Instr. II - Tome IV
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Plan - Théologie

TOME QUATRIEME.

ÉPÎTRE A PHILÉMON.

LXe   PASSAGE,   ET   REMARQUE.

ÉPÎTRE AUX HÉBREUX.

LXIe PASSAGE,   ET  REMARQUE.

LXIIe PASSAGE.

REMARQUE.

LXIIIe PASSAGE.

REMARQUE.

LXIVe PASSAGE.

REMARQUE.

LXVe PASSAGE.

REMARQUE.

I ÉPITRE DE SAINT PIERRE.

LXVIe   PASSAGE.

REMARQUE.

I ÉPITRE DE SAINT JEAN.

LXVIIe PASSAGE.

REMARQUE.

LXVIIIe PASSAGE, ET REMARQUE.

SAINT JUDE.

LXIXe PASSAGE.

REMARQUE.

SUR L'APOCALYPSE

LXXe PASSAGE.

CONCLUSION DE CES REMARQUES,

 

ÉPÎTRE A PHILÉMON.

 

LXe   PASSAGE,   ET   REMARQUE.

 

Dans la traduction du verset 21 : « J'espère que vous m'écouterez : » pourquoi non : « Que vous m'obéirez, » comme la Vulgate et tous les autres traduisent, conformément à l'original? La note est encore plus mauvaise , puisqu'elle ose même rejeter le terme à obéir comme impérieux, quoique saint Paul s'en, serve

 

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en cet endroit et partout : ce qui tourne directement contre l'Apôtre, et ne peut servir qu'à un visible affaiblissement de l'autorité ecclésiastique.

 

ÉPÎTRE AUX HÉBREUX.

LXIe PASSAGE,   ET  REMARQUE.

 

Au chapitre I, verset 3, texte même : «A la droite de Dieu, » rien ne devait empêcher de traduire comme dit la lettre et comme porte la note : « A la droite de la Majesté ou de la souveraine Majesté, » en y ajoutant l'explication. C'est se rendre auteur, et non pas traducteur, que de faire si souvent de tels changements.

 

LXIIe PASSAGE.

 

Sur ces mots : « Vous êtes mon fils, » tirés du Psal. II, verset 7, la note porte que « l'Apôtre veut montrer par ce passage des Psaumes que Jésus-Christ n'est pas Fils de Dieu comme les anges, qui sont quelquefois appelés fils de Dieu, mais qu'il l'est d'une manière spéciale. »

 

REMARQUE.

 

Il devait donc dire que jamais les anges ne sont appelés de ce nom en cette sorte, ni au nombre singulier et par excellence. On ne leur a jamais dit, ni « je vous ai engendré, » ni que c'a été « aujourd'hui; » ce qui dénote le jour de l'éternité, selon l'explication des deux Cyrilles et des autres Pères. L'auteur ne sait qu'affaiblir les passages qui établissent la divinité, et c'est le fruit qu'on peut retirer de ses critiques. Par cette même raison il se contente de dire que Jésus-Christ est Fils de Dieu d'une manière spéciale, ce que les sociniens ne refusent pas, comme nous l'avons souvent remarqué : mais pour parler en théologien et en catholique, il fallait encore ajouter que cette manière spéciale d'être fils est d'être vraiment fils, vraiment engendré et né de la substance de son père; autrement on supprime les vrais caractères personnels et substantiels du Fils de Dieu. On va voir encore d'autres effets de cet affaiblissement de la saine théologie, par rapport à la divinité de Jésus-Christ.

 

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LXIIIe PASSAGE.

 

Dans la même note sur le verset 5 : « Je vous ai engendré aujourd'hui : » — « Saint Paul, dit le traducteur, applique avec les Juifs de son temps au Messie par un deras , ou sens sublime et spirituel, ce qui s'entendait à la lettre de David élevé sur le trône. »

 

REMARQUE.

 

On voit ici un effet de l'esprit des sociniens et de Grotius, qui éludent les prophéties au sens véritable, et les réduisent en un sens mystique et spirituel : le critique entre ici trop visiblement dans cet esprit faute d'expliquer, comme il devait, que son « deras, ou sens sublime et spirituel, » est souvent le sens véritable, et que celui de saint Paul en cet endroit est proprement et directement de la première intention du Saint-Esprit, puisque même l'élévation de David à la royauté n'épuise pas la grandeur de cette expression : « Dieu m'a dit, » à moi proprement et uniquement : « Vous êtes mon fils, » unique et par excellence : « Je vous ai, » non pas adopté, mais « engendré » de mon sein; et le reste que je ne dois pas prouver, mais supposer en ce lieu, puisque même je l'ai démontré ailleurs ».

