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La voix de Catherine de Sienne  : 2005 / 2 - N° 134 - Juin/Juill. 2005.

 
Sommaire : En mémoire de Renée Lex 2 ; Edito 3 ; Benedictus qui venit 4 ; Il dolce Christo in terra 6 ; Ste Marie Madeleine 9 ; Ste Faustine  , Hymne 10 ; Sts Benoit et Bénédicte 16


De tout coeur merci, chère Renée !

"Les deux Renée" étaient pour nous au Foyer Jeanne d'Arc à Liège, comme Marthe et Marie. L'une et l'autre rayonnaient par leur joyeuse hospitalité et leur écoute intérieure !

Renée Lex (en bianc), qui avait tant à coeur le rayonnement de Ste Catherine et prenait tant sur elle au plan de l'organisation, de l'accueil, du bulletin et des contacts internationaux, a rejoint le Seigneur. Elle nous accompagne de là-haut et nous d'ici...

Née à Welkenraedt le 5 mai 1918, Renée Lex, membre de l'Institut séculier dominicain d'Orléans, s'est endormie à Moresnet, entourée de l'affection des siens, le 16 mai 2005. N'ayant pu vous avertir à temps, ni nous joindre à ses funérailles, je vous propose de nous réunir dans la prière et l'action de grâce, si possible dans l'eucharistie, chacun(e) là où il (elle) sera, le ve. 29 juillet, en la fête de sainte Marthe, qui semble si bien lui convenir. Ecoutons Catherine:

 

"Nous irons visiter la demeure
de la bienheureuse Marthe.
De cette fervente hôtelière,
vous recevrez le Christ,
Homme-Dieu.

Elle habite maintenant
la maison du Père céleste,
c'est-à-dire l'Essence divine,
cette essence, cette vision,
où j'espère que par l'abondance
du sang de Jésus Christ,
par les mérites de sa douce mère Marie
et par ceux des saints,
nous goûterons
et nous verrons le Christ
face à face."


A l'abbesse du Monastère Ste-Marthe, à Sienne.
(Let., Téqui, II, p.1102)
 

2
 

Editorial

St Jean-Baptiste, 24 Juin 2005


Chers amis,

Ce dernier trimestre, nous avons traversé le temps pascal en communiant à la passion de Jean-Paul II. Puis, en la veille du 2ème Dimanche de Pâques, nous avons accompagné son "Passage" vers le Père "riche en miséricorde" (à qui il avait dédié sa première encyclique).
Cet homme qui, par l'histoire, venait du pays de l'ombre mais où la foi résiste, a puisé sa lumière et sa force dans de la miséricorde divine. Aujourd'hui le mot 'miséricorde' fait sourire et appartient au rayon bon marché! Mais pour un homme de foi, sensible non seulement au péché et à la barbarie, mais plus encore à ce que Dieu veut nous donner, la Miséricorde nous parle de la victoire de l'amour sur toutes les formes de désamour : racisme, guerres, exploitation, repli, murs et déchirures...
Nous rejoignons ici l'insistance avec laquelle le Père se révèle à Catherine: "Je veux faire miséricorde au monde". C'est dans cette infinie tendresse que mystique et politique s'originent. "Si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs travaillent en vain..." (Ps 127,1) : Jean-Paul II nous à proposé cinq des six patrons de l'Europe afin que les chrétiens apportent à sa construction "une contribution spécifique, qui aura d'autant plus de valeur et d'efficacité qu'ils sauront se renouveler à la lumière de l'Evangile" (Lettre apostolique, 1999, n°1). "L'Eglise, poursuit-il, ne doute pas que ce trésor de sainteté soit précisément le secret de son passé et l'espérance de son avenir. C'est en lui que s'exprime le mieux le don de la Rédemption..." (n°2). Tisser cette Europe au quotidien, c'est notre affaire à tous.

Le temps pascal s'est poursuivi par l'élection de Benoît XVI. Entre surprise, acclamations et diffamations, vous avez sûrement suivi les événements avec les yeux de Ste Catherine. Elle aussi a vécu le passage d'un pape à l'autre : de Grégoire XI à Urbain VI, ce dernier étant sorti des urnes dans un climat franchement plus agité. Puis vint la déception d'une partie de l'Eglise et l'élection d'un autre pape, discréditant l'élection du premier...

Cela paraît lointain et aujourd'hui la tempête médiatique autour de Benoît XVI s'est apaisée. Mais dans nos coeurs, aux heures difficiles, "il y a encore toujours un pape en Avignon" : un pape virtuel, conforme à nos désirs, celui que nous suivrons quand nous n'aurons pas envie d'entendre la voix du pape réel... La lune de miel étant passée, l'Eglise entre liturgiquement dans le temps ordinaire et les défis éthiques et pastoraux s'amoncellent.

Benoît XVI compte avec insitance sur le soutien de notre prière. Son souci de travailler avec l'Esprit Saint "à la réforme de la Ste Eglise" (comme dirait Catherine) plonge la navicella à contre courant du relativisme, mais dans le gulfstream de l'authentique capacité d'aimer que Dieu a mise dans le coeur de l'homme. Il nous rappelle que l'éducation à la foi est le sommet de la formation de la personne. Dans cette action, dit-il, la figure du témoin est centrale : celle du Christ, 7e grand témoin du Père, qui ne disait rien par lui-même mais parlait comme le Père le lui avait enseigné (cfr Jn 8,28)... Voilà pourquoi à la base de la formation de la personne chrétienne et de la transmission de la foi, il y a nécessairement la prière, l'amitié avec Dieu et la contemplation, en Lui, du visage du Père" (6 juin).

