|
XXVIII DÉCEMBRE. LES SAINTS INNOCENTS.La fête du Disciple bien-aimé succède la solennité des saints Innocents ; et le berceau de l'Emmanuel, auprès duquel nous avons vénéré le Prince des Martyrs et l'Aigle de Pathmos, nous apparaît aujourd'hui environné d'une troupe gracieuse de petits enfants, vêtus de robes blanches comme la neige, et tenant en main des palmes verdoyantes. Le divin Enfant leur sourit ; il est leur Roi, et toute cette petite cour sourit aussi à l'Eglise de Dieu. La force et la fidélité nous ont introduits auprès du Rédempteur ; l'innocence aujourd'hui nous convie à rester près de la crèche. Hérode a voulu envelopper le Fils de Dieu même dans un immense massacre d'enfants ; Bethléhem a entendu les lamentations des mères; le sang des nouveau-nés a inondé toute la contrée ; mais tous ces efforts de la tyrannie n'ont pu atteindre l'Emmanuel ; ils n'ont fait que préparer pour l'armée du ciel une nombreuse recrue de Martyrs. Ces enfants ont eu l'insigne honneur d'être immolés pour le Sauveur du monde; mais le moment qui a suivi leur immolation leur a révélé tout à coup des joies futures et prochaines, bien au-dessus de celles d'un monde qu'ils ont traversé sans le connaître. Le Dieu riche en miséricordes n'a pas demandé d'eux autre chose 361 qu'une souffrance de quelques instants ; et ils se sont réveillés au sein d'Abraham, francs et libres de toute autre épreuve, purs de toute souillure mondaine, appelés au triomphe comme le guerrier qui a donné sa vie pour sauver celle de son chef. Leur mort est donc un Martyre, et c'est pourquoi l'Eglise les honore du beau nom de Fleurs des Martyrs, à cause de leur âge tendre et de leur innocence. Ils ont donc droit de figurer aujourd'hui sur le Cycle, à la suite des deux vaillants champions du Christ que nous avons célébrés. Saint Bernard, dans son Sermon sur cette fête, explique admirablement l'enchaînement de ces trois solennités : « Nous avons, dit-il, dans le bienheureux Etienne, l'œuvre et la volonté du Martyre ; dans le bienheureux Jean, nous remarquons seulement la volonté du Martyre; et dans les bienheureux Innocents, l'œuvre seule du Martyre. Mais qui doutera, néanmoins, de la couronne obtenue par ces enfants? Demanderez-vous où sont leurs mérites pour cette couronne ? Demandez plutôt à Hérode le crime qu'ils ont commis pour être ainsi moissonnés ? La bonté du Christ sera-t-elle vaincue par la cruauté d'Hérode ? Ce roi impie a pu mettre à mort des enfants innocents ; et le Christ ne pourrait couronner ceux qui ne sont morts qu'à cause de lui? « Etienne aura donc été Martyr aux yeux des hommes qui ont été témoins de sa Passion subie volontairement, jusque-là qu'il priait pour ses persécuteurs, se montrant plus sensible à leur crime qu'à ses propres blessures. Jean aura donc été Martyr aux yeux des Anges qui, étant créatures spirituelles, ont vu les dispositions de son 362 âme. Certes, ceux-là aussi auront été vos Martyrs, ô Dieu ! dans lesquels ni l'homme, ni l'Ange n'ont pu, il est vrai, découvrir de mérite, mais que la faveur singulière de votre grâce s'est chargée d'enrichir. C'est de la bouche des nouveau-nés et des enfants à la mamelle que vous vous êtes plu à faire sortir votre louange. Quelle est cette louange ? Les Anges ont chanté : Gloire à Dieu, au plus haut des deux ; et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté ! C'est là, sans doute, une louange sublime; mais elle ne sera complète que lorsque Celui qui doit venir aura dit : Laissez venir à moi les petits enfants ; car le Royaume des deux est à ceux qui leur ressemblent ; paix aux hommes, même à ceux qui n'ont pas l'usage de leur volonté : tel est le mystère de ma miséricorde. » Dieu a daigné faire pour les Innocents immolés à cause de son Fils ce qu'il fait tous les jours par le sacrement de la régénération, si souvent appliqué à des enfants que la mort enlève dès les premières heures de la vie ; et nous, baptisés dans l'eau, nous devons rendre gloire à ces nouveau-nés, baptisés dans leur sang, et associés à tous les mystères de l'enfance de Jésus-Christ. Nous devons aussi les féliciter, avec l'Eglise, de l'innocence que cette mort glorieuse et prématurée leur a conservée. Purifiés d'abord parie rite sacré qui, avant l'institution du Baptême, enlevait la tache originelle, visités antérieurement par une grâce spéciale qui les prépara à l'immolation glorieuse pour laquelle ils étaient destinés, ils ont habité cette terre, et ils ne s'y sont point souillés. Que la société de ces tendres agneaux soit donc à jamais avec l'Agneau sans tache ! et que ce monde, vieilli dans le péché, mérite