|
les anges. Il est ici hors de doute que
monter et descendre signifient pour nous que l'on s'abaisse en voulant s'élever, et qu'on
s'élève en s'abaissant. Quant à cette échelle dressée, c'est proprement notre vie
d'ici-bas, pour alitant que le Seigneur élève jusqu'aux cieux le cur qui
s'humilie. Convenons maintenant que les deux côtés de l'échelle figurent notre corps et
notre âme : entre ces montants, Dieu a inséré, nous invitant à les gravir, les
échelons successifs de l'art spirituel qui porte nom humilité.
Le premier degré d'humilité est que,
par l'effet d'une constante attention à la crainte de Dieu, on échappe résolument à la
légèreté d'esprit et qu'on se remémore tous les préceptes divins. Si l'on ne cesse,
en effet, de retourner dans son esprit la menace de la géhenne où brûlent pour leurs
péchés ceux qui méprisent Dieu, et la promesse de vie éternelle réservée à ceux qui
le craignent, on saura se garder à toute heure des péchés et des vices, ceux des
pensées, de la langue, des mains, des pieds, ceux de la volonté propre, ou encore des
désirs de la chair. Que l'homme considère donc que Dieu le regarde à tout moment du
haut du ciel ? en quelque lieu que nous soyons, nos actions sont à découvert sous les
yeux de la Divinité et lui sont à tout instant rapportées par les anges. Le Prophète
nous donne à entendre cette vérité, et témoigne à quel point nos plus secrètes
pensées sont à nu devant Dieu, quand il dit : " Dieu scrute les reins et les
curs," et de même : "Le Seigneur connaît les desseins des
hommes " ; il dit encore : "Tu pénètres de loin mes pensées," et
: "Tout ce qui s'agite en l'homme vient se déclarer devant Toi."
Dès lors, pour exercer la vigilance sur ses pensées mauvaises, un frère avisé ne
manquera pas de se redire au fond du cur : Pour être sans tache devant Lui,
il faut me bien garder de jamais l'offenser.
Quant à la volonté propre, nous trouvons dans
l'Ecriture cette défense expresse de la suivre : "Détourne-toi de tes
volontés. " Nous demandons d'ailleurs nous-mêmes à Dieu dans la Prière
" que ce soit sa volonté qui s'accomplisse en nous. "On voit par là combien
justifiée est la doctrine du renoncement à la volonté propre; car on évite ainsi
l'écueil signalé dans l'Ecriture : " Il est des chemins qui aux yeux des hommes
semblent droits, mais qui, au terme, vous plongent jusqu'au fond de l'enfer."
Et nous serons bien inspirés d'envisager avec frayeur le sort de ceux qui se laissent
aller à leurs penchants, et dont il est écrit " qu'ils s'y corrompent et y
deviennent abominables à Dieu."
Enfin, pour maîtriser les désirs de la chair, recourons
encore et toujours au sentiment de la présence de Dieu, et disons avec le Prophète :
"Tous mes désirs, Seigneur, sont devant Toi." S'il faut ainsi nous garder du
désir mauvais, c'est que la mort est postée sur le seuil même de l'accès au plaisir ;
d'où le précepte de l'Ecriture : "Ne te laisse pas entraîner par tes
convoitises."
En résumé, si les yeux du Seigneur observent sans cesse les bons et
les méchants, si le Seigneur jette du haut du ciel ses regards sur les enfants des hommes
pour discerner ceux qui se montrent attentifs à Le chercher, si enfin les anges établis
sur nous font chaque jour, font nuit et jour, rapport à Dieu de nos actions, il nous faut
prendre garde à tout instant, mes frères, comme dit le Prophète dans les psaumes, que
Dieu ne nous voie à quelque moment enclins à pécher, abusant de sa grâce, de peur que,
nous ayant épargnés aujourd'hui par grande indulgence et parce qu'il nous laisse le
temps de nous amender |
|