« Ma petite, il faut que je me tire d'ici. »

« Le bon Dieu a pris un bras à mon corps pour donner une aile à mon âme. »

« Que de fois cette petite Thérèse m'a tiré d'un mauvais pas ! »

Guérison subite d'un soldat tuberculeux interné en Suisse.

« On aurait dit qu'une main écartait les balles. »

« A côté de moi veille ma petite Sœur Thérèse. »

Ex-voto d'un soldat.

Transformation d'un jeune homme de 20 ans, à l'article de la mort.

« Son seul regard m'excite à la vertu. »

Hommage d'une mère à Sœur Thérèse.

« Les enfants de Sœur Thérèse en Albanie. »

 

109

 

« Ma petite, il faut que je me tire d'ici. »

 

Aux Armées, 25 mai 1917.

 

Je trace ces lignes à la plus grande gloire de tout le Carmel, en la personne de Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus. Simple sergent au 70ed'infanterie, j'ai toujours eu pour elle une dévotion et une confiance sans bornes.

Nous avons attaqué le 30 avril dernier, et l'action fut des plus rudes. Je m'étais mis sous la protection de la sainte, mais les mitrailleuses allemandes nous fauchaient sans pitié. A ce moment critique, je dis à Sœur Thérèse : Ma petite, il faut que je me tire d'ici ; à toi de me secourir, et je publierai ton intervention. » A peine cette prière formulée, on m'envoya porter un ordre au lieutenant, et, ayant fait quelques pas, j'entendis une détonation derrière moi. Je me crus blessé, et néanmoins je continuai ma route. Le soir venu, quand nous pûmes enfin poser sac à terre, j'ouvris le mien, et quelle ne fut pas ma surprise de voir mon linge en charpie, mes boîtes de sardines dessoudées, mes papiers et lettres pulvérisés. J'avais reçu une balle explosive dans le dos, qui heureusement s'était arrêtée à temps, sans pénétrer même ma capote. Je devais donc la vie à ma sainte Protectrice. J'ai placé mes hommes sous sa garde, et elle veille sur eux incontestablement.

 

P. Boschet,
sergent au 70e d'infanterie, 11e Cie.

 

 

« Le bon Dieu a pris un bras à mon corps pour donner une aile à mon âme. »

 

Extraits de plusieurs lettres d'un brave petit soldat chrétien.

 

Du Front, le 7 août 1916.

 

« Que Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus soit béatifier ! » Chères Sœurs,

 

J'ai eu, par un camarade, le petit livre de Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus; je l'ai lu, et sa Vie aussi.

J'ai passé devant Verdun en ne cessant de la prier, et je suis sorti de cette fournaise sain et sauf; aussi, chères Sœurs, voudriez-vous m'envoyer une relique et la photographie de ma sainte, afin que je les porte avec gloire sur mon cœur ?

Recevez, chères Sœurs, etc.

 

Romain Leclercq,

115e de ligne, 5e Cie.

 

110

 

DU MÊME :

 

2 avril 1917.

 

J'ai parlé de Sœur Thérèse à notre aumônier, et il serait content que vous lui envoyiez un petit colis d'images ou d'insignes, afin de la faire connaître à ceux qui en sont encore ignorants. On est dans un moment un peu sombre, et elle nous donnera le moyen de s'illuminer à sa clarté. Comme j'ai un peu d'argent, je vous mets 5 francs pour faire ce que vous croyez qu'il plaira le plus à ma chère petite Sœur du Ciel. C'est mon unique plaisir de penser à elle, et il me semble que si je l'abandonnais, j'abandonnerais aussi tous mes devoirs. Aussi je veux lui consacrer un peu de ma vie, et recevoir près d'elle la force nécessaire pour passer bien droit là où d'autres succombent.

 

DU MÊME :

 

Hôpital 49, 7, rue de la Chaise, Paris.

 

Lettre du 25 mai 1917 et les suivantes.