Pour nourrir cette "amitié avec Dieu" (!), la liturgie balise notre route par le témoignage des saints. Ce numéro de vacances aussi*. Bonnne route !

Chantal van der Plancke

* 11,22, 23,29 juillet et 9, 25 août.
 

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"Benedictus qui venit..."

Décembre à Cologne, vingt ans d'ici, au lendemain de Noël. Assise au bord du Rhin sous un ciel tout blanc, je repense à ce tableau magnifique que je viens de contempler dans la cathédrale : la Vierge à l'adoration des Mages. Pour moi qui suis née après la guerre, me rendre en Allemagne est à chaque fois une plongée dans l'énigme. Aujourd'hui, à mon insu, le tableau allait changer le voyage en pèlerinage.

Sur le pas de la porte ouverte d'une église, un jeune violoniste joue : "Jesu, bleibet meine Freude..." La mélodie, d'une solennité empreinte de tendresse, porte dans ses vagues le destin d'un peuple précipité dans la tourmente. Il s'est mis à neiger doucement. Le quartier de la gare, comme dans d'autres villes fluviales ou portuaires d'Europe (Rotterdam !) est d'une géométrie qui blesse la mémoire.

Le 29 avril 1945, le jour de ta fête, Catherine, le dernier bastion de la mort cédait à Dachau. Trop tard pour tant d'êtres. Mais parfois, fût-ce de justesse, les libérateurs, qui foulaient du pied les ténèbres, purent offrir à ceux dont le corps terrestre n'était plus qu'une petite lueur, la certitude qu'un régime abject avait été renversé.

Catherine, patronne de l'Europe, as-tu vu ce jour-là dans ton coeur le pont céleste d'une indicible espérance? Toi, qui voyais les millions de morts, les ponts écroulés dans les fleuves, et les fleuves eux-mêmes en feu? Catherine, toi qui aimes tant l'Eglise et son saint pasteur, merci d'avoir accompli, il y a bien plus longtemps encore, le geste inouï de ramener Pierre à Rome! Vois comme tous les peuples de la terre y accourent en hommage à notre cher Jean-Paul II venu de Pologne, terre de martyre et d'espérance. Vois comme, en ces jours d'avril, nous rendons grâce pour un autre miracle...

Soixante ans après les atrocités nazies, et à l'exact opposé des sinistres cheminées concentrationnaires qui brûlaient les enfants de Dieu faits à Son image, la cheminée de la Chapelle Sixtine libère la fumée blanche de la Vie. Et les portes des crématoires, et les portes de l'enfer n'y peuvent rien.

Car aujourd'hui, 24 avril *, jour de la Mémoire des Déportés, ce sont des larmes d'espoir qui accompagnent Celui que le Seigneur a appelé à Le suivre, invincible riposte à l'oeuvre des ténèbres. Né et baptisé un Samedi Saint, immergé dans l'eau nouvelle, Joseph, notre frère et notre père par la grâce divine,
 

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accomplit un nouveau passage, en ces temps de la commémoration de la Pâque du peuple hébreu emmené par Moïse...

Depuis ce 29 avril 1945, que de ponts à reconstruire... Le lumineux visage de Benoît XVI, beau de bonté, éprouvé au feu de l'esprit, soigne le coeur des nations toujours convalescentes, olivier enraciné en terre de souffrances... Ce midi, tandis que les notes libératrices de la Toccata et fugue se mêlent au timbre joyeux des cloches de la place Saint-Pierre et de la foule qui crie son affection au Pape, en communion avec son prédécesseur bien-aimé devenu intercesseur pour nous tous, je repense au violoniste de ce lointain Noël, à la neige qui tombait doucement sur la ville rhénane. En août, à Cologne, le ciel sera bleu, "les champs seront blancs pour la moisson..."


Magnificat ! Benoît, Catherine, patrons de l'Europe renouvelée, vous, tous les saints de Dieu, priez pour notre Pape, priez pour nous.

Bernadette Struelens

 

*. Le 24 avril (-1er mai) 2005, célébration de la Pâque pour les juifs, Dimanche des Rameaux pour es orthodoxes, Sème Dimanche de Pâques pour les catholiques : Messe d'inauguration du pontificat de Benoît XVI.

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De Roumanie

Nous avons vécu spirituellement ensemble l'événement du changement de rôle à Rome : "Il dolce Christo in terra" a désormais un autre visage. Jean-Paul II se réjouit maintenant de la contemplation sans voile de Notre Seigneur, qu'il a servi jusqu'au dernier moment de sa vie mortelle avec un dévouement que nous devrions tous imiter, tandis que Benoît XVI a pris sur ses épaules la croix que Saint Pierre lui a offerte. Dès le premier moment, il nous a demandé de l'aider par nos prières.