miséricorde en s'associant, 363 par ses acclamations, au triomphe de ces élus de la terre qui, semblables à la colombe de l'arche, n'y ont pas trouvé où poser leurs pieds ! Néanmoins, dans cette allégresse du ciel et de la ferre, la sainte Eglise Romaine ne perd pas de vue la désolation des mères qui virent ainsi arracher de leur sein, et immoler par le glaive des soldats ces gages chéris de leur tendresse. Elle a recueilli le cri de Rachel, et ne cherche point à la consoler, si c n'est en compatissant à son affliction. Pour honorer cette maternelle douleur, elle consent à suspendre aujourd'hui une partie des manifestations de la joie qui inonde son cœur durant cette Octave du Christ naissant. Elle n'ose revêtir dans ses vêtements sacrés la couleur de pourpre des Martyrs, pour ne pas rappeler trop vivement ce sang qui jaillit jusque sur le sein des mères ; elle s'interdit même la couleur blanche, qui marque l'allégresse et va mal à de si poignantes douleurs. Elle revêt la couleur violette, qui est celle du deuil et des regrets. Aujourd'hui même, si la fête ne tombe pas le Dimanche, elle va jusqu'à suspendre le chant du Gloria in excelsis, qui pourtant lui est si cher en ces jours où les Anges l'ont entonné sur la terre ; elle renonce au joyeux Alleluia, dans la célébration du Sacrifice; enfin elle se montre, comme toujours, inspirée par cette délicatesse sublime et chrétienne dont la sainte Liturgie est une si merveilleuse école. Mais, après cet hommage rendu à la tendresse maternelle de Rachel, et qui répand sur tout l'Office des saints Innocents une touchante mélancolie, elle ne perd pas de vue la gloire dont jouissent ces bienheureux enfants ; et elle consacre à leur solennelle mémoire une Octave entière, comme elle l'a fait pour saint Etienne et pour 364 saint Jean. Dans ses Cathédrales et ses Collégiales, elle honore aussi, en ce jour, les enfants qu'elle appelle à joindre leurs voix innocentes à celles des prêtres et des autres ministres sacrés. Elle leur accorde de gracieuses distinctions, jusque dans le chœur même ; elle jouit de l'allégresse naïve de ces jeunes coopérateurs qu'elle emploie à rehausser ses pompes mystérieuses ; en eux, elle rend gloire au Christ Enfant, et à l'innocente cohorte des tendres rejetons de Rachel. A Rome, la Station qui, le jour de saint Etienne, s'est tenue dans l'Eglise de ce premier des Martyrs, sur le Mont Coelius, et le jour de saint Jean, dans la Basilique de Saint-Jean-de-Latran, où le Disciple bien-aimé partage les honneurs de Jean le Précurseur, a lieu aujourd'hui dans la Basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs, dont le trésor se glorifie de posséder plusieurs des corps des saints Innocents. Au xvie siècle; Sixte-Quint en enleva une partie, pour les placer dans la Basilique de Sainte-Marie-Majeure, près de la Crèche du Sauveur. A LA MESSE.La sainte Eglise exalte la sagesse de Dieu, qui a su déjouer les calculs de la politique d'Hérode, et tirer sa gloire de la cruelle immolation des enfants de Bethléhem, en les élevant à la dignité de Martyrs du Christ, dont ils célèbrent les grandeurs dans une reconnaissance éternelle. INTROÏT.Vous avez tiré, ô Dieu! votre louange de la
bouche des nouveau-nés et des enfants à la mamelle, pour confondre vos ennemis. Ps. Que votre Nom est
admirable par toute la terre, Seigneur notre Dieu ! Gloire au Père. Vous avez
tiré. Dans la Collecte, l'Eglise demande que ses fidèles confessent à leur tour la foi de Jésus-Christ par leurs œuvres. Autre est le témoignage des enfants qui ne parlent qu'en souffrant ; autre est le témoignage du chrétien parvenu à l'âge de raison, et auquel la foi a été donnée pour qu'il la confesse, devant les tyrans s'il s'en élève, mais toujours devant le monde et les passions. Nul n'a été appelé au divin caractère du chrétien pour en garderie secret. COLLECTE.O Dieu ! dont les Innocents
Martyrs ont confessé aujourd'hui la gloire, non parleurs paroles, mais par leur
mort ; mortifiez en nous les passions et les vices, afin que votre foi que
notre langue publie , soit aussi confessée par nos mœurs. Par Jésus-Christ
notre Seigneur. Amen. Mémoire de Noël.
PRIONS.Faites, s'il vous plaît, Dieu
tout-puissant, que la nouvelle Naissance de votre Fils unique nous délivre,
nous qu'une antique servitude retient sous le joug du péché. Mémoire de saint Etienne.
ACCORDEZ-NOUS, s’il vous
plaît, Seigneur, d'imiter ce que nous honorons, afin que nous apprenions à
aimer nos ennemis, puisque nous célébrons la solennité de celui qui a su
implorer même pour ses persécuteurs , Jésus-Christ notre Seigneur votre Fils. Mémoire de saint Jean.