 

Je vous écris de mon lit d'hôpital, et de la main gauche, aussi excusez mon écriture. J'ai eu le bras droit arraché par un éclat d'obus et de nombreuses blessures aux jambes. Mais je suis très bien soigné, j'ai une bonne religieuse qui ne sait quoi faire pour me soulager, et, en me voyant si bien traite, je pense que c'est grâce à la petite Sœur Thérèse. En reconnaissance, si vous voulez bien, chères Sœurs, je vous enverrai ma médaille militaire et ma croix de guerre avec une palme, et les citations que j'ai eues, ce sera pour orner la tombe de ma sainte, car c'est elle qui me les a fait gagner.

Je dois avoir une nouvelle opération, pour me retirer les éclats d'obus, mais je ne veux pas demander à ma petite Thérèse de me l'épargner, car ce serait me supprimer quelques instants de souffrances, et elle m'a déjà tant protégé dans mon épreuve, que c'est pour moi comme un acte de remerciement que je lui dois, de souffrir un peu pour lui aider à faire du bien sur la terre.

J'ai retrouvé ici un camarade qui, lui aussi, l'aime beaucoup; on l'appelle le ressuscité, car on lui a fait une grave opération à l'estomac et on ne croyait pas qu'il en reviendrait. Son nom est Eugène Germe, et ça me touche le cœur de l'entendre répondre, toujours avec un grand accent de foi, à ceux qui le félicitent sur sa santé : « C'est la Sœur Thérèse qui m'a sauvé; sans elle, j'y aurais passé comme les autres. » Nous parlons souvent ensemble de notre petite sainte, et c'est très joli de l'écouter, surtout qu'il s'explique en patois, et on Voit bien que Sœur Thérèse, comme le bon Dieu, aime les pauvres.

Recevez, bonne Mère et chères Sœurs, etc.

Votre petit privilégié de Sœur Thérèse,

 

Romain Leclercq.

 

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Dès que son état le lui permit et qu'il put marcher, le brave petit soldat vint à Lisieux, dans la seconde quinzaine de juillet 1917, visiter la tombe de Sœur Thérèse. C'est au parloir du Carmel qu'il dit, avec une naïveté touchante, cette parole sublime dans sa simplicité : Le bon Dieu a pris un bras à mon corps pour donner une aile à mon âme. Il remit au monastère, selon sa promesse, sa croix de guerre et sa médaille militaire.

La religieuse qui le soigna à l'hôpital de la rue de la Chaise témoigna, à plusieurs reprises, dans ses lettres, de l'édification qu'elle goûtait auprès de ce soldat si rempli d'abandon et d'esprit chrétien.

 

« Que de fois cette petite Thérèse m'a tiré d'un mauvais pas ! »

 

Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). 28 mai 1917.

 

Madame la Supérieure,

 

Les faveurs que Sœur Thérèse m'a accordées, à moi, petit canonnier, sont si nombreuses, qu'il serait difficile de les énumérer toutes. Que de fois cette petite Thérèse m'a tiré d'un mauvais pas! Que d'ennuis ont été chassés par ma petite amie ! Voici quelques-uns des simples événements au cours desquels j'ai senti sa bienfaisante intervention :

Je me promenais un jour dans les vastes chantiers d'une entreprise de métallurgie. Préoccupé par ma mission, je marchais rapidement, tête baissée, lorsque, soudain, je me sens arrêté par une main invisible. Instinctivement, je lève les yeux, et j'aperçois, non sans frayeur, à deux pouces de mon front, une grosse poutre en fer qui se balançait dans le vide, maintenue par un pont roulant : un pas de plus et je me heurtais violemment. Mon émotion passée, j'ai envoyé un grand merci à ma petite Sœur Thérèse dont l'image ne me quitte jamais. Je suis persuadé que c'est elle qui m'a évité cet accident, dont la prévision des suites fâcheuses me fait encore frémir.

Au mois de décembre 1916, j'avais attrapé un refroidissement qui s'était porté aux oreilles. J'étais presque sourd.