Dans la cellule intérieure de nos coeurs, vivons une perpétuelle communion avec l'Eucharistie. Qu'elle devienne le ciment qui lie entre elles les pierres que nous sommes, pour que nous devenions le mur dont Catherine parlait (1). C'est le liant dont l'Europe a besoin. Pas de business...

Après nos fêtes, je verrai une jeune soeur dominicaine roumaine de Cluj, pour travailler ensemble à faire connaître notre bien aimée Patronne... Qu'Elle nous aide !

En union de prière,
Viorica Lascu
29 avril 2005
, Fête de notre Amie Catherine,
Vendredi Saint pour les Catholiques de rite oriental.


(1) NDLR. Pour illustrer l'idée de solidarité, Catherine la compare aux pierres amassées qui peuvent rouler et se casser; mais si elles sont cimentées entre elles, elles deviennent un mur résistant. Chaque pierre garde son originalité, mais ensemble elles constituent une force (Lettre 164). Ailleurs, Catherine dit que les hommes, qu'ils le veuillent ou non, sont liés (Lettre 148). Nous avons une dimension sociale. (Viorica Lascu dans La voix de Catherine de Sienne, 2000 / 3, pp. 5-9).
 

D'Italie

Plusieurs d'entre vous nous ont fait signe depuis Rome, lors de leur pèlerinage pour le dernier adieu à Jean-Paul II. Ils et elles ont souligné combien le fait de passer (ou de rester durant de longs moments d'embouteillage) devant la statue de Sainte Catherine, via délia Conciliazione, les avait particulièrement touchés et portés à la prière, dans la communion des saints.
 

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"Il dolce Christo in terra"


PRIER POUR LE PAPE et l'aider dans sa tâche

La cathédrale Saints-Michel - et- Gudule était comble, le samedi 30 avril dernier, à l'occasion de l'eucharistie d'action de grâce pour l'élection de Benoît XVI. Fidèles de Bruxelles mais aussi d'autres diocèses, mouvements de jeunesse, organisations de laïcs, congrégations religieuses, prêtres, évêques... c'est l'ensemble de l'Église de Belgique qui était représentée à cette célébration présidée par le cardinal Danneels.

Après les lectures du jour, le Cardinal a entamé son homélie en demandant de rendre grâce à Dieu pour le nouveau Pape, qui "a pris sur ses épaules la lourde charge d'être le pasteur universel de nous tous. Au nom de l'Église en Belgique, de tous mes confrères dans l'épiscopat et en mon propre nom: merci saint-Père. Soyez Pierre parmi nous", a enchaîné Mgr Danneels, interrompu par d'insistants applaudissements, qui lui ont fait dire, avec humour "Si je n'avais pas été certain d'être à Bruxelles, je me serais cru à Rome." "Ces dernières semaines, les médias nous ont saturés d'images, d'analyses et de commentaires", a-t-il poursuivi, arguant que, cependant tout n'avait pas été montré: "Il y a le monde invisible, qui demande le regard de la foi pour être vu et l'écoute dans la foi pour comprendre." "Ce qui se passait à la Chapelle Sixti-ne le 19 avril, en ce moment où l'Église et le monde, les anges et les hommes retenaient leur souffle, c'était un dialogue d'amour qui dépasse infiniment tout ce qui était visible ou audible et précède toute passation de pouvoir", a-t-il ajouté.
 

Un dialogue d'amour

Faisant plus loin référence aux relations entre parents et enfants, l'archevêque a expliqué que s'il était "vrai que le pasteur modèle le troupeau", il n'en était pas moins vrai aussi, "qu'en retour, le troupeau, par sa charité, son affection et sa loyauté, modèle son pasteur". "Ce que sera notre nouveau Pape pour nous dépend aussi de ce que nous serons pour lui. C'est à nous surtout par notre charité filiale de lui procurer le bon biotope où il pourra vivre et fructifier", a insisté Mgr Danneels.

Après être revenu sur les deux symboles reçus par Benoît XVI lors de son intronisation - le Pallium et l'anneau du pêcheur - le Cardinal a souligné que si les applaudissements de la foule avaient été généreux et prolongés lors de la célébration d'ouverture du pontificat le Pape ne les avait pas mendiés. "Il ne les provoquait pas, il ne les suscitait pas, ne les prolongeait pas. Il était même réservé. C'est ainsi que j'ai connu le cardinal Ratzinger depuis toujours. Il n'a jamais demandé d'être applaudi", a ajouté Mgr Danneels exposant toutefois les deux demandes que Benoît XVI avait formulées, "cette fois avec insistance": prier pour lui et l'aider.

Il dolce Cristo in terra...

Concernant l'aide demandée par le Pape, Mgr Danneels a déclaré: "En ce moment solennel, je dis en votre nom à vous tous, au nom des évêques de Belgique et en mon nom propre:

Très saint Père, nous prierons pour vous et nous vous aiderons par notre fraternelle et entière collaboration et par la chaleur de notre affection filiale'." Car, a-t-il conclu en reprenant la parole par laquelle sainte Catherine de Sienne, fêtée la veille, terminait toujours les lettres qu'elle adressait au Pape: "Siete il dolce Cristo in terra" ("Vous êtes le doux Christ sur terre").

