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LA VOIX DE CATHERINE DE SIENNE N°:129 -mars/ avril- 2004

Sommaire : Edito : Pâques sur le monde d'après une oraison de Catherine 3 Chrétiens et musulmans: Le lieu de l'accueil par la Prof. Juliana Cavallini 4 Catherine apprend à ses disciples à cultiver la vie spirituelle par Chantal van der Plancke 8 Le jardin de l'âme Lettre de Catherine 11 Catherine de Siennne en Flandre par Soeur Josine Van Caneghem 12   A propos de "l'affaire Dutroux" La confession et la conversion des pécheurs, par Mireille Cochet 15

 

" O Déité, mon amour ! Je t'adresse une demande."

Le monde entier gisait dans le mal. Mû par l'amour, tu lui envoyas comme médecin ton Fils unique. Mais aujourd'hui, le monde n'est-il pas plongé dans une seconde mort, si profonde que la vision m'en fait défaillir?

Comment ressusciter ce mort une deuxième fois ?... Comment, comment donc ressusciter ce cadavre ? Je ne crois pas, ô bonté sans limites, que les moyens te fassent défaut... Tu peux donc toujours, tu veux et tu sais fournir le remède qui nous manque.

Je t'en supplie donc ! Plaise à ta bonté de me montrer ce remède et vivifie mon âme pour qu'elle le mette virilement en oeuvre...

Je vois aussi que tu appelles tes serviteurs d'autres Christs et c'est par eux que tu veux vaincre la mort et ressusciter le monde... O divin médecin, donne-nous de ces autres Christs..."

Oraison de Catherine, Dimanche de la Passion, 27 mars 1379. Jésus-Christ notre résurrection, Cerf, 1980. O. XXII.

 

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Editorial

 

Chers amis, Le monde tourne avec ses intérêts et ses révoltes, ses massacres et ses victimes. Son aveuglement nous révèle la part obscure de nous-mêmes. Les médecins du monde s'affairent, Dieu merci ! Le Médecin des âmes, qui soigne le coeur du monde, est Celui qui descendit aux enfers pour nous en faire remonter. Hors de Lui, nous ne pourrons rien faire.

Le moulin de la violence tourne. Beaucoup lui apportent l'eau des larmes et du sang. Catherine relaye le cri de S. Dominique : "Seigneur, que deviendront les pécheurs?" Elle met "les durs" de tous les temps ("eux" et nous) en garde contre la cruauté exercée aussi... envers soi-même. Elle intercède. Elle nous appelle à vivre l'actualité avec un regard de foi : sensible à la douleur humaine, certes, mais combien plus encore à l'offense faite à Celui qui "nous aima avant que nous fussions". C'est dans l'Esprit de gratitude que nous apprenons à devenir sensibles à l'ingratitude envers Dieu. Notre monde souffre d'être " à l'âge ingrat" et s'y complaît...

"Divin médecin, donne-nous donc de ces autres Christs qui s'épuisent en veilles, en larmes, en prières pour le salut du monde. Tu les appelles tes christs parce qu'ils sont assimilés à ton Fils. Père éternel, guéris-nous de notre ignorance, de notre cécité, de notre froideur. Nous avons la vue si basse que nous ne nous connaissons pas nous-mêmes" ( ci-contre, Oraison XXII).

Puisque "nous ne sommes faits que d'amour", soyons ces "autres christs assimilés au Fils", qui, descendu dans les enfers, tendit la main à son frère. Les enfers ne manquent pas, ni dans notre monde, ni en nous-mêmes. Seulement les mains tendues. Au nom du Christ.

Joyeuses Pâques ! Chantal van der Plancke Le 29 avril, Bonne fête de Ste Catherine, à vous tous, de par le monde. Union de prière avec nos amis germanophones, ce jeudi au cours de l'eucharistie de 19h, au sanctuaire Ste-Catherine de Sienne à Astenet.

 

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Le lieu de l'accueil

 

Au printemps de l'année 1376, Raymond de Capoue est en Avignon avec quelques disciples de Catherine pour une mission de paix. Il s'agit de réconcilier avec l'Eglise la République de Florence, alors soumise à l'interdit. La mission n'a pas réussi pour le moment. Quelques mois plus tard, Grégoire XI, désormais revenu à Rome, la confiera à Catherine. Au mois de juillet de l'année suivante, le rameau d'olivier en main, elle donnera aux Florentins l'annonce désirée de la paix.