Je songeai encore à ma Protectrice céleste, certain qu'elle me guérirait.

Une première neuvaine resta sans succès; une seconde, qui se terminait le 31 décembre, n'amena aucun changement. Alors, un peu découragé, je dis à Sœur Thérèse : « Ma petite Sœur Thérèse, vous connaissez la sympathie et l'amitié que j'ai pour vous. Voyons, pour mes étrennes du jour de l'an, ne me refusez pas la guérison de ma surdité. »

Le lendemain matin, je sens avec surprise un léger craquement

 

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dans mes oreilles ! Au même instant, toute surdité avait disparu; j'était guéri, bien guéri. J'entendais tout très distinctement.

Mes compagnons de chambrée, dont les idées religieuses sont bien peu fondées cependant, ont été séduits par la vue des souvenirs de Sœur Thérèse. Je leur ai expliqué, en camarade, les merveilles qu'accomplit cette petite sainte, à l'heure actuelle, sur nos soldats. Je leur ai distribué à chacun une de ses images; ils ont confiance, car je les ai vus mettre soigneusement dans leur portefeuille le portrait de celle qui achèvera de les relever, j'en ai le ferme espoir.

Veuillez agréer, etc.

 

Canonnier Maury, Classe 18,
53e d'art., 69e Bataillon.

 

Guérison subite d'un soldat tuberculeux interné en Suisse.

 

Leysin, le 15 juin 1917.

 

Mère Supérieure,

 

Je vous fais parvenir cette lettre à seule fin que vous soyez au courant de ce qui s'est passé pour moi par la protection de Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus. Voici la chose :

Au mois de février de cette année, je fus atteint de tuberculose pulmonaire et je souffrais de plus en plus, si bien que, le 28 mars, je fus forcé de me mettre au lit; et pas de mieux pour ça au contraire, je crachais le sang plusieurs fois par jour et j'avais des crises de poitrine terribles. En plus, l'estomac était complètement détraqué, je ne pouvais plus m'alimenter du tout, si ce n'est qu'avec peine, j'arrivais quelquefois à prendre un œuf délayé dans une tasse de lait. Alors, forcément, je suis tombé dans une faiblesse tout à fait critique; et cela a duré des premiers jours de février au 7 mai. A ce moment, j'étais désolé, voyant mes forces partir et ne pouvant rien y faire. Lorsque, le 29 avril, mon camarade, Lefebvre (Roger), qui a été protégé par Sœur Thérèse sur le champ de bataille, me dit que le seul moyen pour obtenir ma guérison était de faire appel à Sœur Thérèse. Alors je lui dis que oui, et il me mit sur la poitrine une médaille ainsi qu'une relique de la sainte.

Le 29, donc, je commençai une neuvaine; mais voilà qu'arrivé au sixième jour, les douleurs me prennent et des crises comme jamais je n'en avais eu. Pourtant, je ne perdais pas confiance quand même, tout en souffrant terriblement à ne plus pouvoir y résister.

Enfin, le neuvième jour, vers 1 heure de l'après-midi, le sommeil me prend, et je me réveille, vers les 4 heures, avec un appétit formidable. Alors, je dis au camarade qui me gardait que j'avais faim, d'aller me chercher un œuf sur le plat; mais il ne me croyait pas, tout d'abord, car il y avait quatre jours que je n'avais absolument rien pris. Mais enfin, voyant que je lui disais la chose sérieusement,

 

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il y va et me rapporte un œuf sur le plat, avec un peu de beurre et de pain. J'ai mangé ça comme si jamais j'avais été malade, et le soir la même chose. Vous pensez, Mère Supérieure, si j'ai étonné ceux qui le lendemain venaient me voir; ils n'en pouvaient revenir. Et depuis ça va très bien toujours, je mange d'un bon appétit et je me promène sans me fatiguer.