Ainsi ceux qui ne voient ici que David proprement et naturellement, ne prennent que l'écorce de la lettre et en abandonnent l'esprit : comme il parait par la suite du texte, tant du psaume que de saint Paul, et par la tradition de toute l'Eglise, ainsi qu'on le pourra voir dans notre exposition sur ce Psaume (2), si on daigne y jeter les yeux.

Selon ces principes, qui sont de la foi et de la tradition expresse de l'Eglise, il ne faut pas dire avec l'auteur que saint Paul « applique ce passage à Jésus-Christ avec les Juifs de son temps : » c'est trop resserrer la tradition que de la réduire « au temps de Jésus-Christ : » ce n'est pas ici une application à Jésus-Christ comme à un sujet étranger au texte ; mais une explication naturelle et véritable, qui étant du dessein premier et principal du

 

1 Voyez Suppl. in Psal., et la Dissert, prélim. sur Grotius. — 2 Voyez in Psal. II, et Suppl. in Psal.

 

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Saint-Esprit, a été transmise de main en main aux Juifs spirituels, et en effet s'est conservée par une tradition dont les Juifs ne marquent point d'origine, jusqu'au temps de Jésus-Christ et au delà.

C'est une chose à déplorer que l'explication ennemie des prophéties soit insinuée si fortement dans une traduction du Nouveau Testament, qu'on met entre les mains du peuple , et qu'on lui apprenne, conformément à l'ancien esprit des critiques précédentes (1), à éluder les prophéties qui sont le fondement de notre foi.

 

LXIVe PASSAGE.

 

Dans la note sur le verset 6 du même chapitre I de l’Epître aux Hébreux, « il explique le premier-né, c'est-à-dire le Fils unique, ce qu'il a de plus cher; et saint Paul prouve encore par là que Jésus-Christ est Fils de Dieu d'une manière spéciale, et non comme les anges. »

 

REMARQUE.

 

Il ne dira donc jamais qu'il est Fils unique, parce que seul il est engendré de la substance de son Père et de même nature que lui : et il ne sera Fils unique que parce qu'il est le plus cher, sans vouloir sortir à cet égard des idées des sociniens par aucune remarque précise.

Nous avons souvent remarqué que la manière spéciale des sociniens pour la filiation de Jésus-Christ, c'est que Dieu en lui donnant une mère Vierge, a suppléé par son Saint-Esprit la vertu d'un père charnel, et seul lui tient lieu de père : ce qui suffit bien pour le distinguer des anges, mais non pour le faire Fils de Dieu par nature et proprement. Si nos critiques ignorent un si grand mystère, ou ne daignent en faire mention, pourquoi font-ils les maîtres en Israël et s'ingèrent-ils à expliquer l'Evangile?

 

LXVe PASSAGE.

 

Il s'agit ici de l'endroit de Jérémie, XXX, 31, cité par saint Paul,

 

1 Voyez ci-dessus, Dissert, sur Grotius.

 

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Hebr., VIII, 8, que j'ai déjà remarqué (1) ; mais il y faut ajouter ce qui suit.

 

REMARQUE.

 

Nous trouverons donc M. Simon toujours favorable à la grâce pélagienne, c'est-à-dire extérieure et rien de plus, et toujours sous la conduite de Grotius et des sociniens : « J'écrirai ma loi dans leur cœur, » etc., Hebr., VIII, 10, c'est-à-dire, selon Grotius : « Je ferai qu'ils sauront tous ma loi par cœur, memoriter, par la multitude des synagogues où elle sera enseignée trois fois la semaine. » Crellius : « Je leur donnerai des moyens d'en conserver le souvenir perpétuel ; » ce que Grotius avait imité ; et après eux M. Simon : « Je leur donnerai des lois qu'ils retiendront et qu'ils observeront en les comprenant facilement. » Jusqu'ici ils ne sortent pas de la loi et de la doctrine, comme disait saint Augustin ; c'est-à-dire qu'ils ne vont pas plus avant que Pelage et Cœlestius, sans soupçonner seulement cette grâce si clairement définie par le concile de Milève, « où non content de nous enseigner ce qu'il faut faire, Dieu nous le fait encore aimer et pouvoir (2); » ce que j'ai voulu ajouter exprès pour donner lieu au lecteur de remarquer qu'il n'a encore rien vu et ne verra rien dans cette traduction et dans ces notes, qui ressente le vrai esprit du christianisme, c'est-à-dire celui de la grâce.