L'accueil des peuples dans le côté du Christ

Durant la nuit du 1er avril, une vision significative s'offre à Catherine. Cette date marque l'anniversaire de sa stigmatisation. L'événement, qui la fait sensiblement participer à la souffrance du Rédempteur, a allumé en elle un plus grand désir du salut des âmes et une douleur profonde devant tout ce qui y fait obstacle. La situation de l'Eglise est critique : les moeurs vraiment peu édifiantes du clergé, les révoltes populaires souvent provoquées par le mauvais gouvernement des émissaires pontificaux, l'absence du pape à Rome, le fait que celui-ci doive tenir compte des pressions et des exigences qui l'empêchent de réaliser la nécessaire réforme: tout cela est contre-productif. L'Eglise s'identifie au Christ, « est Christ », parce qu'elle participe à sa mission universelle : dans l'Incarnation, le Verbe de Dieu s'est uni à l'humanité entière en l'épousant ; il s'est fait pont entre le ciel et la terre pour ouvrir à tous, sans exclusion, l'accès au Père ; et quand il est monté au ciel, il a confié à l'Eglise « le pont de sa doctrine » dont témoignent tous ceux qui ont suivi cet enseignement (cfr Dial XXIX). Raymond étant absent, Catherine ne peut laisser « le père de son âme » dans l'ombre d'un événement si significatif. Elle lui écrit. Sa lettre nous rapporte le récit original de l'événement. En se manifestant à elle, durant cette nuit, le Seigneur prend soin de la réconforter en lui expliquant, par une parole de I'Evangile, pourquoi l'Eglise est actuellement « persécutée » « Il est nécessaire qu'arrive le scandale » (Mt 18,7). Il y en aura toujours qui abuseront de la liberté de choix et malheur à eux ! Mais la Providence divine sait aussi tirer profit de nos fautes : elle se sert de la persécution pour supprimer les épines qui ont envahi le jardin de la sainte Eglise. Et pour mieux se faire comprendre, elle raconte l'épisode des marchands chassés du temple : « Sais-tu ce que je fais ? Je fais comme j'ai fait quand j'étais dans le monde ; j'ai fait un fouet de corde et j'ai chassé ceux qui vendaient et qui achetaient dans le Temple, ne voulant pas que la demeure de mon Père devienne une caverne de voleurs. Je te dis que je fais maintenant de même. J'ai fait un fouet des créatures et, avec ce fouet, je chasse les marchands impurs, cupides, avares et enflés d'orgueil, qui vendent et achètent les dons du Saint-Esprit » (Let. 219 en ital. ; éd. Téqui, CXXXIII, p. 830).

Ces paroles attisent le feu du désir et préparent Catherine à la vision : « Le feu augmentait en moi et je voyais avec admiration les chrétiens et les infidèles entrer dans le côté de Jésus crucifié, et je passais par le désir et l'amour et, par leur moyen, j'entrais avec eux dans le Christ, le doux Jésus. J'étais accompagnée de mon père saint Dominique, de saint Jean et de tous mes enfants ; et alors, il me mettait la croix sur les épaules et l'olivier à la main, comme s'il m'ordonnait de les porter aux uns et aux autres. Il me disait : 'Va leur dire : Je vous annonce une grande joie.' Et alors... ces douceurs étaient si grandes qu'elle (mon âme) oubliait la peine qu'elle avait ressentie en voyant offenser Dieu. Je disais : 'O heureuse et bienheureuse faute !' Le doux Jésus souriait et disait : 'Le péché, peut-il être heureux... ?' » (Ibid.). Catherine s'empresse de rectifier : non, ce n'est pas le péché mais la Rédemption, qui, grâce à la divine Providence, tire le bien de nos erreurs. Elle ne se contente pas de constater que toute la famille humaine désire tant accueillir le mes- sage du Christ. Elle porte constamment ce message, sur les pas de saint Dominique, avec toute sa famille spirituelle guidée par Raymond, qu'elle appelait d'un singulier petit surnom, parce que Jésus lui avait dit tous ses secrets comme il l'avait fait pour Jean (Vita, Prol 1,6). L'entrée simultanée des différents peuples dans le côté du Christ pour y découvrir « le secret du coeur », l'amour qui pacifie et qui fait de la multitude une unité, est un événement si réjouissant qu'il mérite d'être publié comme l'annonce qui réjouit les pasteurs lors de la sainte nuit : « Dis-leur : je vous annonce une grande joie' ». Joie d'avoir reçu le rameau d'olivier, mais non sans la croix, symbole de la foi. « Quel bonheur, écrit-elle à Grégoire XI, si nous voyions le peuple chrétien donner le condiment de la foi aux infidèles ! » (Let. 218, cfr Téqui p.156). D'accord ! Mais aujourd'hui, il semble peu vraisemblable que ce doux « condiment » puisse être donné avec les armes

Le motif de la croisade

Catherine demanda avec insistance au Pape de lever la croisade et exhorta les seigneurs à y contribuer. Comment donc ? Elle vivait à un haut niveau spirituel, mais gardait aussi les pieds sur terre et les yeux ouverts. Le motif fondamental devait être d'ordre spirituel-affectif : les lieux que le Christ avait sanctifiés par sa présence ne devaient pas être entre les mains de ceux qui ne croyaient pas en Lui. Ils appartenaient de droit aux chrétiens et combattre pour les récupérer, c'était ex-poser sa vie comme une offrande d'amour. Il peut être surprenant que Catherine envisage la possibilité pour des femmes de participer à cette entreprise, comme on le voit dans une des lettres qu'elle adresse à Monna Paola, abbesse d'un monastère : « Oui, très chères Filles, courons ensemble comme une belle brigade, et greffons-nous sur ce Verbe ! Je vous invite à ses noces, c'est-à-dire à répandre votre sang pour lui, comme il l'a fait pour vous, à aller au Saint-Sépulchre et à y donner votre vie pour lui» (Let. 144 ; cfr Téqui, p. 1745). C'est peut-être une anticipation de l'action des volontaires de la Croix-Rouge.