Pour en finir,de ce moment, je suis à Leysin, station pour les tuberculeux ; car, quand j'avais été si mal, le docteur qui me traitait avait demandé immédiatement mon départ, mais dans les trois semaines qu'on m'a fait attendre la Sœur Thérèse m'a guéri, et il a fallu y aller quand même. Le docteur qui m'a reçu à Leysin m'a demandé comment et pour quelle raison que l'on m'avait envoyé à Leysin, vu que je n'ai rien des tuberculeux; il me dit : « Je ne vous trouve aucune trace de maladie. »

A présent, ma Mère Supérieure, soyez sûre que je me souviendrai toujours de ma Protectrice qui m'a remis sur pied comme par le passé.

J'attendais toujours pour vous écrire pour voir si la guérison se maintenait, mais je peux vous dire que oui. Maintenant, je vous dirai que, dans quelques jours, je dois être rapatrié, comme grand blessé. Car j'ai le bras gauche dont je ne me sers pas du tout, non plus que la main gauche; alors, aussitôt rentré je vous écrirai pour vous donner de mes nouvelles. Je termine en vous disant que vous pouvez avoir entière confiance à ce que je vous écris. D'abord, Lefebvre a dit qu'il vous avait renseignée, et s'il faut d'autres témoins je leur dirai qu'ils vous écrivent.

Recevez, Mère Supérieure, mes meilleures salutations.

 

H. Latus,

407e d'infanterie, interné à Leysin, pension argentine (Suisse).

 

 

« On aurait dit qu'une main écartait les balles. »

 

Aux Armées, le 17 juin 1917.

 

Après tant de fois que Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus m'a sauvé de la mort, particulièrement en Champagne, sa protection m'a suivi dans notre nouvelle position. La dernière fois que l'on monta en ligne, il fallut traverser le canal sous un tir en règle de l'ennemi. Arrivés dans la tranchée de C, tout le monde fut mis en sentinelle, car il y avait besoin d'une grande surveillance. Alors nous avons placé ramage de Sœur Thérèse sur le parapet; à partir de ce moment-là, on aurait dit qu'une main écartait les balles et les obus, et nous n'avons subi aucune perte. D'ailleurs, je sais que les camarades pensaient comme moi à la petite Sœur, dans le danger. Son image et le

 

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fanion du Sacré-Cœur flottent à présent dans les cantonnements et aux abris.

Puisse Sœur Thérèse continuer de jeter sur nous et sur la France entière sa « pluie de roses » !

  1. C.

...e rég. d'inf. ...e Cie.

 

« A côté de moi veille ma petite Sœur Thérèse. »

 

Du Front, le 6 juillet 1916.

 

Ma Révérende Mère,

 

C'est un véritable bonheur pour moi de tracer ces quelques lignes qui vous révéleront quelle reconnaissance je dois à ma « petite Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus ».

Faisant partie du corps colonial qui vient d'être engagé dans la formidable offensive de la Somme, j'ai eu la joie d'être relevé de la fournaise, hier, sain et sauf.

Avant cette terrible phase, j'avais appris, dans ma famille, à connaître la petite sainte, et je portais avec piété sa relique.

O ma Mère, vous dire combien je l'ai invoquée est impossible. Il me semblait qu'elle était près de moi et qu'elle guidait mes pas. Je mis sous sa protection puissante ma vie, tous ceux que j'aime, ma femme, ma petite fille, et je la suppliai de me conserver à ces êtres si chers qui m'attendent au pays. Elle m'a donc pleinement exaucé...

Au repos pour quelques heures, nous allons à nouveau rentrer dans la lutte, et j'y repars avec la même confiance et le même courage, puisqu'à côté de moi veille ma « petite Sœur Thérèse ».

Veuillez agréer, etc.

 

Sergent Emile Jutard, 22e colonial, 3e Cie.

 

DU MÊME:

 

24 juin 1917.