Toujours accompagnés des magnifiques chants des deux chœurs présents, les évêques ont donné la communion, dans une ambiance recueillie, malgré la foule. Encore une fois applaudi, le Cardinal Danneels a remercié les nombreux fidèles présents, ajoutant: "Que la puissance de cette eucharistie atteigne le cœur tout entier de l'Église, et la renforce dans sa foi et dans son unité."

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22 juillet : Ste Marie Madeleine

Trois visages de femme dans les Evangiles

Marie de Béthanie, la soeur de Marthe et de Lazare, "celle qui a choisi la meilleure part" (Le 10, 38-42), qui est témoin de la résurrection de Lazare (Jn 12, 1-44), celle qui, préfigurant la Passion, répand sur les pieds de Jésus un parfum de grand prix et les essuie avec ses cheveux (Mt 26, 6-13; Me 14,3-9; Jn 12,1-2).

Le pécheresse anonyme. Au cours d'un banquet chez Simon le Pharisien, elle apporte à Jésus un flacon de parfum, baigne les pieds de Jésus de ses larmes et les essuie de ses cheveux (Le 7,36-50). Parce qu'elle a beaucoup aimé, Jésus lui dit: Tes péchés te sont pardonnes". Et parce qu'elle a cru en lui, il ajoute: "Ta foi t'a sauvée. Va en paix".

Marie de Magdala, que Luc surnomme la "Magdaléenne" (la Madeleine): dont Marc dit qu'elle avait "sept démons", fait partie du groupe des femmes qui "assiste " de leurs biens les disciples (Le 8,1-3). Elle se tient sous la croix (Jn 19,25) ou à distance de la croix avec les autres femmes (Mt 27,56; Me 15,40; Le 23,49). Elle fait partie des "myrrophores", qui avaient acheté des aromates pour la sépulture de Jésus (Mt, 28,1; Mc6,1-2. Le 24,1; Jn 20,1).
Chez Jean, elle pleure auprès du tombeau, se voit appelée par son nom, reconnaît celui qu'elle appelle "Rabbi" et devient le premier témoin de la Résurrection auprès des Apôtres.

Chez les Pères de l'Eglise

Les Pères hésitent entre la distinction des trois "Marie" et le mélange des trois figures. Une importante tradition (Tertullien, Augustin, Jérôme, Ephrem, Eusèbe, Basile... ) lit dans le récit de la pécheresse anonyme (Luc) la conversion de Marie Madeleine.
Les Pères soulignent le rôle de Marie Madeleine comme témoin de la résurrection, premier chaînon de la transmission de la foi, en lui donnant le titre de "Apostola apostolorum" : "Apôtre des apôtres".

Au Moyen Age

A la fin des invasions barbares, le Pape Grégoire le Grand (+ 604) fait de Marie Madeleine un portrait combiné qui va marquer tout le Moyen Age: dans ses homélies, il identifie la pécheresse pardonnée (Luc), celle dont "les sept démons" ( "tous les vices!", spécifie-t-il) ont été extirpés (Marc), à Marie de Béthanie (Jean) et à l'apôtre de la résurrection. Par cette union des contraires, la pécheresse devenue apôtre, devient le symbole de la grâce et de la conversion, du pardon et de l'apostolat... en vue de la conversion des moeurs.

Au XIIIe siècle, La Légende dorée, publiée par le dominicain Jacques de Voragine (de Varazze, près de Gênes), popularise l'idée que la mondaine et voluptueuse Marie Madeleine (héritière du château de Magdala) aurait mené une vie d'ermite et de repentance dans le désert à la Sainte-Baume, après avoir accosté à Marseille, avec Marthe et Lazare. Voilà un modèle pour les ermites et les moines placés sous le patronage de cette convertie.

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Complétant les évangiles, les légendes ont donc amplifié la vie mondaine de cette femme, devenue une riche courtisane (la femme aux parfums), source de scandale, .pour pouvoir exalter, par contrastes, sa vie de pauvreté et de pénitence au désert.

De la Renaissance à Vatican II

Au XVIe siècle, l'érudit Jacques Lefèvre d'Etaples dénonce l'amalgame fait par le Pape Grégoire. Les protestants s'emparent de la nouvelle pour dénoncer les abus de l'Eglise. La polémique s'en mêle et les catholiques hésiteront longtemps à admettre le mélange induit par la prédication (cfr le très bel opuscule de Bossuet, Sur les trois Madeleine).
Depuis Vatican II le nouveau calendrier liturgique (1969) cesse d'identifier les "trois Marie en une" et célèbre surtout "l'apôtre des apôtres", comme dans la liturgie byzantine. Ainsi l'image de la pécheresse pleurant ses péchés à côté de saint Pierre pleurant son reniement, si courante sur les reliefs des confessionnaux baroques, cède-t-elle le pas à l'image de la Bien aimée du Cantique des Cantiques (1ère lecture: 3,1-4), dont les larmes de deuil s'effacent devant la joie pascale, source de témoignage apostolique (Jn 20,11-18).