 

I ÉPITRE DE SAINT PIERRE.

 

LXVIe   PASSAGE.

 

« Et qui est-ce qui voudra vous nuire, si vous êtes zélés pour le bien?» I Petr., III, 13.

 

REMARQUE.

 

Il faudra donc toujours changer le texte, et y mêler du sien ? Le texte porte : « Qui est-ce qui vous nuira, ou qui vous fera du mal? » Ce qui ne signifie pas seulement : « Qui est-ce qui voudra vous nuire; » mais encore, qui le pourra quand il le voudrait?

 

1 Inst., Rem. sur Grotius, n. 17. — 2 Concil. Milevit. II, contra Pelag. et Cœlest., can. IV; tom. II Concil., Labb., p. 1537; sive Concil. African. aut Carthag., an. 418.

 

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Mais il a fallu suivre Grotius, qui explique ainsi : Hoc vult, pauci erunt qui vobis nocere velint, etc.; « peu de gens voudront vous nuire : » et la note de Grotius devient le texte de notre auteur.

 

I ÉPITRE DE SAINT JEAN.

 

LXVIIe PASSAGE.

 

« Il n'y a point de crainte où est l'amour; mais l'amour parfait bannit la crainte, » I Joan., IV, 18; où la note porte : « C'est-à-dire celui qui aime Dieu véritablement, ne craint point de souffrir pour lui. »

 

REMARQUE.

 

Il ne s'agit point ici de souffrir pour Dieu : l'Apôtre venait de dire au verset précédent : « L'amour que nous avons pour Dieu est parfait en nous, lorsque nous avons confiance au jour du jugement : » en sorte que nous n'en soyons point troublés; ainsi la crainte que saint Jean a dessein d'exclure est celle du jugement, qu'il veut que nous attendions avec plus de confiance que de frayeur. Il nous montre donc «l'amour parfait» comme le principe de la confiance qui bannit la crainte inquiète des sévères jugements de Dieu : c'est le sens qui se présente d'abord, et où nous mène la suite du discours : toute la théologie adopte ce sens après saint Augustin, qui l'appuie en cent endroits; mais le traducteur lui préfère une autre explication moins convenable, et ôte à l'Ecole un passage dont elle se sert pour expliquer la nature de l'amour parfait, qui inspire la confiance et qui exclut la terreur.

 

LXVIIIe PASSAGE, ET REMARQUE.

 

Il s'agit ici du fameux passage : Tres sunt qui testimonium dant in cœlo : « Il y en a trois qui rendent témoignage dans le ciel, » I Joan., v, 7 ; sur lequel il ne remarque autre chose, sinon que « certains critiques de Rome, sous le pape Urbain VIII, quoiqu'ils ne trouvassent dans aucuns manuscrits grecs toutes ces paroles, ont jugé qu'il les fallait conserver. » C'est en vérité trop affaiblir ce passage, que de n'alléguer pour le soutenir que le sentiment de ces censeurs romains qu'on ne connaît pas.

Si l'auteur voulait alléguer quelque autorité des derniers siècles,

 