 

Je suis actuellement dans les tranchées d'Alsace, sur cette terre -pour laquelle nous combattons depuis bientôt trois ans! J'ai tout le temps de penser à ma petite Sœur Thérèse dans nos heures d'ennui; alors je me console en lui parlant, et j'éprouve en moi-même un bien-être, une joie que je ne puis expliquer. La guerre s'éternise, c'est bien dur, et quand je songe à mon épouse restée seule là-bas avec ma fillette, je me reporte vers la petite Sœur et je trouve près d'elle tout le courage nécessaire pour supporter l'épreuve; j'ajouterai même qu'un certain bonheur, très intime, est doublement plus grand ici qu'à mon foyer, car nous offrons, ma femme et moi, ce douloureux sacrifice de la séparation, pour hâter le jour heureux de la béatification de notre sainte bien-aimée.

Je lui dois d'ailleurs ce tribut de reconnaissance pour m'avoir miraculeusement sauvé le 14 juillet 1916. Je n'oublierai jamais cette

 

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date où, chargé d'un travail en première ligne, presque en plein jour, je reçus une balle explosive dans ma cartouchière dont le contenu fut à l'instant pulvérisé, une partie de ma capote réduite en charpie, tandis que je n'eus même pas une éraflure. J'avais mis cette mission sous la garde de Sœur Thérèse et, tout en la remplissant, je ne cessais de l'invoquer, et elle voulut bien m'entendre. Depuis, je ne vis plus sans elle, et je l'aime tant !

 

Sergent Emile Jutard.

 

Le sergent Jutard profita de toutes ses permissions au cours de la campagne, pour venir retremper son courage et sa confiance dans de pieux pèlerinages sur la tombe de sa sainte Protectrice. A l'un d'eux, en 1916, il apporta au Carmel sa croix de guerre en ex-voto.

 

Ex-voto d'un soldat.

 

Marpiré (Ille-et-Vilaine), le 25 juin 1917.

 

Ma Révérende Mère,

 

C'est un bien humble ex-voto que j'ai l'honneur de vous adresser.

Au cours d'une attaque où je me suis trouvé en fort mauvaise posture, une balle de mitrailleuse traversa mes vêtements, poches de capote, vareuse et pantalon, mais je n'eus aucune égratignure. Le lendemain, en feuilletant un calepin également perforé de part en part, j'y découvris une image de Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus, dont je ne me rappelais plus la présence. Aussi, plusieurs camarades qui déjà me félicitaient de ma chance ne se gênèrent nullement pour parler de miracle. Chose remarquable : la veille de l'attaque, j'avais reçu une carte d'un ami se terminant par ces mots : « Confiance en Dieu et dans la petite Sœur! » Et c'est grâce à cette invitation que je pensai à invoquer la chère sainte à l'heure du danger.

Jusqu'ici je gardais précieusement ce portrait, témoignage palpable de sa protection, pour le montrer à tous. « C'est à conserver », me dit-on. Eh bien! non; j'en veux faire le sacrifice et l'offrir au Carmel de Lisieux comme gage de ma reconnaissance envers Sœur Thérèse. Nous espérons beaucoup de son intercession; qu'elle veuille bien nous continuer son assistance et faire pour les âmes ce qu'elle accomplit pour les corps!

Agréez, ma Rde Mère, etc.

 

T. Coché,

soldat.

 

L'image déchiquetée par le projectile est jointe au dossier.

 

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Transformation d'un jeune homme de 20 ans, à l'article de la mort.

 

Paris, le 25 juin 1917.

 

Ma bonne Mère,

 

Il y a environ six semaines, je vous demandais de faire célébrer le saint sacrifice de la Messe pour mon frère bien malade, et surtout pour qu'il reçoive les derniers sacrements.

