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QUATRIÈME FRAGMENT :
SUR L'EUCHARISTIE.

 

Fragments relatifs
à l’Exposition de l’Eucharistie : I .

 

 

I. — Réflexions préliminaires de l'auteur sur les fragments suivants.

II — Règle générale pour découvrir les mystères de la foi. Application de cette règle à l'Ecriture sainte.

III. — Malheurs de ceux qui veulent écouter les raisonnements humains dans les mystères de Dieu, et dans l'explication de son Ecriture.

IV. — Contradictions des prétendus réformés et de l'Anonyme en particulier. Avantages qu'il donne aux sociniens.

V. — Conséquences de ce discours : le premier principe qu'il faut poser  pour entendre l'Ecriture sainte, c'est qu'il n'y a rien qu'il ne faille croire quand Dieu a parlé.

VI. — Application de ce principe au mystère de l'Eucharistie.

VII — Intention de Jésus-Christ dans l'institution de l'Eucharistie. La loi des sacrifices.

VIII. — Abus que l'Anonyme fait de cette parole de Jésus-Christ mourant : Tout est consommé.

 

 

I. — Réflexions préliminaires de l'auteur sur les fragments suivants.

 

Il y a deux endroits de l'Exposition où je me suis plus étendu que je n'avais fait dans les autres : l'un où il s'agit de la présence réelle, l'autre où il s'agit de l'autorité de l'Eglise. L'auteur de la réponse, qui ne veut pas prendre la peine de considérer mon dessein et qui ne tâche que d'en tirer quelque avantage, sans se soucier d'en expliquer les motifs, conclut de là que j'ai été fort embarrassé sur tous les autres sujets; et que m'étant trouvé plus au large sur ceux-ci, j'ai donné plus de liberté à mon style. Qu'il croie, à la bonne heure, que les matières les plus importantes de nos controverses soient aussi celles où nous nous sentons les plus forts et les mieux fondés. Mais il ne fallait pas dissimuler que la véritable raison qui m'a obligé à traiter plus amplement celles-ci, c'est qu'ayant examiné la doctrine des prétendus réformés sur ces deux articles, j'ai trouvé qu'ils n'avaient pu s'empêcher de laisser dans leur catéchisme ou dans d'autres actes aussi authentiques de leurs églises, des impressions manifestes de la sainte doctrine qu'ils avaient quittée. J'ai cru que la divine Providence l'avait permis de la sorte pour abréger les disputes. En effet comme parmi toutes nos controverses la matière de la présence réelle est sans doute la plus difficile par son objet, et que celle de l'Eglise est la plus importante par ses conséquences, c'est principalement sur ces deux articles que nous avons à désirer de faciliter le retour à nos adversaires : et nous regardons comme une grâce singulière que Dieu fait à son Eglise d'avoir voulu que, sur deux points si nécessaires, ses enfants qui se sont retirés de son unité trouvassent dans leur croyance des principes qui les ramènent à la nôtre. C'est pour leur conserver cet avantage que je leur ai

 

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remis devant les yeux leur propre doctrine, après leur avoir exposé la nôtre. Mais pour le faire plus utilement, je ne me suis pas contenté de remarquer les vérités qu'ils nous accordent; j'ai Toula marquer les raisons par lesquelles ils sont conduits à les reconnaître, afin qu'on comprenne mieux que c'est la force de la vérité qui les oblige à nous avouer des choses si considérables, et qui semblaient si éloignées de leur premier plan.

C'est pour cela que j'ai proposé, dans l'exposition de ces deux articles, quelques-uns des principaux fondements sur lesquels la doctrine catholique est appuyée. On y peut remarquer certains principes de notre doctrine, dont l'évidence n'a pas permis à nos adversaires eux-mêmes de les abandonner tout à fait, quelque dessein qu'ils aient eu de les contredire : et les réponses de notre auteur achèveront de faire voir qu'il est absolument impossible que ceux de sa communion disent rien de clair ni de suivi, lorsqu'ils exposent leur croyance sur ces deux points.

Nous parlerons dans la suite de ce qui regarde l'Eglise; maintenant il s'agit de considérer la présence réelle du corps et du sang de Jésus-Christ dans l'Eucharistie. Il ne s'agit donc pas encore de savoir si le corps est avec le pain, ou si le pain est changé au corps; cette difficulté aura son article à part : mais il est important, pour ne rien confondre, de regarder séparément la matière de la présence réelle, sans parler encore des difficultés particulières que les prétendus réformés trouvent dans la transsubstantiation.

J'entreprends donc de faire voir qu'après les réponses de notre auteur, on doit tenir pour certain que la doctrine des prétendus réformés n'est pas une doctrine suivie; qu'elle se dément elle-naême; et que, plus ils tentent de s'expliquer, plus leurs détours et leurs contradictions deviennent visibles.