La menace sur l'Europe

Mais Catherine annonça le péril qui menaçait l'Europe orientale en raison de l'avancée des Turcs dans les Balkans. « Vous avez sans doute appris, écrit-elle à Elisabeth de Hongrie, comment les Turcs persécutent de plus en plus les Chrétiens et s'emparent des biens de la sainte Eglise » (Let. 145 ; cfr Téqui, p.369). Il ne s'agissait pas du patrimoine de S. Pierre : ces terres appartenaient à l'Eglise en tant qu'elles étaient habitées par des populations chrétiennes, qui risquaient d'être contraintes, par la violence des envahisseurs, à abandonner la Foi. Tel est le motif pour lequel Catherine adressa sa supplique à Elisabeth, la priant d'insister auprès du roi, son fils, pour qu'il accueille l'invitation à la croisade. Comme pour l'encourager, elle lui fait savoir qu'elle a également fait cette proposition à la reine de Naples et à bien d'autres seigneurs et qu'elle en a reçu des réponses positives.

 

La pacification du continent

 

Catherine ne se préoccupait pas seulement de l'Orient européen : elle pensait que la croisade aurait dû contribuer à pacifier tout le continent. En fait, l'Occident ne présentait pas non plus un scénario réjouissant. Depuis trop longtemps la guerre de Cent ans l'avait divisé en deux camps, face à face : les deux souverains et leurs peuples. Selon Catherine, leur même foi chrétienne aurait dû faire qu'ils se comportent en frères. Mais la population subissait les conséquences désastreuses de leurs revendications territoriales. Si, se disait- elle, des mercenaires, qui n'étaient bons à rien d'autre qu'à combattre, se joignaient à la croisade, l'Europe occidentale se serait allégée, au moins pour quelque temps, du poids de leur violence. Ainsi invite-t-elle le roi de France, Charles V à se dédier à la croisade, en laissant de côté les finalités mesquines de la guerre qui causent tant de dégâts dans le peuple (Let. 235 ; Téqui, p.294).

 

 

 

Le  renouvellement de l'Église par de de nouveaux convertis

Telle était  la motivation politique de Catherine en faveur de la croisade. Mais son coeur était tout enamouré du Christ et de la mission de salut, qu'il avait confiée à l'Église, s'ouvrait à l'espérance la plus claire : celle de voir ce que l'adhésion des infidèles à la vraie foi aurait pu apporter à la réforme qu'elle désirait tant. Il ne s'était pas encore écoulé beaucoup de temps depuis la vision du ter avril, quand elle écrivit à Grégoire Xl : « Apprenez du vrai père et pasteur... Il est temps de donner votre vie pour les brebis sorties du troupeau ; il faut les chercher et les reconquérir par la patience et par la guerre contre les infidèles, en levant l'étendard de la très ardente et très douce croix. Mais pour l'élever, il ne s'agit pas de dormir; il faut se tenir debout et le déployer virilement. J'espère de l'infinie bonté de Dieu que vous reconquerrez les infidèles et corrigerez la malice des chrétiens, parce que tous courront à l'odeur de la croix, même les plus rebelles envers vous ». Il s'agit ici du retour des populations rebelles à la communion ecclésiale. Mais Catherine porte plus loin son regard. Elle voit la contribution vitale que les néophytes pourraient apporter au renouvellement de l'Eglise : « Oh ! Quel bonheur, si nous voyions le peuple chrétien donner le condiment de la foi aux infidèles. Après avoir reçu la lumière, ils s'avanceraient vers la perfection. Semblables à une plante nouvelle, ils perdraient le froid de l'erreur pour recevoir la chaleur et la lumière du Saint-Esprit par la sainte foi. Ils produiraient des fleurs et des fruits de vertu dans le corps mystique de la sainte Eglise, et le parfum de leurs vertus aiderait à étouffer les vices, les péchés... qui règnent tant actuellement parmi les chrétiens, et surtout parmi les prélats, les pasteurs et les chefs de la sainte Eglise » (Let. 218 ; cfr Téqui, p.156).

Le condiment de la foi

Vue comme « condiment », la foi représente le perfectionnement de la « créature douée de rai-son », splendide fruit de l'Amour, de la Sagesse et de la Puissance divine. Le condiment suppose qu'il y ait une nourriture à assaisonner. Celle qui attend de recevoir de la Foi la plénitude de goût, c'est la nature humaine. Elle est si belle qu'en en concevant l'idée, le Créateur s'en est tout enamouré (cfr O. IV). Cette créature, créée par amour à l'image (miroir) du Dieu Un et Trine, appartient à tout homme, quelles que soient son ethnie et sa couleur. Chacun peut être élevé, par le don de la foi, à son plus haut niveau de perfection. C'est ainsi que l'apôtre Jean contemplait la foule innombrable « de toutes langues, tribus, peuples et nations » prosternée devant le trône de l'Agneau qui l'a rachetée dans son sang et en a fait son épouse.