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il avait devant les yeux l'inviolable autorité du concile de Trente et celle de la Vulgate; s'il voulait remonter plus haut dans la tradition, il n'ignorait pas les passages exprès de saint Fulgence, qui confirment la leçon commune. Et ce qui est encore de plus important, il n'ignorait pas cette célèbre confession de foi de toute l'Eglise d'Afrique, au roi Hunéric, où ce texte de saint Jean est employé de mot à mot (1). Un passage positif vaut mieux tout seul que cent omissions, surtout quand c'est un passage d'une aussi savante église que celle d'Afrique, qui dès le cinquième siècle a mis ce passage en preuve de la foi de la Trinité contre les hérétiques qui la combattaient. On ne doit pas oublier qu'une si savante église allègue comme incontestable le texte dont il s'agit ; ce qu'elle n'aurait jamais fait s'il n'avait été reconnu, même par les hérétiques. Il n'y a rien qui démontre mieux l'ancienne tradition qu'un tel témoignage; aussi vient-elle bien clairement des premiers siècles; et on la trouve dans ces paroles de saint Cyprien au livre de l’Unité de l'Eglise Le Seigneur dit : « Moi et mon Père nous ne sommes qu'un ; » et il est encore écrit du Père, du Fils, et du Saint-Esprit : « Et ces trois sont un, » et hi tres unum sunt. Où cela est-il écrit nommément et distinctement du Père, du Fils, et du Saint-Esprit, sinon en saint Jean, au texte dont il s'agit? Le même saint Cyprien se sert encore du même passage pour appuyer son sentiment sur la nullité du baptême de tous les hérétiques : « Si celui, dit-il, qui est baptisé par les hérétiques (marcionites) est fait le temple de Dieu, je demande de quel Dieu? Si c'est du Créateur, il ne peut pas en être le temple, puisqu'il ne le reconnaît pas : si c'est de Jésus-Christ, il n'en peut non plus être le temple, lui qui nie que Jésus-Christ soit Dieu : si c'est du Saint-Esprit, puisque ces trois ne sont qu'un, Cum hi très unum sint, comment le Saint-Esprit peut-il être ami de celui qui est ennemi du Père et du Fils (2)? »

Voilà donc un second passage de saint Cyprien, pour démontrer qu'il a lu dans saint Jean que le Père, le Fils, et le Saint-Esprit sont expressément les trois qui ne sont qu'un : ainsi la

 

1 Vict. Vit., lib. III.— 2 Epist. ad Jubaian., de hœr. bapt.

 

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leçon commune est établie au troisième siècle, et se trouve dans deux passages exprès d'un aussi grand docteur que saint Cyprien; les Anglais même l'avouent dans la dernière édition de ce Père : et il ne faut pas s'étonner qu'une leçon si ancienne se trouve établie au cinquième siècle dans l'autorité où nous l'avons vue.

Si j'avais à traiter ce passage à fond, il me serait aisé de démontrer par la suite du texte de saint Jean qu'il y manquerait quelque chose, si cet endroit en était ôté ; mais il me suffit d'avoir montré le mauvais dessein du traducteur, qui n'a voulu que faire douter, comme il avait toujours fait, du texte de la Vulgate, puisqu'il s'attache encore à lui opposer le grec et quelques autres versions. Voilà comme il se corrige, en laissant dans son Nouveau Testament un monument immortel de ses premières répugnances.

 

SAINT JUDE.

LXIXe PASSAGE.

 

Sur le verset 4 du chapitre unique de saint Jude, où se lisent ces paroles : « Leur sentence de condamnation est écrite depuis longtemps, » la note porte : « Saint Jude a voulu marquer par cette expression, qu'il y a longtemps que ces impies étaient destinés à commettre ces impiétés. »

 

REMARQUE.

 

Par qui destinés, si ce n'est par un décret fatal de la puissance divine ? Calvin n'a jamais rien proféré de plus impie pour faire Dieu auteur du péché. L'auteur ne s'est aperçu d'une impiété si manifeste que sur la fin de décembre 1702; car le carton qu'il a fait pour y remédier est de cette date. Ainsi l'impiété a couru un an durant : on ne donne aucune marque de repentir d'un tel blasphème, ni aucun avis aux simples qui ont avalé ce poison. On ne crie pas moins à l'injustice contre les censures d'un livre où l'impiété est si déclarée ; on croit être quitte de tout par un carton inventé si longtemps après un si grand mal, et qui devient ce qu'il peut.

 

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SUR L'APOCALYPSE

LXXe PASSAGE.

 

Je ne dirai rien sur l'Apocalypse, puisque j'ai déjà remarqué que dès la préface de ce divin Livre, le traducteur dégrade saint Jean, dont il ne fait « qu'une espèce de prophète (1). » Je pourrais encore ajouter que pour s'être attaché sans discernement aux explications de Grotius, qui bâtit sur le fondement d'une date visiblement fausse (2), il fait deviner à saint Jean des choses passées devant les yeux de cet apôtre ; en sorte qu'il faut par un seul trait effacer la plupart de ses prédictions : et c'est la raison la plus apparente pour laquelle le traducteur n'a osé donner aux révélations de saint Jean le titre absolu de prophéties.