On verra au contraire en même temps que la doctrine catholique se soutient partout; et que si d'un côté elle se met fort peu eu peine de s'accorder avec la raison humaine et avec les sens, de l'autre elle s'accorde parfaitement avec elle-même et avec les grands principes du christianisme, dont personne ne peut disconvenir.

 

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II — Règle générale pour découvrir les mystères de la foi. Application de cette règle à l'Ecriture sainte.

 

Il y a ici deux choses à considérer : 1° la règle générale qu'il faut suivre pour découvrir les mystères de la religion chrétienne; 2° ce qui touche en particulier celui de l'Eucharistie. On verra dans l'une et dans l'autre de ces deux choses, combien les sentiments de l'Eglise catholique sont droits, et combien sont étranges les contradictions des prétendus réformés.

La règle générale pour découvrir les mystères de notre foi, c'est d'oublier entièrement les difficultés qui naissent de la raison humaine et des sens, pour appliquer toute l'attention de l'esprit à écouter ce que Dieu nous a révélé avec une ferme volonté de le recevoir, quelque étrange et quelque incroyable qu'il nous paraisse.

Ainsi pour se rendre propre à entendre l'Ecriture sainte, il fout avoir tout à fait imposé silence au sens humain, et ne se servir de sa raison que pour remarquer attentivement ce que Dieu nous dit dans ce divin Livre.

En effet il n'y a jamais que deux sortes d'examen à faire dans la lecture d'un livre : l'un, pour entendre le sens de l'auteur; l'autre, pour considérer s'il a raison et juger du fond de la chose. Mais comme ce dernier examen cesse tout à fait lorsqu'on voit certainement que Dieu a parlé, la raison ne doit plus servir de rien que pour bien entendre ce qu'il veut dire.

Il est même vrai généralement de tous les livres que lorsqu'il ne s'agit que d'en concevoir le sens, il faut se servir de son esprit pour recueillir simplement sans aucune discussion du fond, ce qui résulte de la suite du discours. Les livres qui sont dictés par le Saint-Esprit ne doivent pas être lus avec moins de simplicité ; et nous devons au contraire nous attacher d'autant plus à recueillir ce qu'ils portent sans y mêler nos raisonnements, que nous sommes très-assurés que la vérité y est toute pure.

Que si nous trouvons quelque obscurité dans les paroles de l'Ecriture, ou que le sens nous en paraisse douteux, alors comme l'Ecriture a été donnée pour être entendue, et qu'en effet elle l'a

 

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été, il n'y aurait rien de plus raisonnable que de voir de quelle manière elle a été prise par nos pères : car nous verrons en son lieu que le sens qui a d'abord frappé les esprits et qui s'est toujours conservé, doit être le véritable. Mais d'appeler la raison pour rejeter ou pour recevoir une certaine interprétation, selon que la chose qu'elle contient paraîtra ou plus ou moins raisonnable à l'esprit humain, c'est anéantir l'Ecriture, c'est en détruire tout à fait l'autorité.

 

III. — Malheurs de ceux qui veulent écouter les raisonnements humains dans les mystères de Dieu, et dans l'explication de son Ecriture.

 

Aussi voit-on par expérience que si peu qu'on veuille écouter les raisonnements humains dans les mystères de Dieu et dans l'explication de son Ecriture, on tombe dans l'un de ces deux malheurs, ou que la foi en l'Ecriture s'affaiblit, ou qu'on en force le sens par des interprétations violentes.

Tant d'infidèles, qu'on voit répandus même dans le milieu du christianisme, sont tombés dans ce premier malheur : et les égarements effroyables des sociniens sont l'exemple le plus visible du second. Ces hérétiques et les infidèles conviennent dans cette pensée : c'est Dieu qui a donné la raison à l'homme, il faut donc que l'Ecriture s'accorde avec la raison humaine, ou l'Ecriture n'est pas véritable. Mais après avoir marché ensemble jusque-là, l'endroit où ils commencent à se séparer, c'est que les uns ne pouvant accommoder l'Ecriture sainte à ce qu'ils se sont imaginés être raisonnable, l'abandonnent ouvertement; et les autres la tordent avec violence, pour la faire venir malgré elle à ce qu'ils pensent.

Ainsi ces derniers posant pour principe que la raison ne peut souffrir ni la Trinité, ni l'Incarnation, ils concluent que les passages où toute l'Eglise a cru voir ces vérités établies, ne peuvent pas avoir le sens qu'elle y donne, parce que ces choses, disent-ils, sont impossibles ; et ensuite ils tournent tous leurs efforts à imaginer dans l'Ecriture un sens qui s'accorde avec leurs pensées.

