Bienheureux Junipère SERRA
Nom: SERRA
Prénom: Michel Joseph (Miguel Jose)
Nom de religion: Junipère (Junipero)
Pays: Espagne - Etats-Unis
Naissance: 24.11.1713 à Petra
di Maiorca (Iles Baléares)
Mort: 28.08.1784 à la Mission de Carmel, près de Monterey
(Californie)
Etat: Prêtre - Franciscain
Note: 1730 Franciscain à Palma. 1737 Prêtre. Enseigne la
philosophie et la théologie. Part en mission en 1750 au Mexique, d’abord dans
la région de Mexico. A partir de 1768, il évangélise les Indiens de l’ouest
(Fonde San Diego en Californie actuelle)
Béatification: 25.09.1988 à
Rome par Jean Paul II
Canonisation:
Fête: 28 août
Réf. dans l’Osservatore Romano: 1988
n.39
Réf. dans la Documentation Catholique: 1988 p.1092
Notice brève
Notice développée
Michel Joseph (Miguel Jose) Serra naît dans une modeste famille, au village de Petra près de Palma dans l’île de Majorque (Espagne) en 1713. Il entre en 1730 à seize ans au couvent franciscain de l’île dont il a fréquenté l’école, prenant le nom de Junipère, l’un des premiers compagnons de saint François. Il émet ses vœux en 1731 et reçoit l’ordination sacerdotale en 1737. Très doué intellectuellement, il est tout de suite professeur de philosophie et de théologie, et il enseigne à partir de 1743 à l’université de Palma. Il ressent la vocation missionnaire et peut enfin partir à 37 ans, en 1750 vers la Nouvelle Espagne (Mexique). Il aborde à Veracruz et, malgré une blessure à la jambe dont il gardera des séquelles jusqu’à la fin de sa vie, il tient à se rendre à pied jusqu’à Mexico en passant par Notre-Dame de Guadalupe où il confie son apostolat à la Vierge Marie. C’est le premier des exploits physiques de ce Franciscain légendaire. Pendant les premières années, il professe et prêche à Mexico, comme il le faisait déjà en Espagne ; après quoi sur sa demande, il missionne plusieurs années en Sierra Gorda, près de Querétaro, au nord-ouest de la capitale ; puis il est rappelé à Mexico où il fait flores.
En 1767, le roi d’Espagne chasse les Jésuites de Californie (‘Baja’ ou Basse Californie, Mexique actuel) où ils avaient déjà fondé 15 missions, et il demande aux Franciscains de les remplacer. Le Père Serra devient le responsable de ces missions. Mais l’année suivante le gouverneur craint que des Russes, venus de la presqu'île du Kamtchatka, ne viennent s’implanter en Haute Californie (‘Alta’) jusqu’alors pratiquement délaissée par l’Espagne et inexplorée; il décide une expédition pour asseoir son influence et demande aux Franciscains de les accompagner pour convertir les Indiens. Le Père Serra a déjà 54 ans et il est malade, mais il se porte volontaire et part avec quelques autres confrères. Il fonde la mission de San Diego où il reste seul, laissant les autres continuer vers le nord pour identifier une baie d’importance stratégique. Ceux-ci arrivent dans un endroit merveilleux : Les soldats y établissent un campement et deux Pères franciscains y célèbrent la messe devant une modeste cabane : C’est la Mission ‘Dolores’. Le lieu reçoit le nom de San Francisco, en l’honneur de saint François. Ainsi naît la future métropole de la Californie centrale actuelle.
Quand au Père Serra, il parcourt le pays en tous sens, car non seulement il y fonde neuf missions (la principale étant celle de saint Charles Borromée, à Carmel, en 1770) mais il revient ensuite visiter tous les Indiens qu’il a convertis. Les autochtones se convertissent en masse (plusieurs milliers), car le Père Serra est un prédicateur éloquent et sa vie même de pénitence est impressionnante. Il voyage à dos de mulet, ou à pied le plus souvent possible, malgré son asthme et sa mauvaise jambe, en s’aidant d’une canne. Il ne prend jamais de remèdes. Épuisé, il meurt tuberculeux à l’âge de 70 ans en 1784. Il est enterré dans le sanctuaire de la Mission saint Charles Borromée à Carmel, près de Monterey (Californie actuelle). Jean-Paul II a dit que le P. Serra “s’est révélé comme un vrai fils de saint François”, et qu’il fut “un modèle exemplaire d’évangélisateur”.
Remarques
Pour l’histoire religieuse et même civile de la Californie et de l’Amérique de l’Ouest, le P. Serra est un point de référence, que l’on soit d’accord ou non avec la façon dont fut menée l’évangélisation durant cette période et par la suite. Il est considéré comme le grand évangélisateur de l’Ouest et les missions dirigées ou fondées par lui auront également un rôle civilisateur. Les franciscains progressent souvent de pair avec les colonisateurs, mais le P. Serra a obtenu que ces derniers soient sous le contrôle des franciscains et il cherche spécialement à éviter que les Indiens entrent en contact avec les soldats, pour les mettre à l’abri de leurs exactions et de leurs mauvais exemples, ce qui n’est pas du goût des autorités. Il est peut-être pour une méthode autoritaire (châtiments corporels) mais il prend la défense de ses chers Indiens face au Gouverneur. Regroupés en villages, ceux-ci apprennent à perfectionner un artisanat qu’ils possédaient déjà dans leur civilisation. Grâce aux Espagnols, la race du bétail est améliorée, les techniques sont perfectionnées, les échanges commerciaux se multiplient. Mais cette sédentarisation, bénéfique au point de vue économique et pour le maintien de la vie chrétienne, a aussi des aspects négatifs : Souvent les Indiens dépérissent hors de leur milieu naturel, ou sont décimés par des maladies contagieuses transmises par les Espagnols ; et les colons, malgré leur petit nombre, s’imposent en dominateurs. Il y a des révoltes et même des morts, mais, lorsque les Indiens vont jusqu’à brûler la mission de San Diego, le Frère Junipère refuse qu’on exerce la vengeance.
Au fil des ans, le nombre des autochtones diminuera (passant de 300'000 en 1769 à 200'000 en 1820, d’après certaines estimations). Seulement, ce sera bien pire après la sécularisation des Missions (1827–1833). Leurs terres seront distribuées aux paysans indiens, mais ce sont de trop petits lopins qui ne sont pas viables face aux grands ‘haciendas’ espagnoles, si bien que les Indiens seront peu à peu expropriés et finalement réduits à la condition de domestiques, voire d’esclaves. Le pire se produira avec la ‘ruée vers l’or’ où en deux ans 50'000 indiens seront massacrés (1849-1850).
Pour conclure sur une note positive, outre le bienfait surnaturel de l’évangélisation, relevons que le Père Serra est considéré comme le Père de la Haute Californie et on admire son courage, à l’égal des célèbres pionniers de l’Amérique. Sa statue, symbolisant la Californie, se trouve dans la Salle Statuaire du Capitole Américain. Aujourd’hui, la chaîne de ‘missions’ (établissements missionnaires) créés par le Père Serra (ou son successeur) et qui s’étend de San Diego à Solano est visitée par plus de gens que n’importe quel autre monument historique de l’Etat.