Dans les médias

Dès le début du christianisme, en marge des Evangiles, des récits apocryphes, de tendance gnostique, racontent que Marie Madeleine s'est violemment opposée à Pierre. La contestataire deviendra ainsi, dans certains courants féministes, "la" référence. Cela donne certains reportages délibérément sulfureux, et finalement iconoclastes en matière de féminisme.
Marie Madeleine, l'amante du Seigneur est, pour les gnostiques, "l'initiée" par excellence. Dans la ligne de ce courant initiatique, où Dieu est androgyne, masculin-féminin, il devient facile de voir en Jésus et son amante initiée un "couple sauveur". Puisant dans la littérature ésotérique du XIX e siècle, "l'Ordre de Marie Madeleine" présente même la Trinité comme composée de Dieu, Jésus et Marie Madeleine. L'image du couple est bien partie... Mais elle n'a plus rien à voir avec l'Eglise.

Mieux. Dans Da Vinci Code, Marie Madeleine, enceinte de Jésus, porte en elle le sang du Sauveur. Elle devient une figure du Saint Graal, ce calice dans lequel les chevaliers de la table ronde avaient recueilli le sang jailli du côté du Christ. Légende pour légende, la faute est à l'Eglise qui nous a caché tout ça! Le thriller vend ses frissons. Et, vérité pour vérité, il n'y a bien que les frissons et l'imposture qui soient authentiques. Quant à la descendance de Marie Madeleine, qui porte en elle un sang pur, on devine la dérive...

Côté Hollywood, la Marie Madeleine erotique, dans sa grotte d'ermite, à l'aube de son chemin pénitentiel, avait déjà inspiré de nombreux peintres depuis le XVIe siècle. C'était une manière de pouvoir peindre des nus sous couvert de piété et de vendre du charme sous les débris vestimentaires de la pauvre pénitente. Par contre la Madeleine en déshabillé complet était couverte de la tête aux pieds par sa providentielle chevelure, à l'image d'une autre prostituée convertie, l'antique Marie l'Egyptienne, morte en odeur de sainteté dans le désert.

La grâce et la sainteté s'en allant, le côté séducteur a achevé de transformer celles que l'amour divin a touchées en stars qui doivent aguicher. Marie Madeleine non seulement bat la campagne... mais elle fait campagne. Quant à Marie l'Egyptienne, elle soutient une pub pour le shampoing!

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Marie de Magdala et Catherine de Sienne


D'après Raymond de Capoue, Catherine avait une dévotion particulière pour Marie-Madeleine que, dès son adolescence, le Seigneur lui avait donnée pour mère (Vie, II, ch. 6)

L'icône de l'amour unitif et contagieux

Dans une très belle lettre à Agnès, veuve de Messire Orso Malavolti, Catherine invite cette tertiaire dominicaine à imiter les vertus d'Agnès de Montepulciano et de Marie de Magdala. (Téqui, II, p.1220).

"J'écris avec amour et désir, me rappelant la parole du Maître. J'ai désiré avec désir vous voir unies et transformées dans cet ardent et parfait amour, comme l'a fait Madeleine, qui eut le zèle d'un apôtre et dont l'amour fut si grand qu'elle ne s'occupa plus d'autre chose créée."

Pour progresser dans la grâce, Catherine lui propose de s'identifier à "cet ardent disciple de Jésus Christ". Elle l'incite à imiter celle qui cherche toujours à s'approcher du Seigneur de plus près. Comment? Le texte est dicté d'une seule volée. Tous les tableaux s'enchaînent. Mais ils s'en dégage une gestuelle qui invite à suivre pas à pas ce modèle mystique de l'amour.

Premier mouvement : se connaître en Dieu. Madeleine "s'humilia et se connut elle-même; elle se reposa avec tant d'amour, aux pieds de notre doux Sauveur". La voici donc humble, comme la pécheresse aux pieds du Sauveur; se reposant, comme Marie de Béthanie aux pieds du Maître, buvant ses paroles. L'amour l'a transformée. Mais l'histoire ne s'arrête pas là.

Deuxième mouvement : être intrépide. Rien n'arrête celle qui n'a plus qu'une seule passion : être avec Jésus dans sa souffrance. C'est ainsi qu'on montre son amour. "Et si nous disons qu'elle montra beaucoup d'amour, nous le voyons bien : à la sainte croix du Calvaire; car elle ne redoute pas les juifs, elle ne craint rien pour elle-même; mais dans son transport, elle court, elle embrasse la Croix". C'est honorer le Christ que de voir la force d'attraction qu'il exerce. Comme la bien-aimée du Cantique des Cantique, le coeur de Madeleine bat : "attire-moi, nous courrons". Catherine insiste sur le fait que l'élan de Marie trouve sa source en celui qui est mort pour elle : " Il n'est pas douteux que pour voir son Maître, elle fut inondée de son sang. "

Troisième mouvement : s'enivrer et partager. "Madeleine s'enivra d'amour et montra combien elle était passionnée pour son Maître; elle le montra à ses créatures par ce qu'elle fit après la Résurrection, lorsqu'elle prêcha dans la ville de Marseille".

Quatrième mouvement : dans la désolation, persévérer ! "Je vous dis aussi qu'elle eut la vertu de persévérance et elle le montra, cette douce Madeleine, lorsqu'elle chercha son doux Maître et qu'elle ne le trouva pas dans le lieu où on l'avait placé."