Il n'y a personne qui ne voie que ce n'est pas écouter l'Ecriture sainte que de la lire dans cet esprit; et qu'au contraire s'il fallait

 

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suivre cette méthode pour l'interpréter, il n'y aurait presque aucun livre qui fût plus mal entendu que celui-là, ni expliqué de plus mauvaise foi. Car lorsqu'on examine les livres et les auteurs ordinaires, par exemple Cicéron ou Pline, il n'arrivera pas, si peu qu'on soit raisonnable, qu'on se mette dans l'esprit un certain sens qu'on veuille nécessairement y trouver ; mais on est prêt à recevoir celui qui sort pour ainsi dire des expressions et de la suite du discours. Au contraire si on lit l'Ecriture sainte selon la méthode des sociniens, on viendra à cette lecture avec certaines idées qui ne sont point prises dans ce livre, auxquelles on voudra toutefois que ce livre s'accommode pour ainsi dire malgré qu'il en ait. Ces téméraires chrétiens ne sont pas moins opposés à l'autorité de l'Ecriture que les infidèles déclarés, puisque nous les voyons enfin recourir, aussi bien que les infidèles, à la raison et au sens humain comme à la première règle et au souverain tribunal.

Il ne faut donc pas écouter ces dangereux interprètes de l'Ecriture, qui n'y veulent rien trouver qui ne contente la raison humaine, sous prétexte que c'est Dieu qui nous l'a donnée. Il est vrai, Dieu nous l'a donnée pour notre conduite ordinaire; mais il a voulu que la connaissance des mystères de la religion vînt d'une lumière plus haute, dont nous ne serons jamais éclairés si nous ne soumettons toute autre lumière à ses règles invariables.

Ce n'est pas que la droite raison soit jamais contraire à la foi ; mais il n'a pas plu à Dieu que nous sussions toujours le moyen de les accorder ensemble. Il faut avoir pénétré le fond des conseils de Dieu pour faire parfaitement cet accord : et il dépend de l'entière compréhension de la vérité, que Dieu nous a réservée pour la vie future. En attendant, nous devons marcher sous la conduite de la foi, dans les mystères divins et surnaturels; nous y appellerons la raison seulement pour écouter ce que Dieu dit et faire qu'elle s'y accorde, non en contentant ses pensées, mais en les faisant céder à l'autorité de Dieu qui nous parle.

 

IV. — Contradictions des prétendus réformés et de l'Anonyme en particulier. Avantages qu'il donne aux sociniens.

 

Messieurs delà religion prétendue réformée demanderont peut-être

 

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en ce lieu d'où vient le soin que je prends d'éclaircir une vérité , dont ils sont d'accord avec nous. En effet aucune raison ne les a pu empêcher de confesser la Trinité, l'Incarnation et le Péché originel, et tant d'autres articles de la religion, qui choquent si fort le sens humain : et pour venir à celui que nous traitons, il est vrai qu'après avoir exposé dans leur Confession de foi « que Jésus-Christ nous y nourrit de la propre substance de son corps et de son sang, ils ajoutent que ce mystère surpasse en sa hautesse la mesure de notre sens, et tout ordre de nature ; » et enfin a qu'étant céleste il ne peut être appréhendé c'est-à-dire conçu que par la foi (1)… »

Il (l'Anonyme) avait dit auparavant, a qu'il ne s'agit pas ici de savoir si Jésus-Christ est véritable, ou s'il est puissant pour faire ce qu'il dit ; ce serait la dernière impiété que de balancer un moment sur l'un et sur l'autre ; il s'agit uniquement du sens de ce qu'il dit (2) » Et encore, dans un autre endroit : « Il ne s'agit nullement de ce que Dieu peut, car Dieu peut tout ce qu'il veut, mais du sens de ses paroles seulement : il faut s'attacher à sa volonté, qui est la seule règle de notre créance, aussi bien que celle de nos actions. S'il est vrai qu'il s'agisse du sens de ses paroles seulement (3) ; » si c'est là uniquement ce que nous avons à considérer, nous n'avons plus à nous mettre en peine de rechercher par des principes de philosophie, si Dieu peut faire qu'un corps soit en divers lieux, ou qu'il y soit sans son étendue naturelle, ou que ce qui paraît pain à nos sens soit en effet le corps de Notre-Seigneur. Car si on nous peut forcer d'entrer dans ces discussions, si l'intelligence des paroles de Notre-Seigneur dépend nécessairement de la résolution de semblables difficultés, nous sortons de l’état où l'auteur nous avait mis, et le sens des paroles de Notre-Seigneur n'est plus seulement et uniquement ce que nous avons à considérer.

Mais qu'il est difficile à l'esprit humain de se captiver entièrement sous l'obéissance de la foi. Ceux qui disent que ce mystère passe en sa hauteur toute la mesure du sens humain, veulent néanmoins nous assujettir à résoudre les difficultés que

 

1 Art XXXVI. — 2 Anon., p. 259. — 3 Ibid. p. 254.

 

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le sens humain nous propose. Notre auteur, qui donne pour règle que nous avons à considérer seulement et uniquement le sens des paroles de Jésus-Christ, abandonne dans l'application ce qu'il a posé en général, et rend une règle si nécessaire absolument inutile.