Mon frère avait vingt ans; à l'appel de sa classe, il se rendit à Besançon, il y a de cela six mois; mais, en cours de route, il prit froid, et après trois mois passés dans les infirmeries, il était réformé; trop tard, hélas ! car tous les remèdes devaient rester inutiles. Je le soignai d'abord, mais bientôt, à cause du danger extrême de contagion, le docteur exigea que je me sépare de lui pour l'envoyer à l'hôpital. Il ne survécut que peu de temps; le jour même de sa mort, étant allée le voir, je le trouvai bien faible, souffrant de spasmes et de sueurs froides. Par instants, il se révoltait, protestant qu'on ne mourait pas à vingt ans. Alors, dans mon angoisse pour son salut, je lui attachai au cou une relique de Sœur Thérèse, en osant lui conseiller de prier avec moi la petite sainte. Quelle ne fut pas mon émotion de l'entendre me dire peu après qu'il était tout résigné à mourir, que son cœur était changé; il m'assura plus tard que la Sainte Vierge venait le chercher. Enfin, tout content, il reçut la visite du prêtre et les derniers sacrements, s'unit à nos invocations et expira doucement quelques heures après.

Ai-je besoin, ma bonne Mère, de vous exprimer la reconnaissance personnelle que je garde à votre petite sainte? Mon bien-aimé frère ne pratiquait plus depuis six ans, et grâce à ma bienfaisante Avocate, j'ai la conviction de son salut éternel.

Veuillez agréer, etc.

 

L. NOIAILLETAS.

 

« Son seul regard m'excite à la vertu. »

 

Salbris (Loir-et-Cher), 1 juillet 1917.

 

Ma Révérende Mère,

 

Je viens de lire avec édification la Vie de la petite Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus. Cette lecture a été un baume pour mon cœur, elle m'a consolé, excité à faire le bien et enflammé d'amour pour Dieu.

Je ne voudrais pas que les ardents désirs formulés à la clarté de la lumière divine demeurent infructueux; je veux à tout prix me donner à ce Jésus, que Thérèse a tant aimé, et ne rien faire pour lui déplaire.

 

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Oh! qu'il me serait doux et consolant de pouvoir dire à mon Sauveur, au soir de ma vie : « Seigneur, depuis le jour où j'ai connu la voie d'amour de votre Servante, je n'ai volontairement rien fait pour vous attrister. »

Pour entretenir ma résolution d'être tout à Dieu et de consacrer ma famille entière à son service, chaque jour, je relis, et relirai quelque passage de l’Histoire d'une Ame. C'est un foyer qui, tout à la fois, m'éclaire et me réchauffe. Je veux devenir le petit ami de Sœur Thérèse; son seul regard m'excite à la vertu.

 

Veuillez agréer, etc.

 

Sergent Moingt,

5e section C.O. H.

 

Hommage d'une mère à Sœur Thérèse.

 

Juillet 1917.

 

Ma Petite Sr Thérèse de l'Enfant-Jésus,

 

Je suis heureuse de vous offrir l'autographe de mon fils, m'annonçant sa conversion. Je sais que c'est vous qui avez supplié le Tout-Puissant de m'accorder cette grâce immense; aussi, en témoignage de gratitude, je vous laisse la lettre même de mon soldat. Vous avez tant fait pour obtenir son retour, que je ne doute pas de sa persévérance.

Guidez tous mes enfants à travers la vie, afin que la famille entière soit réunie dans l'éternité, pour glorifier Dieu, et vous remercier, chère petite sainte, de vos bontés pour nous tous.

Une mère pleine de confiance en vous,

 

Mme H.

 

LETTRE DU SOLDAT

 

8 juillet 1917.

 

Bien chère Maman,

 

Enfin, ça y est! Ouf! Quel soulagement. Voici une bonne nouvelle qui réjouira votre cœur de mère : Je me suis confessé, ce matin à 6 heures, et j'ai communié à 7. Oui, aujourd'hui, 8 juillet, j'ai fait mes Pâques! en demandant pardon à Dieu de mes errements passés. Voici comment cela s'est produit :

Il existe, à l'arrière des lignes, un petit patelin à moitié démoli, où des troupes sont installées dans des baraques Adriant. Je savais que là était une chapelle, dressée par l'ingéniosité des poilus, et aussi un brave homme de prêtre d'Alger : il porte soutane et il a un galon de sous-lieutenant comme aumônier régimentaire. Ce matin, muni d'un laissez-passer, je prends mon courage à deux mains, ma bicyclette entre les jambes, et je file vers la chapelle. J'arrive à l'endroit à cinq heures et demie, et pour faciliter mon affaire, je vois plusieurs camarades et un officier qui attendaient leur tour, pour se