Répandez, Seigneur, dans la votre
bonté, votre lumière sur votre Eglise, afin qu'étant illuminée par les
enseignements du bienheureux Jean, votre Apôtre et Evangéliste, elle parvienne
aux dons éternels. Par Jésus-Christ notre Seigneur. EPITRE.Lecture du Livre de l'Apocalypse du bienheureux Jean, Apôtre. Chap. XIV. En ces jours-là, je vis
l'Agneau qui était debout sur la montagne de Sion, et avec lui cent
quarante-quatre mille personnes qui avaient son Nom et celui de son Père écrits
sur leurs fronts. Et j'entendis une voix du ciel, comme la voix des grandes
eaux, et comme la voix d'un grand tonnerre. Et la voix que j'entendis était comme
le son de plusieurs harpes touchées par un chœur de musiciens. Et ils chantaient
comme un cantique nouveau devant le trône de Dieu et les quatre animaux et les
vieillards ; et nul ne pouvait chanter ce cantique, que ces cent
quarante-quatre mille qui ont été rachetés de la terre. Ce sont ceux-là qui ne
se sont pas souillés avec les femmes; car ils sont vierges. Ceux-là suivent
l'Agneau partout où il va. Ils ont été rachetés d'entre les hommes, pour être
les prémices offertes à Dieu et à l'Agneau; et le mensonge ne s'est pas trouvé
dans leur bouche; car ils sont sans tache devant le trône de Dieu. Par le choix de ce passage mystérieux de l'Apocalypse, l'Eglise nous montre l'estime qu'elle fait de l'innocence, et l'idée que nous en devons avoir. Les Innocents suivent l'Agneau , parce qu'ils sont purs. Leurs œuvres personnelles sur la terre n'ont pas frappé les regards, mais ils ont traversé rapidement la voie de ce monde, sans avoir été atteints de ses souillures. Moins éprouvée que celle de Jean, leur pureté, empourprée de leur sang, n'en a pas moins attiré les regards de l'Agneau ; et ils lui sont donnés pour compagnie. Que le chrétien donc soupire après cette innocence qui mérite de si hautes distinctions. S'il l'a conservée, qu'il la garde et la défende avec la jalousie qu'on met à veiller sur un trésor ; s'il l'a perdue, qu'il la répare par les labeurs de la pénitence ; et 368 quand il l'aura recouvrée, qu'il réalise la parole du Maître qui a dit : « Celui qui a été lavé est pur désormais. » (JOHAN. XIII, 10.) Dans le Graduel, les Innocents bénissent le Seigneur qui a brisé pour eux le filet dans lequel le monde les voulait tenir captifs. Comme le passereau ils se sont envolés ; et leur vol rapide, que rien n'appesantissait, les a portés jusqu'au ciel. Le Trait exhale l'indignation de Rachel sur la cruauté d'Hérode et de ses soldats. Il appelle la vengeance céleste qui ne manqua pas d'éclater contre cette ignoble famille de tyrans. GRADUEL.Notre âme s'est arrachée,
comme le passereau , du filet
de l'oiseleur. V/. Le filet a été rompu, et
nous nous sommes échappés ; notre secours est dans le Nom du Seigneur, qui a
fait le ciel et la terre. TRAIT.V/. Ils ont répandu le sang
des Saints comme l'eau autour de
Jérusalem. V/. Et il n'y avait personne
pour les ensevelir. V/. Vengez, Seigneur, le sang
de vos Saints, qui a été répandu sur la terre. Si la fête des saints Innocents tombe le Dimanche, pour adoucir un peu la tristesse de ses chants, l'Eglise reprend l’Alleluia. Alleluia, alleluia. Enfants, louez le Seigneur;
glorifiez le Nom du Seigneur. Alleluia. EVANGILE.La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap. II En ce temps-là, l'Ange du
Seigneur apparut en songe à Joseph, et lui dit : Lève-toi et prends l'enfant et
sa mère, et fuis en Egypte, et y demeure jusqu'à ce que je te dise d'en partir;
car Hérode cherchera l'enfant pour le faire périr. Joseph, sç
levant, prit l'enfant et sa mère, durant la nuit, et se retira en Egypte, et il
y demeura jusqu à la mort d'Hérode, afin que fût accomplie cette parole que le
Seigneur avait dite par le Prophète: J'ai rappelé mon Fils de l'Egypte. Alors
Hérode, voyant qu'il avait été joué par les Mages, entra dans une grande
colère, et envoya tuer tous les enfants qui étaient dans Bethléhem
et tout le pays d'alentour, âgés de deux ans et au-dessous, selon le temps
qu'il s'était fait expliquer par les Mages. Alors fut accompli ce qui avait été
dit par le Prophète Jérémie : Une voix s'est fait entendre dans Rama, des
pleurs et des cris lamentables : c'est Rachel qui pleure ses enfants, et elle ne veut
pas se consoler, parce qu'ils ne sont plus. Le saint Evangile raconte avec sa sublime simplicité le Martyre des Innocents. Hérode envoya tuer tous les enfants. Cette riche moisson pour le ciel fut coupée, et la terre ne s'en émut pas. Les lamentations de Rachel montèrent seules jusqu'au ciel, et bientôt le silence se fit dans Bethléhem. Mais les heureuses victimes n'en étaient pas moins enlevées par le Seigneur, pour former la cour de son Fils. Jésus, du fond de son berceau, les contemplait et les bénissait ; Marie compatissait à leurs courtes souffrances, et à la douleur des mères ; l'Eglise qui allait bientôt naître devait glorifier, dans tous les siècles, cette immolation de tendres agneaux, et fonder les plus grandes espérances sur le patronage de ces enfants devenus tout d'un coup si puissants sur le cœur de son céleste Epoux. Pendant l'Offrande, la voix des Innocents se fait encore entendre ; ils répètent leur touchant Cantique; simples passereaux, rendus à la liberté, ils remercient la main qui a brisé le lacs où ils pouvaient périr. OFFERTOIRE.Notre âme s'est arrachée
comme le passereau du filet de l'oiseleur: le filet a été rompu, et nous nous
sommes échappés. SECRETE.Que la dévote prière de vos Saints ne nous fasse pas défaut, Seigneur;
qu'elle vous rende agréables nos offrandes, et qu'elle nous obtienne toujours
votre indulgence. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen. Mémoire de Noël.