Une si étrange contradiction se peut remarquer en moins de deux pages. Il approuve ce que j'avais dit que pour entendre les paroles de Notre-Seigneur, nous n'avions à considérer que son intention. « C'est, dit-il, un bon principe, pourvu qu'il soit bien prouvé; car Jésus-Christ peut tout ce qu'il veut, et tout ce qui veut se fait comme il veut (1). » Il semble, selon ces paroles, que nous sommes tout à fait délivrés des raisonnements humains sur la possibilité du mystère dont il s'agit. Mais il ne faut que tourner la page ; nous nous trouverons rengagés plus que jamais dans ces dangereuses subtilités. « Il ne s'agit pas, dit-il, si Dieu peut la chose, mais si la chose est possible en elle-même, ou si elle n'implique pas contradiction (2). » Si après nous être appliqués à connaître la volonté de Dieu par sa parole sur l'accomplissement de quelque mystère, par exemple sur celui du Verbe incarné, il nous faut encore essuyer une discussion de métaphysique sur la possibilité de la chose en elle-même, c'est justement ce que demandent les sociniens. Et certes il ne suffit pas de se plaindre, comme fait l'auteur, que l'on compare ceux de son parti à ces hérétiques. Il ferait bien mieux de considérer s'il ne favorise pas, sans y penser, leurs erreurs, et s'il ne les aide pas à introduire la raison humaine dans les questions de la foi. En effet que prétend l'auteur, lorsqu'il veut que dans les mystères de la religion on vienne à examiner si la chose est possible en elle-même, ou si elle n'implique pas contradiction? Faudra-t-il que le chrétien, après qu'il a recherché dans les Ecritures ce qui nous y est enseigné sur la personne de Notre-Seigneur, s'il trouve que cette Ecriture nous fait entendre qu'il est Dieu et homme, tienne toutefois ce sens en suspens jusqu'à ce qu'en examinant si la chose est possible en elle-même, il ait trouvé le moyen de contenter sa raison humaine? C'est donner gain de cause aux sociniens, et renverser manifestement

 

1 Anon., p. 179. — 2 Ibid. p. 180.

 

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l’autorité de l'Ecriture. Il faut donc savoir établir la foi par des principes plus fermes, et apprendre au chrétien qu'il trouve tout ensemble par un seul et même moyen et la possibilité et l'effet, quand il montre dans l'Ecriture ce que Dieu veut et ce qu'il dit. Ainsi le sens de cette Ecriture doit être fixé immuablement, sans avoir égard aux raisons que l'esprit humain peut imaginer sur la possibilité de la chose. On pourra entrer après, si l'on veut, dans «cette discussion; et une telle discussion sera regardée peut-être comme un honnête exercice de l'esprit humain. Mais cependant la foi des mystères et l'intelligence de l'Ecriture sera établie indépendamment de cette recherche.

Ce principe fait voir clairement que tout ce que l'esprit humain peut imaginer sur l'impossibilité du mystère de la Trinité, ou sur celui de l'Incarnation, ou sur la présence réelle, ne doit pas même être écouté, quand il s'agit d'établir la foi : si nous sommes solidement chrétiens, tout cela n'aura aucun poids pour nous porter à un sens plutôt qu'à un autre, ni au figuré plutôt qu'au littéral. Et il faut uniquement considérer à quoi nous portera l'Ecriture même.

Cependant quoique notre auteur convienne avec nous de ce principe, et que lui-même nous donne pour règle que nous avons à considérer seulement et uniquement le sens des paroles de Jésus-Christ, il ne craint pas toutefois d'embarrasser son esprit de cette discussion, si la chose est possible en elle-même; et ensuite il fait valoir contre nous tous les arguments de philosophie qu'on oppose à notre croyance. Tant il est vrai que le sens humain nous entraîne insensiblement à ses pensées, et affaiblit dans l'application les principes dont la vérité nous avait touchés d'abord.

En effet l'auteur s'était proposé de nous expliquer les raisons qui le déterminent au sens figuré, et il les voulait trouver dans l'Ecriture, « Qu'y a-t-il de plus naturel et de plus raisonnable, dit-il, que d'entendre l'Ecriture sainte par elle-même (1)? » Il rapporte après, entre autres passages, ceux qui disent que Jésus-Christ est monté aux cieux ; et enfin il conclut ainsi : « Il est

 

1 Anon., p. 175.

 