 

CONCLUSION DE CES REMARQUES,

 

Où l'on touche un amas d'erreurs, outre toutes les précédentes.

 

Si l'on joint maintenant à ces remarques celles de l'Instruction précédente, on voit que les fautes en sont innombrables, même , celles où la foi est directement attaquée.

Je déclare au reste que si je m'arrête aux remarques que j'ai proposées, ce n'est pas que j'aie dessein d'approuver les autres fautes, qui sont infinies, de la nouvelle version et de ses notes : et afin qu'on ne pense pas que ce soit un discours en l'air, je pourrais encore ajouter que le traducteur a dit « qu'il n'y a de véritable résurrection que celle des justes, » Joan., XI, 25 : ce qui donne lieu à une erreur qui était commune parmi les Juifs, et qui leur est commune en partie avec les sociniens, lorsqu'ils assurent qu'en effet nuls autres que les justes ne ressuscitent pour être immortels ; « qu'il a dit avec trop peu de précaution, que ce fut principalement après la résurrection que Jésus-Christ entrant dans le ciel,... fut pontife selon l'ordre de Melchisédech, Hebr., V, 6, puisque l'Apôtre au verset suivant établit le plein exercice de son sacerdoce, lorsqu'il était sur la terre, où ayant offert d'humbles

 

1 Ire Inst., Rem. sur la Préf., XIe pass., n. 7. — 2 Voyez nos Notes sur l’Apoc., Préf.. n. 26.

 

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prières avec de grands cris et avec larmes, il fut exaucé à cause de son respect ; » ce qui enferme le fondement de ses fonctions sacerdotales : qu'il a dit d'une manière téméraire et vague que la multiplicité des paroles reprises par Jésus-Christ dans la prière, Matth., VI, 7, ne consistait « que dans une longue répétition des mêmes mots, » ainsi qu'il l'a inséré dans le texte même en traduisant : « Ne rebattez pas les mêmes paroles; » ce qui tendrait à condamner, non-seulement plusieurs saintes pratiques de l'Eglise même dans son service public, mais encore les Psaumes de David, et jusqu'à la prière de Jésus-Christ dans son agonie, où il passa plusieurs heures à répéter le même discours, eumdem sermonem dicens, Matth., XXVI, 44 : qu'il a dit sur saint Luc., XX, 35, que « par le siècle on entend le monde; » directement contre le texte, qui parle de ceux « qui seront jugés dignes de ce siècle-là, » c'est-à-dire du siècle à venir, par opposition aux enfants de ce siècle-ci, c'est-à-dire du siècle présent, filii hujus sœculi, verset 34 : qu'il a dit trop généralement et mal à propos que « les gentils ne croyaient pas que la fornication fût un péché, » Act., XV, 20; et n'a pas assez distingué ce qui était défendu dans le décret des apôtres par une convenance d'avec ce qui l'était par la loi naturelle que les gentils devaient sentir au fond de leur conscience, encore qu'ils ne voulussent pas ouvrir entièrement les yeux à la lumière qui condamnait tous ces désordres : qu'il a dit que la prophétie d'Amos, citée par saint Jacques, « était seulement un sens mystique et spirituel, » Act., XV, 16, au lieu que bien constamment c'est une prédiction des plus précises pour la conversion des gentils et pour les temps du Messie : qu'il a dit a que ces mots, esprit et ange, doivent être pris pour la même chose, » Act., XXIII, 8; ce qui serait avancé trop négligemment, et à l'exclusion de l'ame qui est aussi un esprit : qu'il a dit aussi à cette occasion où il s'agissait d'un dogme, « qu'on ne doit pas exiger des apôtres une expression fort exacte, » ce qui prononcé indistinctement, induit une confusion universelle dans les dogmes, et renverse les conclusions que les Pères et toute la théologie tirent des paroles de l'Ecriture.