Sanctifiez, Seigneur, les
dons que nous vous offrons, dans la nouvelle Nativité de votre Fils unique, et
purifiez-nous des taches de nos péchés. Mémoire de saint Etienne.
Recevez, Seigneur, les dons
que nous vous offrons en mémoire de vos Saints; afin que, comme leur Passion
les a rendus glorieux, ainsi notre religion envers eux nous restitue
à l'innocence. Mémoire de saint Jean.
Recevez, Seigneur, les
offrandes que nous vous présentons dans la solennité de celui par la protection
duquel nous avons la confiance d'être délivrés. Par Jésus-Christ notre
Seigneur. Amen. Dans l'Antienne de la Communion, on entend retentir encore la voix de Rachel. L'Eglise, nourrie du divin mystère de charité, n'a garde d'oublier la désolation des mères. Elle y compatit jusqu'à la fin ; mais, au fond de son cœur, elle s'élève jusqu'à celui qui peut seul consoler de telles douleurs. COMMUNION.Une voix s'est fait entendre
dans Rama, des pleurs et des cris lamentables : c'est Rachel qui pleure ses
enfants, et elle ne veut pas se consoler, parce qu'ils ne sont plus. POSTCOMMUNIONNous avons participé,
Seigneur, aux offrandes que nous vous avions vouées; faites, par les prières de
vos Saints, qu'elles nous procurent les secours de la vie présente et ceux de
la vie éternelle. Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen. Mémoire de Noël.
Faites, s'il vous plaît, Dieu
tout-puissant, que le Sauveur du monde, qui, en naissant aujourd'hui, est pour
nous-mêmes l'auteur d'une naissance divine, nous accorde aussi l'immortalité. Mémoire de saint Etienne.
Faites, Seigneur, que les
Mystères auxquels nous avons participé, soient pour nous un secours, et que,
par l'intercession du bienheureux Etienne, votre Martyr, nous en recevions une
continuelle protection. Mémoire de saint Jean.
Etant rassasiés de la
nourriture et du breuvage célestes, nous vous supplions, notre Dieu, de
permettre que nous soyons protégés par les prières de celui en mémoire duquel
nous avons reçu cette divine nourriture. Par Jésus-Christ notre Seigneur. A VEPRES.On chante d'abord, comme aux Fêtes de saint Etienne et de saint Jean, les Antiennes et les Psaumes de Noël, pages 274-282 ; après quoi l'Office des saints Innocents reprend son cours. CAPITULE. (Apoc. XIV.)Je vis l'Agneau qui était debout sur la montagne de Sion, et avec lui cent quarante-quatre mille personnes qui avaient son Nom, et le Nom de son Père, écrits sur leurs fronts. HYMNE.Salut, ô fleurs des Martyrs !
que, sur le seuil même de la vie, un fer cruel a
moissonnés, comme la tempête brise des roses naissantes. Premières victimes du Christ,
tendre troupeau d'enfants immolés ! sous l'autel, avec
simplesse, vous vous jouez dans vos palmes et vos
couronnes. A vous soit la gloire, ô
Jésus ! qui êtes né de la Vierge ; gloire au Père et
au Saint-Esprit dans les siècles éternels ! Amen. V/. Sous le trône de Dieu les
Saints font entendre ce cri : R/. Vengez notre sang, ô
notre Dieu ! ANTIENNE DE Magnificat.Ant. Les enfants Innocents ont été immolés pour le
Christ, un roi inique a fait périr ceux qui étaient encore à la mamelle ; ils
suivent l'Agneau sans tache, et disent à jamais : Gloire à vous, ô Seigneur ! ORAISON.O Dieu, dont les Innocents Martyrs ont confessé
aujourd'hui la gloire, non par leurs paroles, mais par leur mort, mortifiez en
nous les passions et les vices, afin que votre foi, que notre langue publie,
soit aussi confessée par nos mœurs, par Jésus-Christ
notre Seigneur. 375 Mémoire de saint Thomas de Cantorbéry, Evêque et Martyr.
Ant. Ce saints a combattu
jusqu'à la mort pour la loi de son Dieu ; et il n'a pas tremblé devant les
menaces des impies ; car il était fondé sur la pierre ferme. V/. Vous l'avez couronné de
gloire et d'honneur, Seigneur ! R/. Et vous l'avez établi sur les ouvrages de vos
mains. ORAISON.O Dieu, pour l'Eglise duquel
le glorieux pontife Thomas est tombé sous le glaive des impies; faites, s'il
vous plaît, que tous ceux qui implorent son secours, obtiennent l'effet
salutaire de leurs demandes. Mémoire de Noël.
Aujourd’hui est né le Christ ; aujourd'hui le Sauveur a
apparu ; aujourd'hui, sur la terre, chantent les Anges, se réjouissent les
Archanges ; aujourd'hui les justes tressaillent et répètent : Gloire à Dieu au
plus haut des cieux, alleluia. V/. Le Seigneur a manifesté, alleluia, R/. Le Sauveur qu'il avait
promis, alleluia. ORAISON.