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donc naturel de prendre ces paroles : Ceci est mon corps dans un sens mystique et figuré, qui s'accommode seul parfaitement avec tous les autres passages de l'Ecriture (1).» Mais il n'a pas voulu remarquer que ces passages ne concluraient rien contre nous, « n'y avait mêlé, pour les soutenir, cette raison purement humaine d’être au ciel corporellement et sur la terre par représentation ne sont pas, dit-il, deux sens opposés : mais n'être plus avec nous, ou être corporellement dans le ciel, et ne laisser pas d'être à toute heure entre les mains des hommes, sont deux terni contradictoires et incompatibles (2). » On voit que pour tirer quelque chose des passages de l'Ecriture, qui disent que Jésus-Christ est au ciel, il est obligé de supposer qu'il n'est pas possible à Dieu de faire qu'un même corps soit en même temps en divers lieux. C'est ce que ni lui ni les siens n'ont pas même prétendu prouver par aucun passage de l'Ecriture : c'est donc une opposition qui naît purement de l'esprit humain, à qui ils nous avaient promis d'imposer silence.

Tel est le procédé ordinaire des prétendus réformés. Ils nom promettent toujours d'expliquer l'Ecriture par l'Ecriture, et d'exclure par cette méthode le sens littéral que nous embrassons : mais on voit dans l'exécution que le raisonnement humain prévaut toujours dans leur esprit : et on peut voir aisément que l'attachement invincible qu'ils y ont les porte insensiblement au sens figuré.

En effet nous voyons sans cesse revenir ces raisons humaines. L'auteur avait exposé les raisons tirées a de la nature des sacrements et du style de l'Ecriture. Ces raisons suffisent,» dit-il (3). Et ce sont certainement les seules qu'il faut apporter, parce que ce sont les seules qui semblent tirées des principes du christianisme. Mais quoique nos adversaires disent que ces preuves suffisent, il faut bien qu'ils ne se fient pas tout à fait à de telles preuves qu'il nous est aisé de détruire, puisqu'ils y joignent aussitôt, pour les soutenir, des arguments de philosophie. « On pourrait ajouter ici, dit notre auteur, plusieurs autres raisons du fond, pour montrer que le dogme de la présence réelle n'est pas seulement au-dessus

 

1 Anon., p. 176. — 2 Ibid. — 3 Ibid. 178.

 

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delà raison, comme les mystères delà Trinité et de l'Incarnation, mais directement contre la raison (1). » Il est vrai qu'il n'étend pas ces raisonnements, pour « ne pas entrer trop avant dans la question, » comme il dit lui-même. Il montre toutefois l'état qu'il en fait, lorsqu'il les appelle les raisons du fond. Mais voyons à quoi elles tendent. Est-ce que toutes les fois que quelqu'un objectera qu'un point de la foi n'est pas seulement au-dessus de la raison, mais directement contre la raison, il faudra entrer avec lui dans cet examen? Si cela est, les Sociniens ont gagné leur cause ; nous ne pouvons plus empêcher que ces dangereux hérétiques ne réduisent les questions de la foi à des subtilités de philosophie, et qu’ils n'en fassent dépendre l'explication de l'Ecriture. Car ils prétendent que la Trinité et l'Incarnation ne sont pas seulement au-dessus de la raison, mais directement contre la raison. Ils ont tort, direz-vous, de le prétendre. Ils ont tort, je l'avoue; mais il faut connaître tout le tort qu'ils ont. Car ils ont tort même de prétendre que de tels raisonnements puissent être admis ou seulement écoutés, lorsqu'il s'agit de la foi et de l'intelligence de l'Ecriture.

Quoi que les hérétiques puissent jamais dire et de quelques raisons qu'ils se vantent, le fidèle n'aura jamais autre chose à tore, selon vos propres principes, qu'à considérer seulement et uniquement le sens de ce que Dieu dit. Donc les raisonnements humains ne seront pas même écoutés ; et vous faites triompher les sociniens, si vous les introduisez par quelque endroit dans les questions de la foi.

Vous le faites néanmoins. Vous appelez ces raisons les raisons du fond, tant elles vous paraissent considérables : mais elles sont du fond de la philosophie, et non du fond du christianisme; du fond du sens humain, et non du fond de la religion. S'il faut écouter de telles raisons dans la matière de l'Eucharistie, on ne peut plus les bannir d'aucun autre endroit de la religion, et nous verrons régner partout la raison humaine.

 

1 Anon., p. 178.

 

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V. — Conséquences de ce discours : le premier principe qu'il faut poser  pour entendre l'Ecriture sainte, c'est qu'il n'y a rien qu'il ne faille croire quand Dieu a parlé.