La vérité et l'amour

Catherine ne s'arrêtait pas aux barrières qui, en son temps comme en d'autres, cherchent à former des vases clos dans la famille humaine. Elle sait que la Vérité, connue, conquiert l'intelligence et le coeur de l'homme, en fait « des plantes nouvelles », florissantes et parfumées, qui réjouissent la vie. Elle a montré que la plénitude de vie s'acquiert en entrant dans le côté ouvert du Christ où l'on découvre « le secret du coeur » , la vérité de l'amour créateur et sauveur. Telle est sa sagesse: la vérité fondée sur la conscience de l'amour, l'amour consolidé par la conscience de la vérité ; la vérité qui engendre l'amour, l'amour qui pousse à approfondir la vérité. Catherine l'enseigne avec la force persuasive de son expérience : elle participe à l'amour sans réserve et sans limite, qui a cloué pour nous sur la croix le Verbe incarné et qui nous accueille tous dans l'ouverture de son côté.

Prof. Giuliana Cavallini Centro Nazionale di Studi Cateriniani, Piazza S. Chiara, 14, Roma. 7

 

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L'Année "Envoyés pour annoncer" nous renvoie à la parabole du Semeur. Mais aussi à la qualité des champs... Pour les cultiver, les paysans ont inventé des outils

 

Catherine apprend à ses disciples à cultiver a vie spirituelle

De l'art de la charrue pour labourer plus profondément

Comme l'écrit, vers 1305, un agronome italien, Pietro de Crescenzi, "le labour permet d'abord d'ameublir la terre `endurcie' par le passage de l'homme et des animaux et par la pluie, laissant ainsi à l'air et à la semence la possibilité d'y pénétrer. Il permet aussi de mêler la terre et le fumier et de mettre à égalité les qualités requises par les plantes : chaleur, froideur, humidité et sécheresse. Il permet enfin de `briser' la terre pour que les éléments nutritifs puissent parvenir à la plante et que les racines puissent s 'étendre librement dans le sol ". (Fr. de Lannoy, Instruments de labour à l'époque médiévale : araires et charrues, dans Moyen-Age, sept. 2001, p.96)

Catherine utilise souvent la métaphore de la charrue. Le plus souvent dans le sens où Jésus invite à tout quitter pour le suivre. "Un autre dit : `Je te suivrai, Seigneur, mais laiss-moi d 'abord faire mes adieux à ceux de ma maison'. Jésus répondit . `Quiconque met la main à la charrue et regarde en arrière n 'est pas fait pour le Royaume de Dieu " (Lc 9, 62). Ces versets, propres à Luc, évoquent la vocation d'Elisée (par Elie) alors qu'il était en train de labourer (1 R 19,19-21). Jésus, plus radical qu'Elie, ne laisse pas le temps à l'appelé de prendre congé des siens.

Au Moyen Age, le problème du "retournement de sol" a beaucoup préoccupé les esprits. L'araire est composé d'un soc qui ouvre le sillon à la verticale et rejette la terre des deux côtés. La charrue est munie d'un versoir qui rejette les mottes d'un seul côté, par un retournement continu, et recrée à la surface un sol neuf. Le passage de l'araire à la charrue, entre le XIe et le Xlle siècle, permit de gagner à la culture des terrains difficiles à labourer ou de lourdes terres argileuses rebelles à l'araire. L'instrument aratoire prit une importance de plus en plus grande dans la vie des hommes: acquisition de socs et de versoirs en fer et amélioration des attelages, notamment au niveau du joug, pour augmenter la force de traction des animaux.

Ainsi le progrès de l'économie en Europe est-il lié aux nouvelles techniques aratoires. Et le progrès spirituel?

Pour que l'Esprit-Saint puisse retourner notre volonté

"Pense que ce n 'est rien de commencer et de mettre la main à la charrue, comme je 1 'ai dit. Les saintes pensées commencent le sillon; mais c'est la persévérance dans la vertu qui l'achève. Celui qui laboure tourne la terre; de même l'Esprit-Saint retourne la terre de la mauvaise volonté sensitive. Souvent l'homme, séduit par une si douce invitation (aux noces éternelles) et un si beau vêtement (nuptial), cherche, pour mieux travailler la terre, s'il ne trouvera pas une charrue bien tranchante, qui puisse la remuer plus profondément Et il voit qu'il est impossible de trouver un instrument meilleur pour briser, couper et arracher notre volonté, que le fer et le joug de la sainte obéissance. Et lorsqu'il l'a trouvé, il suit l'exemple du Verbe, du Fils de Dieu, et veut, par amour pour lui, être obéissant jusqu'à la mort."

(A Romain, tisseur de lin, de la compagnie du Bigallo, à Florence, Téqui, p.1488. Catherine voulait le voir persévérer dans la vertu et se revêtir d'amour pour aller aux noces auxquelles les messagers du Seigneur l'invitent. Ces messagers sont les inspirations et les désirs que suscitent le Saint-Esprit en nous.)

Mettre la main à la charrue de la perfection, sans regarder en arrière

"Ce n'est pas celui qui commence qui reçoit la couronne de gloire, mais celui qui persévère jusqu'à la mort... (Andréa), tu as commencé à mettre la main à la charrue de la vertu en t 'éloignant du péché ... "

(A Catherine du Petit Hopital et à Jeanne de Capo, que Catherine souhaite voir affermies dans la plience au milieu des calomnies et persécutions. Téqui p. 1196).

