où l'on ignorait tout de leur origine. Aussi, pour
déterminer ces origines, tant celle des
reliques que celle du lieu, la plus élémentaire prudence commande-t-elle de faire
abstraction de cette Vita. Laissons ici de côté, comme annexe dans une approche du Jura
monastique, le problème de l'origine des reliques: comme pour saint Ursanne. il
demanderait une étude détaillée de la diffusion du culte rendu à saint Himier et à
divers saints homonymes, à Lugnez, en particulier, où la Vita Himerii voit la patrie de
son héros, et où un culte de saint Himier est bien présent, mais depuis quand? Revenons
plutôt au problème de l'origine du lieu de Saint-Imier. Renonçant à la fable du pieux
ermite venu christianiser la vallée de la Sure entre 600 et 800, force est de revenir à
notre constatation initiale: 884 marque non seulement l'entrée de Saint-Imier dans |
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