 

Il résulte de ce discours que le premier principe qu'il faut poser pour entendre l'Ecriture, c'est qu'il n'y a rien qu'il ne faille croire quand Dieu a parlé : de sorte qu'il ne faut pas mesurer à nos conceptions le sens de ses paroles, non plus que ses conseils à nos pensées, ni les effets de son pouvoir à nos expériences. Ainsi nous lirons l'institution de l'Eucharistie avec cette préparation. Que si l'ordre des conseils de Dieu et les desseins de son amour envers les hommes demandent que le Fils nous donne son propre corps, sans y changer autre chose que la manière ordinaire connue de nos sens, nous écouterons uniquement ce que Dieu dit; et loin de forcer les paroles de l'Ecriture sainte pour l'accommoder à notre raison et au peu que nous connaissons de la nature, nous croirons plutôt que le Fils de Dieu forcera par sa puissance infinie toutes les lois de la nature, pour vérifier ses paroles dans leur intelligence la plus naturelle   

 

VI. — Application de ce principe au mystère de l'Eucharistie.

 

Et pour entrer dans nos sentiments sur le mystère de l'Eucharistie, il ne faut que demeurer ferme dans les maximes que nous avons déjà posées : c'est que nous n'avons point à nous mettre en peine de la possibilité de la chose, ni de toutes les difficultés qui embarrassent la raison humaine, et que nous n'avons à considérer que la volonté de Jésus-Christ.

Nous devons supposer, selon ce principe, « qu'il ne lui a pas été plus difficile, comme il a été dit dans l’Exposition, de faire que son corps fût présent dans l'Eucharistie, en disant : Ceci est mon corps, que de faire qu'une femme soit délivrée de sa maladie, en disant : Femme, tu es délivrée de ta maladie (1); ou de faire que la vie soit conservée à un jeune homme, en disant à son père : Ton fils est vivant (2) ; ou de faire que les péchés du paralytique lui soient remis, en lui disant : Tes péchés te sont remis (3) »

Il faut donc déjà qu'on nous avoue que si le Fils de Dieu a

 

1 Luc, XIII, 12. — 2 Joan., IV, 50. — 3 Marc., II, 5 ; Expos., art. 10.

 

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Voulu que son corps fût présent dans l'Eucharistie, il l'a pu faire, en disant ces paroles : « Ceci est mon corps. » L'auteur de la Réponse ne me conteste cette vérité en aucun endroit de son livre ; il demande seulement qu'on lui fasse voir l'intention de Notre-Seigneur (1). Il est juste de le satisfaire; et la chose ne sera pas malaisée, si on reprend ce que j'ai dit dans l’Exposition.

 

VII — Intention de Jésus-Christ dans l'institution de l'Eucharistie. La loi des sacrifices.

 

J'ai demandé seulement qu'on nous accordât que lorsque le Fils de Dieu a dit ces paroles : « Prenez, mangez; ceci est mon corps donné pour vous, » il a eu dessein d'accomplir ce qui nous était figuré dans les anciens sacrifices, où les Juifs mangeaient la victime en témoignage qu'ils participoient à l'oblation, et que c'était pour eux qu'elle était offerte.

Je ne répéterai pas ce que je pense avoir expliqué très-nettement dans l’Exposition; mais je dirai seulement que c'est une vérité qui n'est pas contestée, que les Juifs mangeaient les victimes dans le dessein de participer au sacrifice, selon ce que dit saint Paul : « Considérez ceux qui sont Israélites selon la chair : celui qui mange les victimes n'est-il pas participant de l'autel (2)?» Toute la question est donc de savoir s'il est vrai que Notre-Seigneur ait eu dessein d'accomplir dans l'Eucharistie cette figure ancienne, et comment il l'a accomplie. Sur cela notre auteur nous répond deux choses : il nie en premier lieu que Notre-Seigneur ait eu dessein d'accomplir cette figure, quand il a dit : « Ceci est mon corps; » il dit secondement qu'en tout cas die s'accomplit par une manducation spirituelle.

La première de ces réponses est insoutenable; et il ne faut qu'écouter les raisonnements de l'auteur, pour en découvrir la faiblesse. Il me reproche « qu'au lieu de raisons, je donne des comparaisons ou des rapports et des convenances : comme si l'on ne savait pas, poursuit-il, que les comparaisons et les exemples peuvent bien éclaircir les choses prouvées, mais qu'elles ne prouvent pas (3). »

 

1 Anon., p. 179. — 2 I Cor., X, 18. — 3 Anon., p. 181.

 

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Je ne sais pourquoi il n'a pas compris qu'en parlant des sacrifices anciens, je ne lui apporte pas de simples comparaisons, mais des figures mystérieuses de la Loi, dont Jésus-Christ qui en est la fin nous devait l'accomplissement. Il ne peut désavouer que Notre-Seigneur ne soit figuré par ces anciennes victimes, et ne dût être immolé comme elles. Mais il croit dire quelque chose de considérable, quand il ajoute a qu'il ne faut pas presser ces sortes de rapports au delà de ce qui est marqué dans les Ecritures, pour en faire des dogmes de foi (1). » Je conviens de ce principe; et j'avoue qu'il n'est pas permis d'établir la foi sur des convenances imaginaires, qui ne seraient pas appuyées sur les Ecritures. Mais ne veut-il pas ouvrir les yeux pour voir que ce n'est pas moi qui ai fait le rapport dont il s'agit? Il est clairement dans la chose même, il est dans les paroles de Notre-Seigneur : « Prenez, mangez, ceci est mon corps donné pour vous; » et il n'est pas moins clair que nous devons manger notre victime, qu'il n'est vrai qu'elle a été immolée. C'est pour cela que Notre-Seigneur a prononcé ces paroles : « Prenez, mangez; ceci est mon corps donné pour vous.» Il ordonne lui-même que nous le mangions comme ayant été immolé et donné pour nous : et on est réduit à une étrange extrémité, quand il faut, pour se soutenir, nier une vérité si constante…