Faites, s'il vous plaît, Dieu
tout puissant, que la nouvelle naissance de votre Fils unique nous délivre,
nous qu'une antique servitude retient sous le joug du péché. Mémoire de saint Etienne.
Ant. Les hommes
craignant Dieu ensevelirent Etienne, et firent ses funérailles avec un grand
deuil. V/. Etienne vit les cieux
ouverts. R/. Il les vit, et il y entra
: heureux mortel pour qui s'ouvraient les cieux ! ORAISON.ACCORDEZ-NOUS, s’il vous
plaît, Seigneur, d'imiter ce que nous honorons, afin que nous apprenions à
aimer nos ennemis ; puisque nous célébrons la naissance de celui qui sut aussi
implorer pour ses persécuteurs, Jésus-Christ, notre Seigneur, votre Fils. Mémoire de saint Jean.
Ant. Il courut un bruit parmi les frères, que ce disciple
ne mourrait point ; cependant, Jésus n'avait pas dit : Il ne mourra point ;
mais : Je veux qu'il demeure jusqu'à ce que je vienne. V/. Il est vraiment digne
d'honneur, le bienheureux Jean, R/. Qui, durant la Cène,
reposa sur la poitrine du Seigneur. ORAISON.Daignez, Seigneur, dans votre
bonté, répandre la lumière sur votre Eglise, afin qu'étant
illuminée par les enseignements du bienheureux Jean, votre Apôtre et
Evangéliste, elle parvienne à la possession des dons éternels. Par Jésus-Christ
notre Seigneur. Amen. Nous écouterons maintenant les diverses Eglises célébrant le triomphe des saints Innocents, dans des chants pleins de mélodie et de mystères. L'Eglise de Milan, dans son Missel Ambrosien, nous fournira d'abord cette belle Préface qui se trouve aussi au Sacramentaire Léonien. PREFACE.C'est une chose digne et
juste, équitable et salutaire, de vous rendre gloire, Père tout-puissant, dans
la mort précieuse des enfants que la barbarie farouche du cruel Hérode a
massacrés, à l'occasion de l'enfance de notre Seigneur et Sauveur votre Fils ;
car vous nous y avez manifesté l'immensité des dons de votre clémence. En
effet, votre grâce brille en eux plus que leur volonté ; et leur confession
éclate déjà quand leur bouche n'a pas parlé encore ; leur Passion précède le
développement des membres dans lesquels ils l'ont soufferte; ils rendent
témoignage au Christ, avant même de l'avoir reconnu. O bénignité infinie, qui
ne veut pas frustrer du mérite de la gloire ceux qui, pour son Nom, furent
immolés, et qui ne le surent pas : en sorte que, par l'effusion de leur sang,
le salut de la régénération leur est octroyé, et en même temps, leur est
imputée la couronne du martyre ! Le Missel Mozarabe nous donnera la pièce suivante, pleine d'onction et d'éloquence: IMMOLATIO MISSAE.C'est une chose digne et
juste, oui vraiment digne et juste, que nous vous rendions grâces toujours et
en tous lieux, Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu éternel, principalement
pour ceux dont nous célébrons aujourd'hui la Passion dans une solennité
annuelle. Ce sont ceux que le satellite d'Hérode a arrachés des mamelles des
mères qui les allaitaient. Ils sont appelés à bon droit fleurs des Martyrs,
ceux qui, au milieu du froid de l'infidélité, ont éclaté comme les premières
perles de l'Eglise, et sont tombés sous le vent glacé de la persécution ; dont
le sang a coulé comme une source, dans la cité de Bethléhem.
Ils sont enfants, car l'âge leur refusait la parole; cependant ils firent
entendre avec joie la louange du Seigneur. Ils prêchent, immolés, Celui que
vivants ils ne pouvaient annoncer. Ils parlent par leur sang, quand leur langue
se tait encore ; et le martyre initie à la louange ceux dont la bouche ne
pouvait encore parler. Le Christ enfant envoie au ciel, avant lui, des enfants
; il transmet à son Père des gages nouveaux ; il lui consacre, pour prémices,
un premier martyre d'enfants, accompli par le forfait d'Hérode. L'ennemi rend
service à leurs corps, au moment même où il les immole : il les égorge, et la
vie sort de cette mort ; en tombant, ils ressuscitent ; leur victoire se prouve
par leur trépas. Nous devons au Vénérable Bède la touchante et mélodieuse Hymne qui suit : HYMNE.Chantons l'hymne des Martyrs ; célébrons les Innocents,
que la terre, avec tristesse, a vus périr, que le ciel joyeux a reçus. Leurs Anges contemplent à
jamais la face du Père céleste ; ils célèbrent le miracle de sa grâce, chantant
l'hymne des Martyrs. Un roi impie les a moissonnés
; leur Créateur les a recueillis dans sa bonté ; il les a placés avec lui dans
la félicité, dans la lumière du royaume éternel. Celui qui donne à ses élus
chacun leur demeure dans la maison de son Père, leur a assigné un rang sublime
: un roi impie les a moissonnés. Enfants de deux ans et
au-dessous, la fureur d'Hérode les a immolés ; d'un sang pur elle a inondé
toute la contrée de Bethléhem. La mort innocente de ces
fidèles a resplendi autour du Christ ; les Anges les emportaient aux cieux,
enfants de deux ans et au-dessous. Une voix retentit dans Rama,