"Ayez toujours le sang du Christ devant l'oeil de votre intelligence... Que dans ce sang, votre volonté s'anéantisse... Ne soyez pas négligent, mais plein de zèle; prépare-vous à goûter le parfum des vertus et de la sainte pauvreté pour l'Amour de l'humble et pauvre Agneau, et lorsque vous aurez mis la main à la charrue, ne tournez jamais la tête en arrière pour voir le sillon." (A un génois du tiers ordre de Saint François, qui avait avec une dame une liaison spirituelle dont il souffrait beaucoup. Téqui p. 976)

 "Très chères filles... Je vous écris ... avec le désir de vous voir constantes et persévérantes dans la vertu, afin que vous ne tourniez pas la tête en arrière pour regarder la charrue. On peut regardes en arrière de deux manières. D'abord, lorsqu'une personne qui est sortie de la fange du monde, tourne la tête pour le plaisir de sa volonté, et fixe le regard de son intelligence sur ce qu'elle avait abandonné; celle-la n'avance pas... Aussi le Christ dit que personne ne doit se tourner en arrière pour regarder la charrue '... C'est-à-dire pour regarder ses plaisirs passés, ni se complaire dans ce qu 'on fait soi-même, mais l'attribuer à la bonté de Dieu. Il faut donc avancer par la persévérance dans la vertu, et ne pas se tourner en arrière, mais vers la connaissance de soi-même, où se trouve la grandeur de la bonté de Dieu. Si cette racine (de l'amour-propre) n'est pas entièrement arrachée, il (celui qui s'applique) tournera bientôt la tête de la seconde manière. S'il le fait cette fois, ce n 'est pas pour les délices du monde. Quand l'âme a commencé à mettre la main à la charrue de la perfection, cette perfection consiste principalement à renoncer à toute chose... Car... elle s 'applique aux choses spirituelles... Si la racine de l'amou propre n'est pas entièrement arrachée de cette âme, elle tournera la tête en arrière de la seconde manière... J'ai vu que vous étiez au milieu des loups menaçants et qu'aucune de vous n 'était forte et ne faiblissait pas. J'ai vu tourner la tête en arrière de celles que je croyais capables de luttercontre les vents et de résister à tout jusqu'à la mort. Je croyais qu'elles ne détourneraient pas non seulement le visage, mais encore le regard. C'est la preuve que la racine n'est pas encore entièrement arrachée." (A Alessia et Cecca, compagnes de Ste Catherine, du tiers ordre de Saint Dominique : de la persévérance et des deux manières de la perdre et de s'éloigner de la perfection. Téqui p. 1201 ss.) "Je ne sais quand j'arriverai... Je partirai le plus tôt possible, écoutant toujours pour aller et rester dans la douce volonté de Dieu et non celle des hommes... Je vous dirai, à vous et à tous ceux qui laissent enter tant de peines et de pensées dans leur esprit à mon sujet que, si je voyage toujours et si je me fatigue, malgré toutes mes infirmités, c'est que Dieu m'y force pour son honneur et le salut des âmes. Si les faibles veulent trouver du mal dans le bien, je ne puis les en empêcher. Mais je ne dois pas regarder en arrière et abandonner la charrue. Il me semble qu 'en écoutant les hommes, nous verrions la zizanie étouffer le bon grain."

(A l'abbé de Sant' Antimo, que Catherine désire voir éviter de juger les autres et profiter de la diversité des dons de chacun. Lettre écrite peut-être de Gênes, en1376. Téqui p.724).

 

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Le jardin de l'âme

"L'âme (remplie de Dieu, de sa paix et de sa volonté) devient alors un véritable jardin plein de fleurs odoriférantes du saint désir. Au centre est planté l 'arbre de la très sainte Croix, oit se repose 1 'Agneau sans tache qui verse son sang pour baigner et arroser ce doux et glorieux jardin. Ïl apporte les fruits mûrs des vraies et solides vertus.

Si vous voulez la patience, c 'est là que vous la trouverez, si douce, que jamais on n 'entendit l'Agneau pousser la moindre plainte.

Vous trouverez l'humilité en voyant Dieu humilié jusqu'à l'homme, et le Verbe humilié jusqu 'à la mort honteuse de la Croix.

Si c 'est la charité que vous cherchez, il est la force de 1 'amour et de la charité qui l'a tenu attaché et cloué sur la Croix. Les clous et la Croix ne pouvaient retenir l'homme-Dieu sans la force de la charité.

Je ne m 'étonne pas que l'arme, qui est devenue un jardin par la connaissance d'elle-même (en Dieu), soit forte contre le Inonde entier, puisqu 'elle s 'est unie, elle s 'est faite une même chose avec la Force suprême.

Elle commence véritablement à goûter ici-bas les arrhes de la vie éternelle. " A Mme Jeanne de Corrado, la mère d'Etienne Maconi, le disciple et secrétaire de Catherine.

Téqui, p.1684.