 

VIII. — Abus que l'Anonyme fait de cette parole de Jésus-Christ mourant : Tout est consommé.

 

Mais certainement il n'est pas juste de faire dire tout ce qu'on veut à l'Ecriture ; et il est bon de remarquer à l'occasion d'un passage dont les prétendus réformés abusent si visiblement, la manière peu sérieuse avec laquelle ils appliquent l'Ecriture sainte dans les matières de foi.

Je demande à l'Anonyme quel usage il prétend faire de cette parole de Jésus-Christ mourant. Veut-il dire qu'à cause que le Fils de Dieu a dit à la croix : « Tout est consommé, » tout ce qui se fait hors de la croix ne sert de rien à l'accomplissement de ses mystères; de sorte que c'est en vain que nous recherchons à la

 

1 P. 182.

 

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sainte table quelque partie de cet accomplissement? Il n'y a personne qui ne voie combien cette prétention serait ridicule. Est-ce donc qu'il n'y a plus aucune partie du mystère de Jésus-Christ, qui doive s'accomplir après sa mort? Quoi! ce qui avait été prédit de sa résurrection ne de voit-il pas avoir sa fin, comme ce qui avait été prédit de sa croix ? Notre Pontife ne devait-il pas entrer au ciel après son sacrifice, comme le pontife de la Loi entrait dans le sanctuaire après le sien? Et l'accomplissement de cette excellente figure, que saint Paul nous a si bien expliquée, ne regardait-il pas la perfection du sacrifice de Jésus-Christ?

Il se faut donc bien garder d'entendre que toutes les prédictions , toutes les figures anciennes, en un mot tous les mystères de Jésus-Christ soient accomplis précisément par sa mort. Aussi les paroles de Notre-Seigneur ont-elles un autre objet ; et lorsqu'un moment avant que de rendre l’âme il a dit : « Tout est consommé, » c'est de même que s'il eût dit : Tout ce que j'avais à faire en cette vie mortelle est accompli, et il est temps que je meure.

Il n'y a qu'à lire le saint Evangile pour y découvrir ce sens. « Jésus sachant, dit l'Evangile, que toutes choses étaient accomplies, afin que l'Ecriture fût accomplie, dit : J'ai soif (1). » Il vit qu'il fallait encore accomplir cette prédiction du Psalmiste : « Ils m'ont présenté du fiel pour ma nourriture, et ils m'ont donné du vinaigre à boire dans ma soif (2). » Après donc qu'on lui eut présenté ce breuvage amer, qui devait être le dernier supplice de sa passion, et qu'il en eut goûté pour accomplir la prophétie, saint Jean remarque qu'il dit : « Tout est consommé, et qu'ayant baissé la tête, il rendit l'esprit (3). » C'est-à-dire manifestement qu'il avait mis fin à tout ce qu'il devait accomplir dans le cours de sa vie mortelle, et qu'il n'y avait plus rien désormais qui dût l'empêcher de rendre à Dieu son âme sainte ; ce qu'il fit en effet au même moment, comme saint Jean le rapporte : « Il dit : Tout est consommé; et ayant baissé la tête, il rendit l'esprit. »

On voit donc que cette parole ne doit pas être restreinte en particulier aux figures qui représentent son sacrifice ; mais qu'elle

 

1 Joan., XIX, 28. — 2 Psal. LXVIII, 22. — 3 Joan., XIX, 30.

 

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s'étend aux autres choses qui regardent sa personne ; et que l’intention de Notre-Seigneur n'est pas de nous dire qu'il accomplit tout par sa mort, mais plutôt de nous faire entendre que tout qu'il avait à faire en ce monde étant accompli, il était temps qu’il mourût.

On voit par là un fils très-obéissant et très-fidèle à son Père qui ayant considéré avec attention tout ce qu'il lui a prescrit pour cette vie dans les Ecritures, l'accomplit de point en point, et ne veut pas survivre un moment à l'entière exécution de ses volontés (a).