des lamentations, un deuil immense : Rachel, baignée dans ses larmes, a pleuré
ses fils. Ils jouissent d'un triomphe
éternel, eux qui ont vaincu les tourments, et sur leurs douleurs gémissante,
une voix retentit dans Rama. Ne crains rien, petit
troupeau, des dents perfides du lion : le bon Pasteur te donnera les pâturages
célestes. Tu suivras, d'un pas pudique,
le candide Agneau de Dieu; des mains impies du larron, ne crains rien, petit
troupeau. Il essuiera toutes les
larmes, le Père, de vos visages ; la mort ne vous nuira plus, vous êtes entrés
dans les murs de la Cité de la vie. Ceux qui sèment dans les
larmes, moissonneront dans une joie immense; le Créateur les consolera, et, sur
les joues de ceux qui pleurent, il essuiera toutes les larmes. O heureuse cité ! au sein de laquelle naît le Rédempteur : dans laquelle sont
offertes au divin Enfant ces prémices des Martyrs ! Tu ne seras plus appelée petite
parmi les mille cités de Juda, depuis que le Chef est né en toi, ô heureuse cité! Sous des vêtements brillants
de gloire, ils assistent maintenant autour du trône, les Innocents qui ont lavé
leur tunique dans le sang vermeil de l'Agneau. Ils gémirent,ils pleurèrent pour le royaume de l'éternelle patrie ;
maintenant, pleins d'allégresse, ils louent Dieu, sous des vêtements brillants
de gloire. L'Eglise Grecque est abondante, comme toujours, sur la louange des saints Innocents. Nous allons extraire quelques strophes de ses Ménées. (XXVI Decembris, in magno
Vespertino, et passim.)
L'impie, recherchant avec
fureur le trésor caché, a immolé les jeunes Innocents; et Rachel, inconsolable
à la vue des flots de sang de l'inique massacre, et de la mort prématurée de
ses enfants, contemple dans l'allégresse, au sein d'Abraham, ceux qu'elle a
pleurés au plus profond de ses entrailles. Le roi impie recherchait le
Roi qui, sans connaître le temps, a voulu naître dans le temps, et ne trouvant point comment il pourrait l'immoler,
il a moissonné une multitude d'enfants innocents, et, sans y penser, en a fait
des Martyrs, des habitants du ciel, où ils condamnent son impiété dans les
siècles des siècles. Sitôt que tu fus né d'une
Vierge, Seigneur avant les siècles, et que, par miséricorde, tu te fus fait
enfant, un chœur d'enfants te fut offert, brillant par le sang du martyre, et
l'âme toute rayonnante de limpide clarté ; tu leur as fait habiter les demeures
éternelles; et là ils proclament à sa honte la cruelle iniquité d'Hérode. Rachel en pleurs se lamente
sur ses fils, ainsi qu'il est écrit ; car l'impie Hérode a accompli l'Ecriture
en massacrant ces jeunes enfants, et inondant la Judée d'un sang innocent. La
terre était rougie sous les flots du sang de ces enfants. L'Eglise des Gentils
en est mystiquement purifiée, et ornée comme d'un vêtement. La Vérité est venue
; Dieu a apparu à ceux qui étaient assis à l'ombre de la mort, né d'une Vierge
pour nous sauver. Pendant que tout au ciel et
sur la terre se réjouit en la manifestation du Roi de toutes choses, Hérode
seul est attristé avec les Juifs meurtriers des Prophètes. 11 convient en effet
qu'eux seuls se lamentent; car, à partir de ce jour, ils ont cessé de régner ;
désormais le règne du Seigneur est ouvert ; le Seigneur repousse l'audace des
ennemis et convoque la multitude des fidèles pour contempler, avec les glorieux
enfants, celui qui gît, petit enfant, dans la crèche. L'impie et lâche Hérode,
envoyant à la recherche, a moissonné le champ verdoyant en sa primeur, et ne
pouvant mettre à mort le Seigneur, il demeure cou» vert de confusion. Rachel pleure ses enfants, et
un grand cri se fait entendre aujourd'hui dans Rama. Hérode impie est furieux
et frémissant. Jean fuit dans les montagnes ; une caverne reçoit sa mère ;
Zacharie est massacré dans le temple ; et le Christ se retire, laissant déserte
la terre des Hébreux. Les enfants furent la
première hostie offerte à ton immaculée Nativité ; car Hérode voulant se saisir
de toi, ô Seigneur que nul ne pourrait atteindre, il s'est trompé et t'a fourni
un chœur de Martyrs ; c'est pourquoi nous te prions, ô Seigneur fait homme, de
sauver nos âmes. Les cris de votre massacre
sont venus aux oreilles du Dieu des armées, glorieux Enfants ; par cette immolation, vous avez répandu votre
sang, et, par la vertu du Christ nouveau-né, vous reposez au sein d'Abraham,
proclamant éternellement l'odieuse iniquité d'Hérode. Il est odieux, le massacre
des enfants qu'Hérode a égorgés en sa cruelle malice; il est vénérable, ce
sacrifice des jeunes contemporains du Christ, qui les premiers ont été immolés
et ont souffert avant lui. Ne pleure pas tes fils, ô Rachel ! Souviens-toi du
sein d'Abraham où ils habitent tous ensemble dans la gloire et l'allégresse. Dans cet accord sublime de toutes les Liturgies, nous