 

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Catherine de Sienne en Flandre

Nous le savons, la grande patronne des Soeurs dominicaines de Bruges (1) est peu connue dans nos régions. Après avoir évoqué ce fait dans la famille dominicaine à Anvers, la communauté de Bruges prit une initiative pour remédier quelque peu à cette lacune. Elle invita Madame Agnès Pas, membre de l'équipe de direction du Theologisch Pastoraal Centrum de Malines et temporairement présidente de Broederlijk Delen, à venir partager sa vision de l'actualité de Catherine. Des religieuses, des voisins et les membres de la famille dominicaine furent invités à cette après-midi. Nous avons pu nous réjouir de la présence d'un groupe de 70 personnes. Madame Agnès Pas fit preuve de sa connaissance de Catherine et de sa signification pour notre temps. Et elle donna le goût à certains d'en savoir plus. Le groupe régional de Knokke s'est donné comme objectif de préparer, au cours de l'année 2003, une journée sur la sainte pour la réunion de la famille dominicaine à Anvers. Pour la connaître davantage, leurs membres se sont mis à lire, à étudier et à discuter. Finalement, trois personnes eurent le courage de préparer un texte. L'une, sur « la vie et sur le contexte familial et social dans lequel Catherine a grandi ». Une deuxième, sur «la spiritualité dominicaine dans l'action de Catherine» et une troisième, prise par le charme de la mystique, communiqua son enthousiasme à tout le groupe. La conclusion de plusieurs fut le constat de leur ignorance à propos de Catherine et leur désir de la découvrir davantage. Le fait que quelques personnes de ce groupe aient participé, à Bruxelles, en novembre dernier, à la journée des «Fraternités laïques dominicaines de Belgique francophone» témoigne de cette volonté. La journée sur Ste Catherine A Anvers, organisée pour la famille dominicaine, réunit 23 participants le 3 octobre 2003. - Paul donna un bref historique de la vie de Sainte Catherine. Il la situa d'abord dans son contexte social, politique et religieux du IVe siècle. Ensuite, il suivit la Sainte dans sa famille, évoqua ses relations avec les Dominicains à Sienne, l'influence de Raymond de Capoue sur sa vie spirituelle, la période de la peste, l'intervention de Catherine, par son action et ses écrits, dans la conduite des dignitaires religieux et politiques...(2). - Maria intitula son exposé: "La mystique ou les aventures d'une âme chrétienne". Elle posa la question : "Comment vivre la spiritualité dominicaine dans l'action?" Selon Thomas d'Aquin, il s'agit de transmettre - spécialement dans l'annonce de la Parole et l'enseignement

[(1) Les Soeurs dominicaines de Catherine de Sienne à Bruges

C'est en la fête de l'Epiphanie 1284, au lieu dit aEngelendalen que, selon la légende, quatre jeunes filles entendirent un chant des anges. Elles prirent l'initiative de s'organiser dans une petite maison et d'y vivre en tant que religieuses. Elles eurent vraisemblablement des contacts avec les Dominicains résidant à Bruges. Au Chapitre Général qui se tint à Lille en 1293, cette communauté fut officiellement acceptée dans l'ordre de saint Dominique. Le monastère connut rapidement un grand rayonnement. Et, hélas, bien des troubles également. Au xve siècle, sur les conseils du Concile de Trente, les soeurs vinrent habiter au centre de la ville pour raisons de sécurité. Ensuite, par décision de Joseph ll, les moniales furent chassées. Leurs bâtiments devinrent propriété de l'Etat et, en novembre 1796, ils furent mis en vente publique. Heureusement, en 1840, une nouvelle vie dominicaine s'annonça. Le neveu de la dernière dominicaine acheta le terrain où se trouvait l'ancien couvent. Il voulut y ouvrir une maison pour handicapés mentaux. Pour réaliser cette oeuvre, il fit appel à des religieuses comme sa tante. Le 17 mars 1847, deux religieuses furent acceptées dans la famille dominicaine. Le même jour, deux autres jeunes filles commencèrent leur postulat et, en 1854, la communauté comptait déjà 19 dominicaines. Dès lors, la congrégation connut des années d'expansion. Beaucoup de dominicaines purent se mettre au service des malades, de l'enseignement, de l'éducation et de la formation des handicapés; d'autres s'engagèrent dans la pastorale locale. Un groupe considérable partit en mission. Quelles que furent leurs missions, les dominicaines d'Engelendale furent toujours inspirées par l'amour du Christ et par le message évangélique, selon les inspirations de Saint Dominique et de Sainte Catherine de Sienne. Aujourd'hui, nous sommes heureuses de ce que nous avons pu accomplir pour l'Eglise et pour tous ceux et celles à qui nous avons pu faire du bien. Nous vivons plus intensément notre vie de prière et de communauté, ce qui était plus difficile lorsque nous étions en pleine activité. Nous le faisons, selon notre vocation et nos possibilités, portées parla Bonne nouvelle, patrimoine qui nous était et nous reste si cher. A qui pouvons-nous désormais transmettre le flambeau pour porter cette Bonne Nouvelle à notre monde? ]

