A mes petits Frères du ciel, les saints Innocents.

Air : Le fil de la Vierge ou La Rose mousse.

 

« Le Seigneur rassemblera des petits Agneaux
 et les prendra sur son sein. » Is., XL, 11.

« Heureux ceux que Dieu tient pour justes sans
les oeuvres ! car à l'égard de ceux qui font les oeuvres,
la récompense n'est point regardée comme une grâce,
mais comme une chose due. C'est donc gratuitement
que ceux qui ne font pas les oeuvres sont justifiés
 par la grâce, en vertu de la Rédemption dont
Jésus-Christ est l'Auteur. »

Rom., IV, 4, 5, 6.

 

Heureux petits enfants ! avec quelles tendresses

Le Roi des cieux

Vous bénit autrefois, et combla de caresses

Vos fronts joyeux !

De tous les Innocents vous étiez la figure,

Et j'entrevois

Les biens que, dans le ciel, vous donne sans mesure

Le Roi des rois.

 

Vous avez contemplé les immenses richesses

Du paradis,

Avant d'avoir connu nos amères tristesses,

Chers petits lis !

O boutons parfumés, moissonnés dès l'aurore

Par le Seigneur...

Le doux soleil d'amour qui sut vous faire éclore,

Ce fut son Coeur

 

Quels ineffables soins, quelle tendresse exquise,

Et quel amour

Vous prodigue ici-bas notre Mère l'Eglise,

Enfants d'un jour !

Dans ses bras maternels vous fûtes en prémices

Offerts à Dieu.

Toute l'éternité vous ferez les délices

Du beau ciel bleu.

 

Enfants, vous composez le virginal cortège

Du doux Agneau;

Et vous pouvez redire, étonnant privilège !

Un chant nouveau.

Vous êtes, sans combats, parvenus à la gloire

Des conquérants ;

Le Sauveur a pour vous remporté la victoire,

Vainqueurs charmants

 

On ne voit point briller de pierres précieuses

Dans vos cheveux,

Seul, le reflet doré de vos boucles soyeuses

Ravit les cieux...

Les trésors des élus, leurs palmes, leurs couronnes,

Tout est à vous !

Dans la sainte patrie, enfants, vos riches trônes

Sont leurs genoux.

 

Ensemble vous jouez avec les petits anges

Près de l'autel ;

Et vos chants enfantins, gracieuses phalanges,

Charment le ciel !

Le bon Dieu vous apprend comment il fait les roses,

L'oiseau, les vents ;

Nul génie ici-bas ne sait autant de choses

Que vous, Enfants !

 

Du firmament d'azur, soulevant tous les voiles

Mystérieux,

En vos petites mains vous prenez les étoiles

Aux mille feux.

En courant vous laissez une trace argentée ;

Souvent le soir,

Quand je vois la blancheur de la route lactée,

Je crois vous voir.....

 

Dans les bras de Marie, après toutes vos fêtes,

Vous accourez ;

Sous son voile étoilé cachant vos blondes têtes,

Vous sommeillez...

Charmants petits lutins, votre enfantine audace

Plaît au Seigneur;

Vous osez caresser son adorable Face,

Quelle faveur !

 

C'est vous que le Seigneur me donna pour modèle,

Saints Innocents !

Je veux être ici-bas votre image fidèle,

Petits enfants.

Ah ! daignez m'obtenir les vertus de l'enfance ;

Votre candeur,

Votre abandon parfait, votre aimable innocence

Charment mon coeur.

 

O Seigneur, tu connais de mon âme exilée

Les voeux ardents

Je voudrais moissonner, beau Lis de la vallée,

Des lis brillants...

Ces boutons printaniers, je les cherche et les aime

Pour ton plaisir ;

Sur eux daigne verser l'eau sainte du baptême

Viens les cueillir !

 

Oui, je veux augmenter la candide phalange

Des Innocents ;

Ma joie et mes douleurs, j'offre tout en échange

D'âmes d'enfants.

Parmi ces Innocents je réclame une place,

Roi des élus,

Comme eux je veux au ciel baiser ta douce Face,

O mon Jésus !

 

Février 1897.

 

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