EXORDE D'UN SERMON
POUR
LA FÊTE DE L'ANNONCIATION.
At ubi venit plenitudo temporis, misit Deus Filium
sinon, factum ex muliere.
Quand le temps a été accompli, Dieu a envoyé son Fils, fait
d'une femme. Gal., IV, 4.
Comme Dieu est riche en bontés,
il est magnifique en présents. Il a aimé le genre humain, et son amour libéral
s'est signalé par ses dons. Mais un Dieu ne doit rien donner qui ne soit digne
de lui ; c'est pourquoi il a résolu de ne nous rien donner de moins que
lui-même. C'est ce qui fait voir aujourd'hui au monde cette merveille inouïe, ce
miracle incompréhensible et qui étonne toute la nature, un Dieu fait homme ; et
l'Apôtre nous représente cet excès d'amour par les premiers mots de mon texte :
« Dieu a envoyé son Fils : » Misit Deus Filium suum.
Mais, Messieurs, il ne suffit
pas qu'un Dieu se donne, il faut encore qu'on le reçoive ; sans quoi le don
serait inutile et le mystère imparfait. Aussi s'est-il préparé lui-même les plus
pures entrailles du monde, et une Vierge incomparable le doit recevoir,
non-seulement pour elle, mais pour nous tous et au nom de tout le genre humain.
Tellement que pour accomplir le dessein de Dieu, il ne fallait pas seulement
qu'il vînt au monde, mais il fallait encore (a) qu'il y prît naissance ;
et c'est pour cela que le même Apôtre après avoir dit, comme j'ai déjà remarqué,
que « Dieu nous a envoyé son Fils, (b) » ajoute pour nous faire entendre
le mystère entier, qu'il a été fait d'une femme; » factum ex muliere.
Voilà (c) donc en quoi
consiste, si je ne me trompe, tout le mystère de ce jour sacré; et vous en avez
l'abrégé en ces deux mots : un Dieu donné, un Dieu reçu (d). Dieu se
donne à nous en la personne du Verbe incarné ; tous ensemble nous le recevons en
la
(a) Var. : Mais encore. — (b) Note
marg. : Misit Deus Filium suum. — (c) Var. : Voici. — (d)
Tout le mystère de ce jour : un Dieu donné, un Dieu reçu.
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personne de la sainte Vierge, qui ne le reçoit que pour
nous. Ainsi nous avons deux choses à considérer : en Jésus le présent divin (a),
en Marie la respectueuse acceptation (b); en Jésus la bonté qui se
communique, en Marie la disposition pour s'en rendre digne; en Jésus de quelle
manière Dieu se donne à nous, en Marie ce qu'il nous faut faire pour le
recevoir. Et c'est à ces deux points principaux que je réduirai, pour n'être pas
long, toute l'économie de ce discours.
(a) Var. : Charitable. — (b) En Jésus
le présent, en Marie l'acceptation.
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