   - théologique - ce que l'on a appris dans la contemplation. Chez Catherine, il s'agit plutôt de ce qui se passe dans la vie quotidienne des gens et dans sa propre vie. Sans jamais quitter sa "cellule intérieure", elle quitte sa maison pour communiquer la Parole de Dieu par son action sociale et politique, et par ses écrits. Son "Dialogue" et ses lettres résument sa théologie et sa spiritualité (3). - Georges nous laissa le témoignage d'une personne éprise par Catherine, la mystique. Il vit Catherine portée sur les ailes de `la connaissance de Dieu' et de `la connaissance de soi'. La connaissance de soi, chez notre sainte, consiste à réaliser que l'on n'existe que par Dieu, que l'on se reçoit totalement de lui.Dans la mystique de Catherine, Jésus est le pont de la miséricorde et de la grâce. (4). Ces exposés - très brièvement résumés - furent suivis d'un temps de prière puisant sa source dans les oraisons de Catherine. Durant l'après-midi, nous avons confronté ces exposés avec nos connaissances et nos expériences personnelles. Voici quelques petits pas pour que Catherine soit mieux connue dans nos régions. Soeur Marie-Josine o. p. Engelendale, Bruges (2) Source: Sigrid Undset, Catherine de Sienne, Bruxelles, 1953. Trad. du Norvégien. (3) Eric Borgman, "Dominicaanse spiritualiteit",Tijdschrift voor Geestelijk Leven, hors série, 1956. (4) Source: Chantal van der Plancke et André Knockaert, Prier 15 jours avec Catherine de Sienne, Paris, Nouvelle Cité,1999.

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A propos de « l'affaire Dutroux »

Ce procès, hautement médiatisé, engouffre des heures et des heures passées devant l'écran : à voir et à revoir..., à suivre le suspense d'une enquête, d'un procès ; à tenter de comprendre l'incompréhensible horreur, la douleur des victimes, les méandres de la justice et surtout le coeur de 1 'homme. L 'affaire dépasse les limites de notre continent. « Ce qui atteint à ce point des victimes, atteint toute l'humanité », explique un journaliste arabe. «Atteint profondément le coeur de Dieu », pense Catherine. Elle passait son temps à « visionner », non l'avant-plan de la turpitude, mais la profondeur de la miséricorde du Père ; et à veiller en intercédant pour que se brisent les coeurs de pierre, imperméables à la divine tendresse. Un travail d'étudiante nous le rappelle. Cela nous invite à jeter un regard de foi, plus engagé dans l'actualité — très peu médiatique — du salut de nos frères, dont nous sommes solidaires. Dutroux, « tout le monde» en parle. Mais si tout le monde « en parlait à Dieu » ?

La Confession et la Conversion des pécheurs

Quand on voit la façon dont Catherine priait pour les prisonniers, on comprend mieux qu'elle emploie le terme de « travailler » pour l'Eglise. Par une bulle spéciale du Pape Grégoire XI, elle avait obtenu le droit d'être accompagnée de trois confesseurs qui confessaient ceux qui le souhaitaient. Beaucoup d'hommes et de femmes (jusqu'à 'mille' selon Raymond de Capoue) venaient la voir et l'écouter parler Rien qu'à sa vue, ils se repentaient de leurs méfaits et se rendaient alors auprès des confesseurs. Certaines de ces personnes n'avaient jamais reçu le sacrement de pénitence. Souvent, ses confesseurs étaient las et fatigués, mais Catherine, elle, priait et enjoignait aux foules venues l'écouter, de se rendre à la confession. Raymond de Capoue raconte d'elle : « Catherine ne cessait de prier et, comme le vainqueur qui vient de capturer ses prisonniers, elle débordait d'allégresse dans le Seigneur, recommandant à ses fils et à ses filles d'avoir soin de nous qui tenions en main le filet qu'elle avait jeté pour cette capture. » On voit ici en quoi consistait le « travail à la barque de Pierre »... ! Tous se pressaient autour de Catherine et elle priait pour leur salut, pour le pardon de leurs péchés. Certains ne souhaitent pas ses prières, mais toujours, elle en glisse une à leur intention.

La conversion de Tuldo, est la plus marquante des conversions obtenues par Catherine. Tuldo est une jeune noble qui doit subir la peine de mort pour avoir plaisanté au sujet des magistrats de Sienne. Il est comme un lion en cage, et, personne, pas même ses amis, n'arrivent à lui faire entendre raison ; il ne veut pas se confesser avant sa mort. On appelle alors Catherine qui lui parle tout simplement de la vie et de la mort, de l'Amour du Christ... Et cela l'apaise. Il reçoit la communion. A sa demande, Catherine l'accompagne jusqu'au billot où il la regarde en souriant, prononçant son prénom et celui de Jésus. Alors qu'elle le rassure en lui parlant du sang de l'Agneau qui lave du péché, elle reçoit sa tête entre les mains. « Alors, dit-elle, j'ai fixé mon regard sur la divine Bonté et j'ai dit : ' Je veux !' Et j'ai vu l'Homme-Dieu, le côté ouvert... Il a reçu l'âme et l'a fait entrer dans la demeure de son coeur, plein de miséricorde... Alors, cette âme fit un geste d'une douceur à ravir 1000 coeurs... comme fait l'épouse quand elle est arrivée au seuil de la maison de l'époux, elle se retourne vers ses compagnes, les regarde, et, s'inclinant, elle fait un dernier geste pour les remercier... ». A cette vision, et dans l'odeur du sang, elle trouve la paix.