 

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confesser. Je passe au bout de peu de temps, et je m'agenouille aux pieds d'un homme à barbiche grise, qui me reçoit avec un bon sourire. J'ai déchargé mon cœur dans le sien. Ce fut un véritable soulagement. Messe à 7 heures : nous étions cinq à communier, quatre soldats et un officier; l'aumônier nous a adressé une petite exhortation parfaite.

Voilà, ma chère Maman; je suis bien heureux de l'effort que j'ai fait, mais je vous dirai que j'ai eu du mal. Je ne vous cacherai pas que moi, Jean, qui ne tremble pas devant un obus, si gros soit-il, j'avais peur d'aller me confesser. Mais maintenant, tout est lâché : je ne veux même plus y penser.

Adieu! chère Maman, je vous embrasse bien plus fort que d'habitude, et je vous aime de toutes les forces de mon âme.

 

Jean

 

« Les enfants de Sœur Thérèse en Albanie. »

 

(Extraits de plusieurs lettres d'avril 1917 à juillet 1917.)

 

Du Front d'Albanie, avril 1917.

 

Depuis que je prie la Servante de Dieu Thérèse de l'Enfant-Jésus, je vois qu'elle me regarde bien souvent ; on dirait qu'elle est toujours là pour me protéger. Je me sens bien plus fort, plus courageux; avant, j'étais toujours triste, je pensais à mes parents restés dans les régions envahies; maintenant, je suis gai; il me semble que la petite Sœur me dit tout bas qu'elle veille sur les miens; je n'ai jamais été plus heureux de ma vie, et cependant notre sort est rude dans ces montagnes, et mes camarades ne me comprennent pas !

Je voudrais avoir des images de la sainte si bonne pour moi.

 

Jean Tison,

caporal mitrailleur,

26e Bon sénégalais.

DU MÊME

 

Le 3 mai 1917.

 

Je viens de recevoir le colis des souvenirs de Sœur Thérèse de l'Enfant-Jésus; j'ai tout distribué à ma compagnie; mon capitaine, mes lieutenants, tous m'en réclament ! Nous nous groupons le soir pour réciter la prière pour obtenir la béatification de Sœur Thérèse; puis je lis aux autres son histoire. Beaucoup de soldats sont fidèles à cette réunion qui a pour titre : Les enfants de Sœur Thérèse en Albanie.

Hier, 2 mai, j'ai été terrassé tout à coup par une fièvre violente

 

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due au climat. On me fit coucher sur une roche, et l'on me donna un remède. Mais moi, j'implorai ma chère Bienfaitrice, elle qui protège les combattants qui se confient en elle, et presque aussitôt je m'endormis. Lorsque le médecin arriva, amené par le sergent pour me voir, à son grand étonnement je dormais à poings fermés, n'ayant plus trace de fièvre. Alors l'un des deux, je ne sais lequel, prit l'image de Sœur Thérèse et je ne l'ai plus revue !

 

DU MÊME

 

Aux tranchées, le 16 juillet 1917.

 

Bonne Mère Prieure,

 

Un humble poilu, perdu sous le ciel brûlant d'Orient, vient vous remercier de l'envoi que vous lui avez fait avec tant de bonté. Vive notre petite Sœur Thérèse! dans les jours tragiques que nous traversons, elle n'a cessé de nous protéger, moi et mes pauvres compagnons d'armes.

Toujours on voit ces braves Sénégalais regarder avec admiration l'image de la sainte de Lisieux, et l'un d'eux m'a demandé de lui expliquer tout le livre de sa vie. Je l'ai fait et il est bien content depuis.

Veuillez agréer, bonne Mère Prieure, les remerciements réitérés d'un petit soldat qui donne toute son affection à Sœur Thérèse.