Je ne finirais jamais, si je voulais rapporter les négligences,

 

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l'inexactitude, les affectations, les singularités du traducteur. On ne peut presque ouvrir son livre sans y trouver de nouvelles fautes. Au lieu de traduire : « Nous étions naturellement dignes de la colère de Dieu, » Eph., II, 3, il fallait mettre comme dans la note: « enfants de colère, » etc., qui est un terme consacré. C'est la coutume perpétuelle du traducteur, que ce qu'il réserve pour son texte soit presque toujours le plus mauvais. Il allègue saint Jérôme dans son commentaire sur cet endroit de l’Epître aux Ephesiens, pour rendre le mot naturellement par celui d'entièrement : mais il oublie les derniers mots de ce docte Père, où il conclut « qu'en tout cas, si on reçoit cette signification, elle doit être exposée selon ses explications précédentes, » dans lesquelles, pour expliquer la corruption naturelle du genre humain, il y avait « compris la concupiscence qui nous porte au mal dès nos premiers ans, et le péché que le diable a introduit dans le monde, c'est-à-dire le péché originel. »

Il n'est pas permis d'oublier ce que nous avons remarqué ailleurs (1), mais en passant : c'est le silence étonnant de M. Simon sur les textes qui établissent la divinité du Saint-Esprit. Tout en est plein dans l'Evangile. Nous avons suivi l'auteur comme pas à pas sur tout le texte sacré, sans y trouver un seul mot pour le grand sujet dont nous parlons. Jésus-Christ promet d'envoyer le Saint-Esprit après son départ de ce monde, pour y tenir sa place, pour y suppléer sa présence et nous consoler de son éloignement, pour nous enseigner toute vérité et nous suggérer au dedans ce que le Sauveur avait prêché au dehors; il prend du sien, il le glorifie comme étant son Esprit, ainsi que celui du Père, et l'esprit de vérité : toutes fonctions que le Saint-Esprit ne pouvait faire à la place de Jésus-Christ, s'il était son inférieur : il est donc de même rang, de même ordre, de même autorité : c'est lui qui fait les prophètes, les prédicateurs, tous les justes et tous les enfants de Dieu, en habitant dans leurs cœurs, y répandant la grâce et la charité avec lui-même, qui en est la source. Tout cela passe devant les yeux de M. Simon, sans qu'il daigne en relever un seul mot : il pouvait du moins remarquer que mentir au Saint-Esprit, c'est

 

1 Ire Inst., Rem. sur la Pref., 2e pass., n. 3.

 

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mentir à Dieu. Quand il n'y aurait que les passages où nous sommes appelés le temple du Saint-Esprit, c'en serait assez pour nous faire dire avec saint Grégoire de Nazianze : Un membre de Jésus-Christ ne doit pas être le temple d'une créature. Quand il n'y aurait que la consécration de l'homme nouveau en égalité au nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit, il n'en faudrait pas davantage pour conclure avec le môme saint : Non, je ne veux pas être consacré au nom de mon conserviteur, ni enfin en un autre nom qu'en celui d'un Dieu : un petit mot sur quelqu'un de ces passages eût bien valu quelques-unes de ces misérables critiques dont l'auteur a rempli son livre : le Saint-Esprit est représenté comme le tout-puissant instigateur de toutes les bonnes pensées et l'auteur de tout l'intérieur de la grâce, qui contient la consommation de l'œuvre de Dieu; mais nous avons déjà remarqué que M. Simon ne connaît guère cet intérieur, et qu'il affecte partout d'en éloigner l'idée.

C'en est assez, et il me suffit d'avoir démontré que l'auteur fait ce qu'il lui plaît du texte de l'Evangile, sans autorité et sans règle; qu'il n'a aucun égard à la tradition, et qu'il méprise partout la loi du concile de Trente, qui nous oblige à la suivre dans l'interprétation des Ecritures; qu'il ne se montre savant qu'en affectant de perpétuelles et dangereuses singularités, et qu'il ne cesse de substituer ses propres pensées à celles du Saint-Esprit ; que sa critique est pleine de minuties, et d'ailleurs hardie, téméraire, licencieuse, ignorante, sans théologie, ennemie des principes de cette science ; et qu'au lieu de concilier les saints docteurs et d'établir l'uniformité de la doctrine chrétienne par toute la terre, elle allume une secrète querelle entre les Grecs et les Latins dans des matières capitales; qu'enfin elle tend partout à affaiblir la doctrine et les sacrements de l'Eglise, en diminue et en obscurcit les preuves contre les hérétiques et en particulier contre les sociniens, leur fournit des solutions, leur met en main des défenses pour éluder ce qu'il a dit lui-même contre leurs erreurs, et ouvre une large porte à toute sorte de nouveautés.

 

FIN DES INSTRUCTIONS SUR LA VERSION DE TRÉVOUX.

 

 

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