Que si toutefois on veut nécessairement que cette parole « Tout est consommé, » regarde l'accomplissement des sacrifices anciens, nous n'empêcherons pas qu'on ne dise que Jésus-Christ y mis fin par sa mort, et qu'il sera désormais la seule victime agréable à Dieu : mais qu'on ne pense pas pour cela se servir de ce qu'il a accompli à la croix, pour détruire ce qu'il accomplit à la sainte table. Là il a voulu être immolé, ici il lui a plu d'être reçu d'une manière merveilleuse ; là il accomplit l'immolation des victimes anciennes, ici il en accomplit la manducation.

Aussi faut-il à la fin reconnaître cette vérité. Nos adversaires ne peuvent nier qu'il ne faille manger notre victime ; et ils croient avoir satisfait à cette obligation, en disant qu'ils la mangent par la foi. C'est leur seconde réponse où ils sont, s'il se peut, encore plus mal fondés que dans la première. Mais écoutons sur quoi il s'appuient : « Bien loin, dit l'auteur de la Réponse, qu'il faille entendre littéralement tous les rapports » qui sont avec Jésus Christ et les victimes anciennes, «nous savons que l'Apôtre oppose partout l'esprit de l'Evangile à la lettre de Moïse; » d'où il conclut « qu'il faut que sous l'Evangile les chrétiens prennent tout spirituellement, » et ensuite, qu'ils se contentent d'une manducation spirituelle et par la foi (1).

Mais que ne poussent-ils leur principe dans toute la suite; pourquoi ne disent-ils pas que Jésus-Christ devait être immolé,

 

1 Anon., p. 183.

(a) Note marg. : Faire voir la vérité constante des preuves par l'absurdité d réponses plutôt que de suivre les preuves dans toute leur étendue.

 

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non par une mort effective, mais par une mort spirituelle et mystique (1)? C'est sans doute que Notre-Seigneur nous a fait voir en mourant aussi réellement qu'il a fait, qu'en tournant tout au mystique et au spirituel on anéantit enfin ses conseils.

Pourquoi nos adversaires ne veulent-Us pas que sans préjudice du sens spirituel, qui accompagne partout les mystères de l'Evangile , il ait pu rendre la manducation de son corps aussi effective que sa mort (2) ? Car il faut apprendre à distinguer l'essence des choses d'avec la manière dont elles sont accomplies. Jésus-Christ est mort aussi effectivement que les animaux qui ont été immolés en figure de son sacrifice : mais il n'a point été traîné par farce à l'autel; c'est une victime obéissante qui va de son bon gré à la mort; il a rendu l'esprit volontairement, et sa mort est autant m effet de puissance que de faiblesse : ce qui ne peut convenir à aucune autre victime. Ainsi il nous donne à manger la chair de ce sacrifice d'une manière divine et surnaturelle, et infiniment différente de celle dont on mangeait les victimes anciennes : mais, comme il a été dit dans l'Exposition, en relevant la manière et lui ôtant tout ce qu'elle a d'indigne d'un Dieu, il ne nous a rien été pour cela de la réalité ni de la substance.

Ainsi quand il a dit ces paroles : « Prenez, mangez; ceci est mon corps, » ce qu'il nous ordonne de prendre, ce qu'il nous présente pour le manger, c'est son propre corps ; et son dessein a été de nous le donner non en figure, ni en vertu seulement, mais réellement et en substance. C'est l'intention de ses paroles, et la mite de ses conseils nous oblige à les entendre à la lettre. N'importe que le sens humain s'oppose à cette doctrine : car il faut, malgré ses oppositions, que l'ordre des desseins de Dieu demeure ferme. C'est cet ordre des conseils divins que Jésus-Christ veut Bons faire voir en instituant l'Eucharistie; et que de même qu'il a choisi la croix pour y accomplir en lui-même l'immolation des victimes anciennes, il a aussi établi la sainte table pour en accomplir la manducation : si bien que malgré tous les raisonnements humains la manducation de notre victime doit être aussi réelle à la sainte table, que son immolation a été réelle à la croix.

 

1 Anon., p. 184.— 2 Ibid. p. 186.

 

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C'est ce qui oblige les catholiques à rejeter le sens figuré pour tourner tout au réel et à l'effectif. Et c'est aussi ce qui force les prétendus réformés à chercher ce réel autant qu'ils peuvent. Car c'est ici qu'on m'objecte « que je me méprends perpétuellement sur ce réel. La manducation, dit l'Anonyme, ou la participation du corps de Jésus-Christ est très-réelle (1). » On a vu plus amplement en un autre lieu combien fortement il s'explique sur cette réalité, et comme il se fâche contre moi quand je dis que notre doctrine mène au réel plus que la sienne : nous en parlerons encore ailleurs; mais il faut en attendant, qu'il nous avoue, que si nous avons réellement dans l'Eucharistie le corps de Notre-Seigneur, son objet a été réellement dans ce mystère de nous le donner : et ensuite que quand il a dit : « Ceci est mon corps, » il faut entendre : Ceci est mon corps réellement et non en figure, ni en vertu, mais en vérité et en substance…

 

 

 

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