Catherine fera souvent allusion au sang, à celui du Christ comme à celui des autres : « Aimez à laver dans le Sang (du Seigneur) le visage de votre âme. » Elle-même se confessait souvent et s'accusait durement : 15 La voix de Catherine de S. 2004 / 1 elle savait que le sang ne nous purifie et ne nous embellit que dans la mesure de notre horreur du péché. Cette horreur était si intense chez elle que son repentir est d'une émotion incroyable. Caffarini rapporte : « Une fois, une parole inexacte, dite sans attention et qui lui paraît un mensonge, devint l'occasion de larmes intarissables trois jours durant. »

500 ans après Sainte Catherine, une autre consacrée se préoccupe du sort des prisonniers et condamnés à mort. Une jeune fille fragile prie en secret. Elle aussi voit le sang du Christ s'écouler de ses plaies. Elle entend le cri de Jésus sur la croix : « J'ai soif ». Ce cri auquel Catherine avait répondu en abreuvant le Christ des âmes perdues qu'elle réorientait vers lui afin de les faire entrer dans la lumière de la miséricorde. Thérèse de Lisieux, elle aussi, a donné à boire au Christ, en priant pour le salut d'un criminel : « Je voulus à tout prix l'empêcher de tomber en enfer (...) sentant de moi-même que je ne pouvais rien, j'offris au Bon Dieu tous les mérites infinis de Notre Seigneur. » Elle savait que le Seigneur pardonnerait à Pranzini, même s'il ne se confessait pas ; elle avait confiance en la miséricorde infinie de Jésus, mais lui demandait un signe de repentir pour sa consolation. Après la mort de Pranzini, Thérèse lut le journal où elle apprit avec une immense émotion : « Pranzini ne s'était pas confessé, il était monté sur l'échafaud et s'apprêtait à passer la tête dans le lugubre trou, quand, tout d'un coup, il se retourne, saisit un crucifix que lui présentait le prêtre et baise par trois fois ses plaies sacrées ! Puis, son âme alla recevoir la sentence miséricordieuse (...) »

Ici, on voit vraiment le parallèle entre ces deux mystiques du Christ, quand Thérèse écrit : « N'était-ce pas devant les plaies de Jésus, en voyant couler son sang divin que la soif des Ames était entrée dans mon cour ? Je voulais leur donner à boire ce sang immaculé qui devait les purifier de leurs souillures, et les lèvres de mon « premier enfant » allèrent se coller sur les plaies sacrées ! » Chez l'une et l'autre, on sent toute l'importance du rachat des fautes et de l'âme par le sang du Christ. C'est Catherine qui voyait les plaies du Christ dans les taches rouges des majuscules des grands antiphonaires, ce sont les mêmes stigmates de feu qui vont la marquer et la rattacher encore davantage au Christ ; c'est elle qui dit à Nicolas Tu!do : « Courage mon doux frère, c'est bientôt que nous serons aux noces. Tu iras, baigné dans le doux sang du Fils de Dieu... » Et c'est du sang de l'Agneau qu'elle lui parle quand elle reçoit sa tête dans les mains. Ce sang dont elle sera éclaboussée, mais dont l'odeur lui paraîtra si douce, le sachant mêlé à celui du Christ, son époux.

Hélas, il y a toujours des condamnés. Ce que firent Sainte Catherine et, après elle, Sainte Thérèse continue. Le film « La dernière marche » nous raconte l'histoire de cette religieuse qui accompagna jusqu'à la mort un criminel, non pour le convertir, mais pour ne pas le laisser mourir seul, pour qu'il se sache aimé de Dieu et déjà dans la miséricorde du Seigneur.

Cette miséricorde, c'est à nous qu'elle est promise, et pour la recevoir, il nous suffit d'écouter Catherine après la mort de son « doux frère » : « Je; n'en dis pas davantage. Je suis demeurée sur la terre, grandement envieuse. Et il me semble que la première pierre soit déjà posée. Aussi, ne vous étonnez point si je ne demande pas autre chose que de vous voir plonger dans le sang et dans le feu qui s'échappe du flanc du Fils de Dieu. Plus de négligence, donc, mes très doux fils, puisque le sang commence à déborder et à recevoir la vie. » Avec elle, entrons dans le côté ouvert du Christ et entrons dans la confession, car : « C'est le sang de la Rédemption qui change le mal en bien, le péché en grâce, l'offense en Amour et qui ne cesse, comme au jour de sa première effusion, de transformer le larron en un saint. » Mireille Cochet Etudiante à Lumen Vitae, 2ème année, diplôme ESC Sources. Cours de Mme van der Plancke, «Actualité de Catherine de Sienne », Lumen Vitae, 2004. J.-M. Perrin, Catherine de Sienne, contemplative dans l'action, Téqui, 1999. Site Internet : http://therese-de-lisieux.cef.fr  .

 

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