La célèbre homélie de Grégoire le Grand, diffusée dans les bréviaires des Xlll-XIVèmes siècles, et toute l'homilétique qui s'en est inspirée (1), souligne la vertu de persévérance chez Madeleine: "Elle a persévéré dans sa recherche et c'est pourquoi elle devait trouver; ce qui s'est produit, c'est que ses désirs ont grandi à cause de son attente... Si l'attente les fait tomber, ce n'étaient pas de vrais désirs".

(1) cfr E. Pinto-Mathieu, Marie Madeleine dans la littérature du Moyen Age, Paris, Beauchesne, 1997, pp. 3-43.
 

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"0 Madeleine !, poursuit Catherine, vous étiez folle d'amour, vous n'aviez plus votre coeur, car il était enseveli avec votre doux Maître, avec votre doux Sauveur". Madeleine est morte avec Celui qui est sa vie (2). Elle n'habite plus en elle-même, mais en lui : c'est l'extase". Elle lui est toujours unie : qu'il soit vivant, souffrant, mort ou enseveli ! Qu'il soit séparé d'elle par son corps, elle demeure inséparable de lui par son âme. La séparation, loin de l'abattre, augmente son désir.
Catherine connaît elle-même le désir de mourir pour être avec Celui qu'elle aime. Elle est fascinée par l'amour de Madeleine et partage sa douleur. "Vous avez pris le bon moyen pour trouver le doux Jésus. Vous persévérez et vous n'apaisez pas votre immense douleur. Oh ! Que vous faites bien, car vous voyez que c'est la persévérance qui vous a fait trouver votre Maître."

Le modèle de l'âme éprise du Christ

Dans cette lettre (3), nous contemplons la figure unique des trois saintes femmes telle que la liturgie la présentait. Pour Catherine, se mettre à l'école de "la dolce, l'innamorata Maddalena", c'est progresser sur le chemin de la conversion et de l'union mystique au Christ. Après la Mère de Jésus, "la disciple"est celle qui est entrée le plus profondément dans le mystère pascal, parce qu'au pied de la croix, elle s'est unie au Christ et qu'au jardin du tombeau, elle l'a cherché jusqu'à ce qu'elle le trouve. Le geste de la pécheresse qui s'humilie est fondé sur la seule confiance en la miséricorde de Dieu. Cette miséricorde reçue libère l'amour. L'amour devient le moteur de sa vie : la source de sa relation au Christ, de sa liberté vis-à-vis des autres et de son détachement des choses créées.

En laissant travailler la tradition grégorienne et la liturgie, Catherine va droit à l'essentiel. Avec une grande sobriété! Des pieds de Jésus jusqu'à la mission universelle (Marseille), celle qui affronte toutes les contradictions de son entourage pour "être avec lui' quand il souffre, celle qui le cherche quand tout semble perdu, est la figure de l'épouse du Cantique des cantiques qui ne peut plus s'empêcher d'aimer!
 

Chantal van der Plancke
 

 

(2) Catherine sait de quoi elle parle. En 1370, elle fait l'expérience d'une mort mystique.
(3) Voir les autres lettres où Catherine fait référence à la figure de Marie Madeleine : à Mme Barthélémy, femme de Salvatico, de Lucques (Téqui II, pp. 1671-73) ;
à une femme publique de Pérouse (Téqui 11, p. 1751);
à un moine sorti de son couvent (Téqui II, p. 1027). Celle-ci a été commentée dans notre ouvrage : Ch. v. d. P. et A.
Knockaert, Prier 15 jours avec Catherine de S., Nouv. Cité, 3e éd., 2005, pp. 89-95. "Lettre à une âme en crise".

 

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Centenaire de la naissance de Ste Faustine

 

Le 25 août 1905, naît la troisième des dix enfants de la famille Kowalska, une famille d'agriculteurs. Au baptême, elle reçoit le prénom d'Hélène. Elle ne fréquente l'école que durant trois ans, devant garder le troupeau pour aider la famille. Dès 7 ans, elle se sent appelée à la vie religieuse, mais ses parents s'y opposant, elle tente d'étouffer cette voix. Cependant, touchée par le Christ souffrant, elle entre en 1925 chez les soeurs N. D. de la Miséricorde. Sa vie, très monotone et grise en apparence traduit la profondeur de son union au Christ. Comme Catherine, à 33 ans, elle est appelée à rejoindre la miséricorde de Dieu, dont l'une et l'autre avaient profondément fait l'expérience, et dont elles furent les 'secrétaires' et les 'apôtres' dans un monde de conflits.

Le 5 octobre 1938, au seuil de la montée du nazisme, Karol Wojtyla n'a que 18 ans lorsque Soeur Faustine meurt. Il ne l'a jamais connue personnellement, mais elle n'a jamais trouvé meilleur messager que lui. La tombe de la soeur se trouve dans le sanctuaire de la Miséricorde divine à Cracovie. Le Cardinal Wojtyla, archevêque du lieu, y passe de longues heures en prière. Ce qui frappe surtout le pasteur, c'est que Sr Faustine reçut du Ressuscité le message de la Miséricorde lorsque l'Europe, encore convalescente après la première guerre mondiale, se préparait à entrer dans une nouvelle atrocité. A l'heure où Jean-Paul II meurt, le samedi soir 2 avril, l'Eglise a déjà commencé à célébrer la fête de la Miséricorde divine, qu'il avait lui-même instituée en l'an 2000 (lors de la canonisation de la sainte) et fixée au 2e dimanche de Pâques.