admettrons celles du moyen âge des Eglises Latines, en insérant cette Séquence,
composition du XI° siècle, qui se trouve dans la plupart de nos anciens Missels
Romains-Français. SÉQUENCE.Enfants, éclatez en bruyantes
mélodies. Célébrez les saints et joyeux
triomphes des Innocents. Aujourd'hui, le Christ enfant
les a enlevés au ciel. Une fureur insensée les a
égorgés ; C'est la ruse d'Hérode ; et
ils ne sont coupables d'aucun crime. Cet attentat est commis en Bethléhem, Et ses alentours ; Tendres enfants de deux ans
et au-dessous, Selon leur naissance. Ce misérable roi Hérode a
craint l'Empire du Christ, nouveau-né ; Il a frémi jusqu'au fond de
son âme ; et sa droite orgueilleuse a brandi le fer. Troublé au fond de son âme,
il cherche le Roi de la lumière et des cieux. Il veut, par ses traits,
exterminer Celui qui donne la vie. Mais son cœur ténébreux ne
peut contempler la resplendissante lumière qu'il poursuit; Il bouillonne en sa rage, il
machine de cruelles fraudes, le barbare Hérode, pour perdre cet essaim de
tendres enfants. Un chef inique rassemble des
cohortes de soldats ; il plonge le glaive dans ces membres délicats. Le sang des victimes n'est
pas formé encore ; c'est du lait au lieu de sang qui coule de leurs plaies, sur
le sein de leurs mères. Un ennemi dénaturé arrache
les entrailles à ces enfants ; il les égorge. Ils tombent, et leur âge si
tendre n'avait point encore développé leurs forces. Heureux ces petits corps des
Innocents immolés ! Heureuses les mères qui
enfantèrent de tels gages ! O aimables légions des
Innocents ! O saints combats ! que livrent pour le Christ ces athlètes à la mamelle ! C'est par milliers que ces
petits sont massacrés ; de leurs faibles membres, le lait coule à torrents. Les Anges, citoyens du ciel,
viennent à leur rencontre. La petite troupe, vêtue de
blanc, saisit la couronne de vie par une merveilleuse victoire. Vous, ô Christ ! qui êtes venu réformer ce monde, nous vous supplions très
dévotement : De la gloire des Innocents, faites-nous jouir éternellement. Amen. Et nous aussi, bienheureux Enfants, nous rendons hommage à votre triomphe, et nous vous félicitons d'avoir été choisis pour les compagnons du Christ au berceau. Quel glorieux réveil a été le vôtre, lorsqu'après avoir passé par le glaive, vous avez connu que bientôt la lumière éblouissante de la vie éternelle allait être votre partage ! Quelle reconnaissance vous avez témoignée au Seigneur qui vous choisissait ainsi, entre tant de milliers d'autres enfants, pour honorer par votre immolation le berceau de son Fils ! La couronne a ceint votre front avant le combat ; la palme est venue d'elle-même se poser dans vos faibles mains, avant que vous eussiez pu faire un effort pour la cueillir : c'est ainsi que le Seigneur s'est montré plein de munificence, et nous a fait voir qu'il est maître de ses dons. N'était-il pas juste que la Naissance du Fils de ce souverain Roi fût marquée par quelque magnifique largesse ? Nous n'en sommes point jaloux, ô Martyrs innocents ! Nous glorifions le Seigneur qui vous a choisis, et nous applaudissons avec toute l'Eglise à votre inénarrable félicité. O fleurs des Martyrs ! permettez que nous mettions en vous notre confiance, et que nous osions vous supplier, par la récompense gratuite qui vous a été octroyée, de n'oublier pas vos frères qui combattent au milieu des hasards de ce monde de péché. Ces palmes et ces couronnes, dans lesquelles se joue votre innocence, nous les désirons aussi. Nous travaillons rudement à nous les assurer, et souvent nous nous sentons au 389 moment de les perdre pour jamais. Le Dieu qui vous a glorifiés est aussi notre fin ; en lui seul aussi nous trouverons le repos ; priez, afin que nous arrivions jusqu'à lui. Demandez pour nous la simplicité, l'enfance du cœur, cette naïve confiance en Dieu qui va jusqu'au bout dans l'accomplissement de ses volontés. Obtenez que nous supportions avec calme sa croix, quand il nous l'envoie ; que nous ne désirions que son bon plaisir. Au milieu du sanglant tumulte qui vint rompre votre sommeil, votre bouche enfantine souriait aux bourreaux ; vos mains semblaient se jouer avec ce glaive qui devait percer votre cœur ; vous étiez gracieux en face de la mort. Obtenez que nous aussi, nous soyons doux envers la tribulation, quand le Seigneur nous l'envoie. Qu'elle soit pour nous un martyre par la tranquillité de notre courage, par l'union de notre volonté avec celle du Maître souverain, qui n'éprouve que pour récompenser. Que les instruments dont il se sert ne nous soient point odieux ; que la charité ne s'éteigne point dans notre cœur ; et que rien n'altère cette paix sans laquelle l'âme du chrétien ne saurait plaire à Dieu. Enfin, ô tendres agneaux immolés pour Jésus, vous qui le suivez partout où il va, parce que vous êtes purs, donnez-nous d'approcher de l'Agneau céleste qui vous conduit. Etablissez-nous en Bethléhem avec vous ; que nous ne sortions plus de ce séjour d'amour et d'innocence. Présentez-nous à Marie, votre Mère, plus tendre encore que Rachel ; dites-lui que nous sommes ses enfants, que nous sommes vos frères ; et comme elle a compati à vos douleurs d'un instant, qu'elle daigne avoir pitié de nos longues misères. 