Le 5 novembre 1978, au seuil de sa nouvelle charge comme successeur de Pierre, Jean-Paul II se rend au tombeau de Ste Catherine, à Rome, dans l'Eglise Sta Maria sopra Minerva, pour lui confier sa mission. En 1980, il dédie sa première encyclique au Père "Riche en Miséricorde", "Celui qui prend plaisir à faire grâce." (Mi 7, 18).

L'expérience de la miséricorde chez Soeur Faustine

Durant son noviciat, la jeune fille traverse de douloureuses périodes de doute, de sécheresse et d'angoisse. Elle se croit même damnée jusqu'au moment où, dans un sursaut de confiance, elle se fie à la miséricorde de Dieu. Elle sort purifiée par cette épreuve. Dans son Petit Journal, elle écrit ce que lui inspire le Seigneur. En voici quelques extraits :
 

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"Je désire que la fête de la Miséricorde soit le recours et le refuge pour toutes les âmes et surtout pour les pauvres pécheurs. En ce jour les entrailles de ma miséricorde sont grandes ouvertes. Je déverse tout un océan de grâces sur les âmes qui s'approchent de la source de ma miséricorde" (§ 699).

"Vois ce que tu es par toi-même, mais ne t'en effraie pas... Sache que parce que tu es tellement misérable, j'ai découvert devant toi tout l'océan de ma Miséricorde... Tu as de grands droits sur moi car tu as pleine confiance... Mon amour et ma miséricorde ne connaissent pas de bornes" (§ 717).

"J'ai ouvert mon coeur en tant que source jaillissante de miséricorde. Que toutes les âmes y puisent la vie. Qu'elles s'approchent de cet océan de Miséricorde avec une grande confiance... J'emplirai de ma divine Paix l'âme ancrée en ma Miséricorde parla confiance" ( § 1519).

Transpercé et ressuscité

La révélation de la miséricorde de Dieu se manifeste au plus haut point dans l'ouverture du côté sur la croix. C'est le coeur, surtout s'il est blessé, qui exprime le plus fortement l'amour. Catherine a reçu la grâce de prolonger la mission de St Jean, témoin du côté ouvert: "Renferme-toi dans la douce chambre nuptiale, c'est-à-dire dans le côté de Jésus crucifié, où tu pourras te baigner dans son sang qu'il a répandu pour laver la lèpre de ton âme" (L 322). Par ce côté, elle nous fait entrer dans l'intimité de l'Epoux.

Entre 1673 et 1675, Jésus apparaît à Marguerite Marie Alacoque à Paray-le-Monial, en l'Eglise vénère davantage ce coeur blessé pour notre salut. En 1856, la fête du Sacré Coeur est instituée. Par la suite, on parlera de plus en plus de "sacrifices pour réparer les outrages infligés au Sacré Coeur"...

Dans les vision de Sr Faustine, le coeur n'est évoqué que pour manifester la source de cet océan de miséricorde qui veut guérir l'humanité: seuls des rayons rouges et blancs, évoquant le sang et l'eau, apparaissent. L'accent est mis sur la communication de cette miséricorde qui appelle de toutes ses forces notre foi et notre confiance. Ce n'est pas pour rien que, ce jour là, la liturgie nous met devant le Ressuscité, qui dans le Cénacle porte la grande annonce de la miséricorde et en confie le ministère aux apôtres: "Paix à vous! Comme le Père m'a envoyé, je vous envoie (...). Recevez l'Eprit-Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis (...). " (Jn 20, 21-23). Encore faut-il que nous ne soyons pas incrédules.


 

Hymne à la Miséricorde

Après que le Père lui ait révélé son Fils comme un pont qui nous relie à Lui,
Catherine s'exclame:


"Alors cette âme, comme enivrée, ne pouvait plus se contenir et, quasi face à face avec Dieu, elle disait :

O éternelle miséricorde, toi qui couvres les fautes de tes créatures !
Je ne m'étonne plus que tu dises
de ceux qui sortent du péché mortel pour revenir à toi :
'Moi, je ne me souviens plus que vous m'ayez offensé !' (1 )

0 miséricorde ineffable, je ne m'étonne pas que tu parles ainsi
à ceux qui sortent du péché,
puisque à propos de ceux qui te persécutent, tu dis :
'Je veux que vous me priiez pour eux afin que je leur fasse miséricorde'.

0 miséricorde qui s'écoule de ta Divinité, Père éternel,
et qui gouverne par ta puissance le monde tout entier!
C'est par ta miséricorde que nous avons été créés;
par ta miséricorde nous avons été recréés,
dans le sang de ton Fils;
C'est ta miséricorde qui nous conserve;
c'est ta miséricorde qui a fait jouter (2) ton Fils
sur le bois de la croix, dans le tournoi
de la mort contre la vie et de la vie contre la mort !

C'est là que la vie a vaincu la mort du péché
et que la mort du péché a arraché
la vie corporelle de l'Agneau immaculé.
Qui a été vaincu ? La mort! Qui en fut la cause?
Ta miséricorde ! Ta miséricorde donne la vie, et la lumière
qui nous fait connaître ta clémence (...),
pour les justes et pour les pécheurs.

Au plus haut des cieux, ta miséricorde resplendit
comme elle resplendit dans tes saints.
La terre entière, si je la regarde, foisonne de ta miséricorde,
mais dans les ténèbres de l'enfer, ta miséricorde brille encore;
puisque tu n'accables pas les damnés
de toute la douleur qu'ils méritent (...)


(1) cfr Jérémie 31,34 et Ezéchiel 18, 21-22 et 33,11-16: la promesse d'oublier faite au pécheur qui revient vers Dieu.
(2) Image empruntée aux mondes sportif ( joutes entre chevaliers) et liturgique : "La mort et la vie s'affrontèrent en un duel prodigieux..." (séquence de Pâques). Cfr Lettre à Grégoire XI (Téqui, p.160, Let. IV) où Catherine emploie les mêmes termes pour adoucir le pape : qu'il ramène ses brebis dans l'Eglise avec la bonté du Christ sur la croix ! (La Voix..., 1998/1,p.9).

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0 Fou d'amour !

Par ta miséricorde tu as voulu vivre avec tes créatures
"["'incarner ne t'a point suffi : c'est mourir que tu as voulu !
Mais la mort ne te suffisait point encore,
que tu descendis aux enfers
pour en délivrer les saints patriarches
et accomplir en eux ta vérité et ta miséricorde !
Puisque ta bonté avait promis le bonheur à ceux qui te servent en vérité,
te voilà descendant dans les limbes pour sauver des peines
ceux qui t'avaient servi et les récompenser de leurs travaux.

C'est ta miséricorde, je le vois,
qui t' a poussé à donner à l'homme encore davantage.
Tu t'es laissé toi-même en nourriture,
afin que nous soyons fortifiés dans notre faiblesse,
et que par un tel souvenir, nous ne perdions,
par ignorance, la mémoire de tes bienfaits.
Voilà pourquoi, chaque jour, tu te donnes à l'homme,
en te représentant à lui dans le sacrement de l'autel,
dans le corps mystique de la sainte Eglise.
A qui devons-nous cela? A ta miséricorde !

0 miséricorde !
Mon coeur devient fou de penser à toi !
De quelque côté que mon esprit se tourne
et se retourne,
je ne vois que miséricorde !

0 Père éternel, pardonne à mon ignorance,
si j'ai osé parler devant toi !
Que l'amour de ta miséricorde
me serve d'excuse auprès de ta clémence."


Dialogue 1 ch 14.
Ch. XXX, éd. du Seuil, pp.111-112.
Ch. XIV (30), édTéqui, pp. 102-104.

Dans ce 'Magnificat' ou 'Benedictus', de Catherine, se retrouvent les accents cosmiques des hymnes de Paul : Eph1, 3-1, "Bénisoit Dieu, le Père...", Ph 4 et Col 1. Tout le mystère du salut y est visionné. Elle en exprime "la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur" (Ep 3,18) avec une infinie gratitude.
 

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Copatrons de l'Europe

9 août Ste Edith Stein 11 juillet St Benoît 23 juillet Ste Brigitte


J'ai voulu m'appeler Benoît XVI pour me relier en pensée au vénéré Benoît XV qui conduisit l'Eglise en une période tourmentée à cause du premier conflit mondial...

Le nom de Benoît évoque la figure extraordinaire du grand 'patriarche du monachisme occidental', saint Benoît de Nursie, copatron de l'Europe... L'expansion progressive de l'ordre bénédictin, fondé par lui, a exercé une énorme influence dans la diffusion du christianisme dans tout le continent... Nous connaissons la recommandation qu'il a laissée aux moines dans sa Règle : "Ne rien préférer au Christ. " Au début de mon ministère comme successeur de Pierre, je demande à saint Benoît qu'il nous aide à garder fermement le Christ au centre de notre existence. Que le Christ soit toujours à la première place dans nos pensées et dans toutes nos activités.

Benoît XVI,
1ère audience hebdomadaire, DC n°2337, juin

Nous nous tournons aujourd'hui vers Thérèse-Bénédicte de la Croix, reconnaissant dans son témoignage de victime innocente, d'une part, l'imitation de l'Agneau immolé et la protestation élevée contre toutes les violations des droits fondamentaux de la personne; d'autre part, le gage de la rencontre renouvelée entre juifs et chrétiens qui, dans la ligne voulue par le Concile Vatican II, connaît un temps prometteur d'ouverture réciproque.

Déclarer aujourd'hui Edith Stein copatronne de l'Europe signifie déployer sur l'horizon du vieux continent un étendard de respect, de tolérance et d'accueil, qui invite hommes et femmes à se comprendre et à s'accepter au-delà des diversités de race, de culture et de religion, afin de former une société vraiment fraternelle.

Jean-Paul II, Lettre apostolique du 1er oct. 1999, n°9.


Puisse donc l'Europe croître! Puisse-t-elle croître comme une Europe de l'esprit, dans la ligne du meilleur de son histoire, qui trouve précisément dans la sainteté son expression la plus haute... (Les Européens) sont face au défi de la construction d'une culture et d'une éthique de l'unité, sans lesquelles n'importe quelle politique de l'unité est destinée tôt ou tard à s'effondrer.
Jean-Paul II, ibid., n° 10.
 

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