390 En cette quatrième journée de la Naissance du Rédempteur, visitons l'Etable, et adorons notre Emmanuel. Considérons cette miséricorde qui Fa porté à se faire enfant pour se rapprocher de nous, et soyons dans l'étonnement de voir un Dieu si près de sa créature. «Celui, dit le pieux Abbé Guerric dans son cinquième Sermon sur la Nativité du Christ, Celui qui est insaisissable même pour la subtile intelligence des Anges, a daigné se rendre palpable aux sens1 grossiers de l'homme. Dieu ne pouvait nous parler comme à des êtres spirituels, charnels que nous sommes ; son Verbe s'est fait chair, afin que toute chair pût non seulement l'entendre, mais même le voir ; le monde n'ayant pu connaître la Sagesse de Dieu, cette Sagesse a daigné se faire a folie. Seigneur du ciel et de la terre, vous avez donc caché votre sagesse aux sages et aux prudents du monde, pour la révéler aux petits. Les hauteurs de l'orgueil ont horreur de l'humilité de cet Enfant ; mais ce qui est haut aux yeux des hommes, est abominable devant Dieu. Cet Enfant ne se plaît qu'avec les enfants ; il ne se repose qu'avec les humbles et les cœurs paisibles. Que les petits se glorifient donc en lui, et qu'ils chantent : Un petit Enfant nous est né ; comme lui, de son côté, se félicite, disant par Isaie : Me voici, moi et mes enfants que le Seigneur m'a donnés. En effet, pour lui fournir une compagnie en rapport avec son âge, le Père a voulu que la gloire des Martyrs commençât par l'innocence des enfants : l'Esprit-Saint voulant montrer par là que le royaume des cieux n'est que pour ceux qui leur ressemblent. » Honorons cette enfance de notre grand Roi, en lui consacrant aujourd'hui l'Hymne gracieuse et touchante qu'un des plus hauts génies de l'Eglise primitive, Clément d'Alexandrie, a offerte au Christ, Roi des enfants. HYMNE.Frein des jeunes coursiers
indomptés, aile des oiseaux qui point ne s'égarent, gouvernail assuré de
l'enfance, pasteur des agneaux du Roi, tes simples enfants, rassemble-les, pour
louer saintement, chanter avec candeur, d'une bouche innocente, le chef des
enfants, le Christ. O Roi des Saints !
Verbe, triomphateur suprême, dispensateur de la sapience du Père, du Très-Haut
; toi, l'appui dans les peines, heureux de toute éternité, Sauveur de la race
mortelle, Jésus ! Pasteur, agriculteur, frein,
gouvernail, aile céleste du très saint troupeau; pêcheur des hommes rachetés,
amorçant à l'éternelle vie l'innocent poisson, arraché à l'onde ennemie de la
mer du vice. Sois leur guide, ô pasteur
des brebis spirituelles ! ô Saint, sois leur
guide, Roi des enfants sans tache ! les vestiges du
Christ sont la voie du ciel. Parole incessante, éternité
sans bornes, lumière sans fin, source de miséricorde, auteur de toute vertu,
vie irréprochable de ceux qui louent Dieu. O Christ! ô
Jésus! nous qui, de nos tendres bouches, suçons le lait céleste exprimé des
douces mamelles de ta sagesse, la grâce des grâces ; petits enfants abreuvés de
la rosée de l'esprit qui découle de ta parole nourrissante, chantons ensemble
des louanges ingénues, des hymnes sincères à Jésus-Christ Roi. Chantons les saintes
récompenses de la doctrine de vie. Chantons avec simplesse
l'Enfant tout-puissant. Choeur pacifique, enfants du Christ, troupe innocente,
chantons ensemble le Dieu de la paix. Saluons aussi Marie, la Mère de cet Enfant divin, avec cette belle Séquence empruntée aux anciens Missels de l'Allemagne. 393 SÉQUENCE.Glorieuse impératrice,
puissante souveraine, de Jésus-Christ noble Mère et fille; tige de Jessé, pleine de beauté, verge fleurie au vert feuillage,
qu'arrose la grâce abondante de la divinité. Un léger souffle du Joseph, le juste, s'étonna en
considérant ce mystère, songeant qu'il avait respecté la branche fleurie
confiée à sa garde ; néanmoins il garda le secret divin ; sa bouche ne s'ouvrit
pas pour le divulguer; mais il glorifia son épouse, et l'honora comme sa Dame. Les cieux avaient répandu
leur rosée; les nuées, enflées d'une pluie féconde, la versèrent au sein de la
Vierge. Chose admirable ! prodige inouï ! Le
soleil sortit de l'étoile au jour où la jeune fille, ignorant le lit nuptial,
enfanta le grand Roi. Donc, ô Vierge clémente et
bénie ! digne de la louange de tous les êtres,
recommande-nous à ton Fils. Fais, par tes pieux suffrages, que, délivrés des
mortelles entraves qui nous accablent, nous soyons affranchis, et qu'un jour
nous soyons transportés dans les célestes palais. Amen. |